Passer du plan A au plan D pour mon premier accouchement
Je t’avais laissé(e) sur la toute fin de ma grossesse sur le blog Dans Ma Tribu, t’expliquant à quel point j’avais hâte d’accoucher. Ce jeudi 24 janvier, je pensais donc ne jamais, je dis bien jamais, accoucher ! Sauf que ça ne se passe pas comme ça, et heureusement, l’accouchement finit toujours par avoir lieu.

Alors que ça faisait donc des mois que je me préparais à accoucher en maison de naissance, avec l’une ou l’autre des deux sages-femmes qui m’avaient suivie durant toute ma grossesse, ce jeudi 24 janvier m’a appris une chose : il faut toujours se préparer à l’imprévu ! Ma mère venait tout juste de prendre la route (cinq longues heures de trajet pour rentrer chez elle) et je sortais à peine de la douche… que je me retrouvais par terre, allongée sur le ventre suite à une mauvaise chute. Panique à bord, je pleure et j’appelle mon mari, au lieu d’appeler ma sage-femme ! Retrouvant mes esprits, une fois ma sage-femme au bout du fil, je suis rassurée par ses propos mais j’appelle quand même ma belle-mère : un petit tour à la maternité s’impose pour faire un monitoring du bébé et une échographie afin de s’assurer que tout va bien.
Et en effet, tout va bien. On m’annonce même que j’ai des contractions, alors que je ne ressens rien, aucune douleur ni même l’ombre d’une sensation. Mais je suis euphorique : c’est sûrement pour très bientôt ! Je rappelle donc ma sage-femme d’astreinte (la seule, car malheureusement, depuis deux semaines, elle assure seule les gardes, son binôme étant en arrêt pour une vilaine hernie discale) et je l’informe des dernières nouvelles. Je lui dis que j’espère accoucher très vite, elle me répond calmement que ça serait bien s’il attendait au moins de passer le week-end.
Pourquoi attendre le week-end ? L’Élu n’a pas eu envie d’écouter les sages conseils de ma sage-femme, et c’est en étant morte de rire que je la rappelle, deux heures plus tard, pour lui annoncer que j’ai perdu les eaux (deux secondes après être sortie de la voiture de ma belle-mère, quelle belle idée j’ai eu de sortir à ce moment précis !). Elle me demande alors de venir faire un monitoring à son cabinet, car on a désormais vingt-quatre heures pour que le travail se mette en route.
Je te la fais courte, mais quand j’arrive là-bas, je sens que quelque chose ne va pas. Ma sage-femme d’habitude si dynamique et enjouée me semble « éteinte ». Envahie par les hormones, je me demande même si elle ne me fait pas la tête ! Et bien non… j’apprends juste quelques minutes plus tard, qu’elle est en arrêt de travail suite à un gros problème de hanches et un accouchement très long le jour même. Je suis dans un état second, je ne comprends pas. Ses mots résonnent dans ma tête « je ne vais pas pouvoir t’accoucher à la maison de naissance ». Je me sens totalement perdue et je ressens une forte envie de pleurer. Je suis tellement à l’ouest que je lui demande « mais je vais accoucher où ? », oubliant que les maternités existent et sont des endroits tout à fait appropriés pour mettre au monde son enfant. Mon mari nous a rejoint à ce moment là, ayant pris immédiatement la route quand je l’ai appelé pour lui dire que j’avais perdu les eaux, et pour lui aussi, ce fut le choc.
En préparation à la naissance, en maison de naissance, on évoque justement les plans B, même les plans C… Je savais donc que si mon plan A ne fonctionnait pas (un accouchement physiologique en maison de naissance avec une de mes sages-femmes), il me restait le plan B (un accouchement en plateau technique avec ma sage-femme) ou le plan C (un accouchement à la maternité avec le soutien de ma sage-femme). Or, là, c’était le plan D qui se présentait à moi, à savoir accoucher à la maternité, mais sans ma sage-femme. Pour la plupart des femmes suivies de façon classique en maternité, c’est le scénario classique, leur plan A. Pour moi, c’était l’inconnu total et la déception, la peur et la colère, l’injustice et l’incompréhension.
Ma sage-femme a tout fait pour tenter de trouver une solution en maison de naissance, en appelant toutes les sages-femmes de la maison de naissance, mais il manquait une sage-femme (j’en reparlerai dans un prochain article concernant les conditions d’accouchement en maison de naissance). Elle m’a rassurée, en me disant que la maternité partenaire était une maternité qui était très axée sur l’accouchement physiologique, et qu’elle allait les appeler pour les avertir de notre arrivée. A ce moment là, j’ai serré très fort les deux feuilles imprimées de mon projet de naissance, me rattachant à cela comme à une bouée en pleine mer agitée.

Je n’ai pas pleuré, j’ai voulu garder la face, ne rien montrer, mais au fond de moi, c’était un véritable tsunami d’émotions. Et dans mon utérus, le calme plat. Des contractions toutes gentillettes qui n’allaient pas rendre le travail très efficace. Mais là aussi, j’ignorais encore que les plans allaient changer en cours de route, une longue route avant de rencontrer l’Élu, ce premier enfant que nous avions tant attendu.
Trente-trois heures. C’est le temps que l’on aura attendu pour entendre son premier cri. Trente-trois heures dont vingt-huit en gardant le cap moralement, sans péridurale. Et c’est finalement la mort dans l’âme, voyant que le travail n’avançait pas aussi vite que je l’avais imaginé, ou espéré, que j’ai demandé la péridurale. Et au final, les heures les plus longues furent celles post-péridurale. Avec une poussée interminable, inefficace à cause d’une péridurale surdosée, des pensées négatives et des angoisses. Même l’attente de la gynécologue de garde m’a semblé interminable, et j’ai eu très peur quand elle a replacé l’Élu qui avait dévié de sa route pour sortir… Cela n’a sûrement duré que quelques secondes, au pire une à deux minutes, mais j’ai cru que ça faisait plus de dix minutes qu’elle essayait de sortir cet enfant mystère, ce bébé tant attendu… Mes pensées du 24 janvier revenaient en force : je n’accoucherai jamais. Et pourtant, à 1h49, le samedi 26 janvier, l’Élu est né.

J’ai mis quelques secondes avant de réaliser qu’il était là, posé sur mon corps, vivant. C’est mon mari qui a regardé le sexe de ce bébé mystère. « C’est un garçon ». Jaël était né. Notre premier enfant venait de créer notre famille. Tout comme notre parcours pour l’avoir qui aura été de passer du plan A au plan… F ou G. Sa naissance ne se sera pas passée comme nous l’avions imaginée.
Beaucoup diront que le principal est que maman et bébé vont bien, et je suis complètement d’accord avec cela. Toutefois, cet accouchement, que je n’arrive pas encore à mettre à l’écrit entièrement à cause de nombreux regrets, a créé en moi certaines blessures, que j’ai comprises et commencées à guérir… lors de ma deuxième grossesse, dont je te parlerai très prochainement. Il est important d’accepter nos émotions, nos regrets. Oui, mon fils va bien et mon accouchement ne s’est pas terminé en code rouge, mais malgré tout, je ne l’ai pas si bien vécu.
Et toi, as-tu eu l’accouchement que tu imaginais ? As-tu des regrets ou des choses que tu n’as pas très bien vécu ?
Je pense qu’en certaines matières ce qui compte est le ressenti et qu’il est inutile de rentrer dans des comparaisons. La parentalité en général en est une. Donc je trouve triste que tu ne te sentes pas légitime à dire « j’ai mal vécu mon accouchement » parce qu’il n’y a pas eu danger ou code rouge. Si tu l’as mal vécu, ba tu l’as mal vécu, ce sont tes émotions, c’est toi qui étais dedans, donc c’est ta réalité quoi qu’il arrive.
Hors sujet mais j’aime beaucoup le prénom de ton petit garçon 😉
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Merci pour ton message !
Ecrire cet article, mais aussi en parler à mes sages-femmes etc, tout ceci m’a permis d’arriver à enfin pouvoir le dire, mettre des émotions sur ce que j’ai ressenti et vécu 🙂
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Moi qui ai tellement regretté de ne pas avoir pensé à la maison de naissance pour mon premier accouchement… Et d’en être exclue pour mon deuxième (en raison de la césarienne d’urgence du premier), je ne peux que comprendre ta déception : ce qui s’est passé est si loin du scénario projeté ! Je compatis donc beaucoup et j’espère que ton deuxième accouchement t’a permis de guérir de tes blessures.
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Oh oui alors je comprends aussi ta déception. J’espère que malgré tout tu gardes de beaux souvenirs de tes deux accouchements et que tu as pu faire un projet de naissance qui te correspondait pour ton deuxième, en prenant en compte ton antécédent de césarienne !
Rdv dans quelques semaines pour la suite de mes aventures avec Numérobis 😉
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N’ayant pas pu accoucher avec ma sage-femme parce que j’ai eu la fausse bonne idée d’accoucher un 24 décembre, je compatis totalement avec toi. Ne pas se sentir légitime dans son deuil de l’accouchement idéal, c’est vraiment terrible (surtout en bon ex-pmette). Je suis contente de lire que tu as pu démêler tout ça pendant ta deuxième grossesse 😘
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J’ai parfois ‘impression que nos bébés choisissent tjs un jour bien spécifique pour naître et chambouler tous nos plans !!! C’est pas ça la base de la parentalité d’ailleurs 😉 ?
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J’avais imaginé pour moi un accouchement rapide (ma mère a accouché 4 fois en moins de trois heures) et sans péridurale. Après 17 heures de travail, et stagnation de la dilatation, j’ai heureusement accepté la péridurale, il a fallu 4 heures de plus, des forceps et une episiotomie. Pour mon deuxième accouchement, j’ai dépassé le terme de 4 jours et on m’a déclenché, en acceptant de ne pas faire de péridurale d’emblée. J’ai accouché en 5 heures, carrément fingers in the nose ou presque, la durée du travail est quand même un facteur majeur dans l’épuisement. Finalement ce deuxième accouchement m’a certainement permis de mieux accepter le premier.
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Je me reconnais dans ton témoignage ! Ma SF m’a dit pareil… Si le travail avait été moins long, j’aurai été moins fatiguée et j’aurai pu gérer autrement. Et comme toi, mon deuxième accouchement a permis de guérir de mes blessures passées et de pouvoir accepter certaines choses. Je reste maintenant convaincue qu’il fallait que j’accouche ainsi de l’Elu pour mettre au monde différemment Numérobis !
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Il m’a fallu presque 2 ans pour accepter que mes accouchements (qui se sont parfaitement déroulés !) n’ont pas été ceux que j’espérais, alors je comprends 😉
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C’est dingue quand même ! Je me demande si ça ne vient pas non plus d’une sorte de pression sociale (comme bcp d’autre chose qui tourne autour de la maternité d’ailleurs) !
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Comme Virg : tu as le droit d’avoir mal vécu ce changement de plans, on ressent ce qu’on ressent !
Je compatis complètement, je voulais aussi accoucher en maison de naissance avec ma sage-femme, mais après avoir dépassé le terme j’ai été obligée d’aller à la maternité pour un déclenchement, et ai même fini par prendre la péridurale (mon seul mini-regret, a posteriori je pense que si j’avais attendu un peu j’aurais finalement tenu, mais bon, c’était un choix convaincu sur le moment et c’est facile de dire ça quand on n’a plus mal !). Étonnamment je ne garde pas de déception que tout se soit passé à l’opposé de ce que je voulais, et j’ai été traitée avec bienveillance, ça a dû m’aider. Mais on ne choisit pas comment on vit les choses ! J’espère que ton prochain accouchement sera plus conforme à tes attentes 🙂
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Finalement, avec le recul (et tout le travail fait avec mes sf autour de mes ressentis et émotions…) la péridurale n’est pas tant un regret. En tout cas, le principal, c’est que maintenant j’accepte de me dire que je n’ai pas eu la naissance que je voulais pour mon premier enfant.
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Je me retrouve dans ton témoignage : j’espérais un accouchement physio sans péri et dans l’eau… Mais après 16h de travail sans péri et dans des douleurs qui me semblaient insurmontables, à peine dilatée à 4, j’ai craqué et demandé la péri. Sur le coup, ma déception a été immense, l’impression de ne pas être capable de mener à bien cet accouchement que j’avais imaginé. Et aujourd’hui, 6 semaines après, je m’en fiche complètement, car ma fille est là, une merveille en pleine santé. Mais c’est vrai que le deuil de l’accouchement rêvé n’est pas facile !
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Félicitations pour cette naissance !
En effet, ce deuil n’est pas simple, surtout que pour ma part, bcp répétaient que l’essentiel, c’est que bébé aille bien… Il m’a fallu du temps pour dissocier mon bébé de mon accouchement et d’accepter mes ressentis !
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Tu n’as vraiment pas eu de chance et bravo d’avoir gardé le cap et le moral face à ces plans si chamboulés !
Je me retrouve à moitié dans ton témoignage. Arrivée vendredi à 10h à la mater, je n’ai tenu bébé dans mes bras que 42h après ! Ce fut très long aussi. Par contre pour mois la péri a été salutaire car au bout de nécessaire car au bout de 36h, à la pause de la péri je n’étais toujours dilaté qu’à 4. En 3h de péri, j’étais enfin à 10 !
Et même si par la suite les contractions se sont franchement espacées (á cause de la fatigue de mon corps ou de la péri, c’est dur à savoir) et que bébé est donc né avec la ventouse, j’ai un souvenir génial des dernières heures de mon accouchement et de la poussée où je ne souffrais plus et où j’ai pu être aussi active que je le souhaitais.
Ce qui compte le plus avec la péri c’est qu’elle soit bien dosée et bien posée.
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Exactement, une péri bien dosée permet de vivre un accouchement vraiment sympa !
En tout cas, bravo aussi à toi d’avoir tenu sur la longueur, (bon tu me diras, on a pas trop le choix non plus hein !!!! Ah ces enfants !!!) ! C’est super en tout cas que tu gardes un bon souvenir de ton accouchement !
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