Parcours et métiers : ne pas avoir choisi ce que l’on fait

Parcours et métiers : ne pas avoir choisi ce que l’on fait

Je fais partie de ces personnes qui font un métier qu’elles n’ont pas choisi et vers lequel elles sont arrivées par défaut. Je voulais être archiviste, bibliothécaire ou professeur-documentaliste. Mais mon parcours en a décidé autrement.

Mon orientation : un échec

Lors de mes années lycée, j’avais une idée assez précise du métier que je voulais exercer : en rapport avec les livres ou le papier ! Simple non ? Malgré ça, mon orientation a été ratée. J’ai vu une conseillère d’orientation deux fois et cela a été inutile. En effet, lors de mon entretien avec la conseillère d’orientation en terminale, j’ai indiqué mon désir de travailler en bibliothèque. J’ai demandé si faire des études en fac d’histoire (ma passion) était possible, ou s’il fallait faire d’autres études plus spécifiques en adéquation avec le métier que je visais. Elle m’a répondu que des études d’histoire étaient une excellente option.

Crédits photo : James Wheeler

Je me suis donc inscrite en fac d’histoire et j’ai également étoffé mon parcours en suivant des modules d’archéologie et de documentation. Je ne le regrette pas : j’ai adoré ces années d’études, je me suis éclatée tant au niveau du travail que personnellement. Mais au moment de chercher du travail en bibliothèque, j’ai réalisé qu’il aurait nettement mieux valu faire un DUT Métiers du livre : toutes les réponses à mes recherches d’emploi allaient dans ce sens. Le plus décourageant est que j’étais trop diplômée pour les postes les plus modestes, et aucune bibliothèque ne voulait m’embaucher à cause de ça malgré mon expérience dans le domaine (j’ai travaillé comme emploi jeune plusieurs mois en centre de documentation). Il était désormais trop tard pour faire une nouvelle formation (financièrement c’était trop compliqué). Bien sûr, je pouvais tenter les concours de bibliothécaire qui m’étaient ouverts, mais sans la formation adéquate, ils me semblaient inatteignables.

Qu’importe, je décidais de tenter le concours de professeur-documentaliste qui me semblait le plus à ma portée. Je l’ai tenté cinq fois, et raté autant de fois. J’étais d’une timidité maladive qui me faisait perdre tous mes moyens face à un jury. Lors de la dernière tentative, déjà âgée de 27 ans, j’avoue que j’étais plutôt démoralisée. Heureusement, une amie m’a parlé d’un autre concours de l’Éducation Nationale qu’elle avait passé l’année précédente : celui d’Adjoint Administratif que j’ai tenté un peu en désespoir de cause… et réussi.

Mes débuts professionnels

J’ai eu une affectation pas vraiment passionnante avec des tâches relativement répétitives. Néanmoins, cette première expérience m’a mis le pied à l’étrier. Avec un concours d’Adjoint Administratif, il est possible de travailler dans divers établissements qui appartiennent à l’Éducation Nationale : en rectorat, en Direction Académique, à l’Université ou dans des écoles de l’enseignement supérieur, au CNED et en établissement scolaire bien sûr. C’est donc très varié, tout comme les fonctions que l’on peut être amené à exercer.

Après un an sur ce poste, j’ai décidé de passer le concours du grade directement supérieur : SAENES (Secrétaire Administratif de l’Éducation Nationale et de l’Enseignement Supérieur). L’ayant réussi, je suis ensuite arrivée sur le poste qui est encore le mien actuellement, dans un grand établissement scolaire accueillant des élèves du collège jusqu’au BTS, en formation générale et professionnelle. Lors de ma première année, j’ai travaillé à mi-temps en secrétariat auprès des élèves et en mi-temps en service d’intendance, en comptabilité. Je suis une littéraire, pas une matheuse : autant te dire que cette situation m’a fait grimacer. Je devais gérer la comptabilité de deux établissements. Sans rien y connaître du tout et sans formation préalable, sinon ce ne serait pas amusant. Heureusement que ma chef a pris les choses en main et m’a vraiment accompagnée. Néanmoins, j’ai assez souffert au cours de ces mois car la comptabilité pure et dure ne me correspondait pas.

J’espérais vraiment pouvoir à terme obtenir un temps plein en secrétariat. Mais ça, c’était avant.

Une révélation

L’année suivante, j’ai changé de poste au sein du même établissement. Je m’occupais désormais de la gestion, donc à temps complet en intendance. Cela a été une révélation. C’est encore ce que je fais aujourd’hui, et je peux t’assurer que je m’éclate.

ordinateur, télétravail
Crédits photo : George Milton

Alors, en quoi cela consiste ? Il s’agit de s’occuper d’énormément de choses au sein de l’établissement :

  • Je m’occupe des commandes : commandes pédagogiques pour les enseignants mais aussi pour tout ce qui permet à un établissement scolaire de vivre (réparations, denrées alimentaires pour la cantine, fournitures administratives…) Je gère les demandes de devis, les livraisons, le paiement des factures, les litiges qui y sont liés avec nos fournisseurs.
  • Je suis également en charge de tout ce qui concerne les sorties et les voyages scolaires : réservation des bus, des lieux visités. Dans le cadre de voyages, je suis chargée des appels d’offres si nous passons par un prestataire ainsi que du lien avec celui qui aura été choisi. Si nous organisons nous même le voyage, je réserve les hôtels, les restaurants, les vols… Bref, une vraie agence de voyage ! C’est la partie que je trouve la plus stressante dans mon travail car il ne faut pas se tromper !
  • Toujours du côté pédagogique, je m’occupe en partie des liens avec les personnes extérieures qui viennent effectuer des animations dans l’établissement (auteurs, troupes de théâtre…) J’ai également des contacts avec les collectivités (mairie, département, région) pour diverses conventions et des questions de gestion au quotidien.
  • Je suis chargée d’établir des factures : pour les dégradations que font les élèves, pour les personnes hébergées au sein de l’établissement, pour les associations qui occupent nos locaux…

Petit à petit, mes fonctions se sont étendues car ma chef s’est de plus en plus reposée sur moi. J’ai donc assuré le suivi de chantiers de travaux (lien avec les entreprises, l’architecte et la collectivité ayant commandité les travaux). J’ai également été amenée à gérer des réunions avec des agents d’entretien afin d’organiser les travaux qu’ils réalisent au quotidien.

Et aujourd’hui ?

Je ne regrette pas mon parcours. Aucun de mes cinq échecs au concours de professeur-documentaliste. Rétrospectivement, je me dis que c’était un signe. Je ne me vois plus faire ce métier, je ne sais pas si je m’y serais vraiment épanouie car en travaillant au sein d’un établissement scolaire, j’ai réalisé que je n’avais absolument pas le bon feeling avec les élèves. Je préfère ma position qui n’est pas liée à l’autorité, je suis beaucoup plus détendue avec eux. Ce que j’ai étudié pour devenir professeur-documentaliste m’a aidé pour passer les concours administratifs et m’a permis de les réussir au premier essai. Cela m’a également permis de mieux appréhender l’environnement éducatif, et mes connaissances en pédagogie me sont également utiles.

J’aime mon métier. J’adore gérer tant de choses différentes. Cela fait dix ans que j’exerce mes fonctions, et je n’en suis pas encore lassée. Il y a bien entendu des redites, mais comme tous les métiers je pense. J’aime le fait de ne pas vraiment savoir ce que la journée me réserve, même si parfois je me passerais bien de certains événements. Je peux rechercher la meilleure boulangerie pour réserver des pique-niques pour les élèves partant en voyage à Paris, et quelques heures plus tard aller prendre une photo de l’arbre qui s’est abattu sur notre clôture pour envoyer les photos à notre assurance… et entre temps aller débloquer le photocopieur qui a encore un bourrage (saleté de copieur !!!!)

Cela m’a donné énormément confiance en moi. Moi qui était timide et introvertie, j’ai pris de l’assurance. Au point d’envisager de voler de mes propres ailes et de devenir gestionnaire d’un petit établissement scolaire. Pas maintenant mais pourquoi pas d’ici quelques années… à moins que d’autres idées me viennent en tête, qui sait !

10 commentaires sur “Parcours et métiers : ne pas avoir choisi ce que l’on fait

  1. Eh ben, le « mauvais » conseil de la conseillère d’orientation est vraiment hallucinant je trouve… Heureusement que ça t’a plu, et que tu t’épanouis finalement dans ce que tu fais !
    Sinon c’est rigolo, moi aussi je suis arrivée à faire mon métier un peu par hasard (je savais pas trop quoi faire après le lycée et un ami de mes parents qui était bibliothécaire a dit que ça me conviendrait bien, je me suis dit « ah oui pourquoi pas » – les conseiller-e-s d’orientation ne m’ont jamais aidée non plus, au passage) et c’est justement un de ceux que tu voulais faire (archiviste) 😀

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  2. Je trouve aussi ça dingue ce conseil de la conseillère d’orientation!.. D’expérience (chez moi et d’autres connaissances) j’ai l’impression que les conseiller.es d’orientation essayent toujours de pousser les élèves qui le « peuvent » (au vu de leurs notes) à faire des études longues, même si ça n’amène pas au métier qu’ils aimeraient faire. Comme si décrocher un master était une garantie de réussite dans la vie. ça à beaucoup à voir avec la manière dont les diplomes (et leur « prestige ») sont vus par la société en France je trouve.. mais je m’égare.. Contente pour toi que tu ais su trouver ta voie en tout cas!

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    1. J’ai exactement le même ressenti que toi. J’ai voulu faire un bac littéraire, mais absolument tout le monde poussait que que j’aille en scientifique au vu de mes notes. Sauf que cela ne me plaisait pas et je n’ai aucun regret à m’être imposée. Je regrette tellement que les voies courtes et professionnelles aient une si mauvaise image !

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  3. Très intéressant ce parcours ! C’est assez surprenant pour la licence d’histoire car mon mari, qui a aussi suivi ce parcours, a plusieurs anciens camarades qui ont choisi une spécialisation en L3 pour passer les concours de la fonction publique pour justement devenir bibliothécaire.
    Ce n’est peut être pas la meilleure option mais elle permet tout de même d’y arriver.
    En tout cas tant mieux pour toi si tu as trouvé ta voie !

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      1. Alors ça fait peut-être beaucoup de questions…
        Comment se passe le recrutement une fois le concours obtenu? J’ai lu qu’une SAENES pouvait également être employée dans le privé? ou par un autre ministère? comment cela se passe-t-il? Tu as ensuite une « affectation » ou bien tu postules en fonction des offres?
        As-tu une hiérarchie importante ou es-tu plutôt autonome dans tes tâches?
        Quels sont tes horaires? peuvent-ils être flexibles?
        Tu as 8 semaines de congé c’est bien ça?
        Et éventuellement quel est ton salaire?
        Je ne sais pas s’il est possible de se contacter en privé?
        Merci!!

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        1. Je vais essayer de répondre au mieux.

          – une fois le concours obtenu, l’administration te propose une affectation. La manière dont c’est décidé dépend des régions : dans la mienne, on remplit une fiche de voeux en ciblant des départements, et l’affectation proposée est faite (si possible) en fonction de ça et de son classement.

          – Quand tu es en poste depuis quelques temps, tu peux décider de muter en participant au mouvement. Tu peux effectivement demander un détachement soit vers d’autres ministères ou d’autres fonctions publiques (territoriale ou hospitalière), soit vers le privé. Mais je pense que c’est compliqué les premières années (ton ministère n’est pas obligé d’accepter ton détachement).

          – concernant la hiérarchie/les horaires/l’autonomie, cela dépend du poste ! Comme je l’indique, ils sont vraiment très variés selon ce que l’on fait. Une SAENES gestionnaire va avoir une autonomie de dingue, mais des horaires qui vont avec (50h semaine environ) et travaillent tard le soir et le week-end. Certaines personnes travaillant en rectorat vont avoir des missions répétitives et une hiérarchie importante mais des horaires très réglés et une assez grande liberté pour poser leurs congés. Pour ma part, je fais 8h par jour et mes congés sont imposés car il est évident qu’en établissement scolaire on doit faire le maximum d’heures en présence des élèves. Je fais 1607h par an comme tous les SAENES, mais comme je travaille 40h semaine, j’ai plus que 8 semaines de congé. J’ai une certaine autonomie mais qui dépend de ma chef : ma précédente chef me laissait très libre, ma chef actuelle apprécie moyennement que je prenne des initiatives.

          – j’ai commencé à 1450€ mensuels environ, aujourd’hui (après donc 12 ans d’ancienneté dans mon grade et 14 dans mon ministère) 1750€. Il y a des primes qui peuvent se rajouter, mais c’est quand même extrêmement rare (c’est allé de 30€ à 300€ dans mon cas sur certaines fins d’année, mais ça se compte sur les doigts d’une main).

          Et si tu veux me contacter, tu peux passer par l’adresse mail du site (contact@bribesdevies.fr) je te répondrai avec plaisir.

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