Mes poils, mes cheveux blancs et moi

Mes poils, mes cheveux blancs et moi

Je suis une femme aux yeux marron-verts, les cheveux châtain foncé et la peau blanche. Je suis aussi très poilue, des poils bien noirs, nombreux, et partout.

J’aurais difficilement pu ne pas être poilue. Mes deux parents le sont, j’en ai donc logiquement hérité. J’avais lu un article il y a longtemps qui expliquait que c’était pas demain la veille que nous, femmes européennes faisant la chasse aux poils, ne serions plus poilues. L’article expliquait qu’à partir du moment où nous nous reproduisions avec des hommes poilus nous continuerions de transmettre ce gène à nos enfants. Et pendant longtemps (c’est peut-être encore le cas maintenant, mais je suis trop déconnectée de la presse people pour le dire) le stéréotype de la beauté masculine était un mec brun, musclé et poilu.

Je me souviens, vers mes 10 ans, être sur la plage et ma mère me disait être désolée pour tous mes poils. Elle attendait que je sois réglée pour me prendre mon premier RDV en institut pour une épilation. A 10 ans je ne m’en rendais pas compte et je n’étais pas du tout complexée, contrairement à ma mère apparemment. J’ai eu mes premières règles à 12 ans et demi, et à partir de ce moment là ma mère me payait dès qu’il le fallait une épilation des jambes en institut. Un peu après, je ne sais plus à quel âge, nous avons ajouté l’épilation de ce qui dépasse du maillot, les aisselles et les avant-bras. Je me suis vite habituée à la douleur de l’épilation, en revanche je n’ai pas oublié l’immense gêne que j’ai ressentie la fois où ma serviette hygiénique a débordé en pleine séance et que j’ai tâché la table d’épilation. Encore un peu plus tard ma soeur et moi avons eu un épilateur électrique et l’épilation se faisait donc à la maison. J’ai aussi eu une période où je décolorais mes poils du ventre avec de l’eau oxygénée. Enceinte de mon premier enfant, je me suis demandée comment allait se passer l’allaitement avec les poils que j’avais autour des tétons.

La dernière fois que je me suis épilée les avant-bras c’était pour mon mariage, en 2014. Rapidement après je suis tombée enceinte de notre premier enfant et mes priorités ont changé. Autant j’ai continué à épiler jambes, bords du maillot et aisselles, autant pour les bras j’ai commencé à m’en moquer. Et puis je n’avais plus le temps. J’ai donc petit à petit assumé mes avant-bras poilus et aujourd’hui je ne les remarque même plus. Peut-être que des gens les voient, ces longs et nombreux poils noirs quand je suis bras nus en été, mais moi je ne remarque même plus les regards.

C’est avec la grossesse gémellaire et la naissance des jumeaux que j’ai, par la force des choses, moins épilé le reste. Plus le temps, plus l’énergie, et plus l’utilité puisque je ne sortais plus du tout et n’avais plus le loisir d’aller me baigner, ni l’hiver ni l’été. J’ai maintenu une certaine épilation des jambes, notamment en été – même si j’ai accepté parfois qu’ils soient déjà longs et visibles et de rester en jupe ou en maillot de bain malgré tout. Par contre il m’arrive depuis deux ans de m’exposer avec des poils sous les aisselles. Je n’assume pas encore totalement le regard des autres, mais ça viendra certainement. Et puis, ma longue lutte contre mes poils s’est un peu transformée en lutte POUR l’acceptation de mes poils et est maintenant teintée de lutte féministe contre la société patriarcale qui impose aux femmes d’être glabres comme des enfants. Alors, je ne dis pas que viendra un jour où je ne m’épilerai plus jamais, car j’aime bien aussi avoir des jambes douces et lisses. Mais j’espère qu’un jour viendra où j’oserai aller à la piscine même si je ne suis pas épilée du tout. Et d’ailleurs, j’envisage sérieusement de m’acheter un bas de maillot de bain style boxer pour ne plus avoir à me soucier de l’épilation de cette partie-là !

En parlant de regard des autres et de patriarcat…

Je voudrais aussi te parler de mes cheveux.

Image par Annette Meyer de Pixabay

Avant, avant… il m’arrivait de me faire des mèches. C’est vrai que c’était joli, ça illuminait mes cheveux qui ont tendance à être assez ternes. Puis j’ai vachement espacé du moment où j’ai dû payer le coiffeur moi-même, parce que mine de rien c’est pas donné ce truc ! La dernière fois que j’ai teint mes cheveux c’était… pour mon mariage ! Et puis après, bébé, plus le temps, plus d’argent, plus la priorité… mais SURTOUT, la grosse différence par rapport aux poils c’est que là, j’aurais bien aimé me refaire une teinture. De temps en temps. Mais je me suis forcée à ne pas le faire. Pourquoi ? Voici mes arguments :

  • économique, évidemment, on en a déjà parlé
  • environnemental et santé : les produits pour teindre les cheveux sont quand même loin d’être clean pour la nature et pour notre corps. Même si maintenant il existe des produits moins dégueu mais bon
  • acceptation de mon corps qui vieillit : j’ai beaucoup de mal à accepter que je vieillis. À chaque anniversaire supplémentaire c’est une petite claque, le passage de la trentaine a été douloureux, et celui des 35 ans n’était pas mieux. Sans parler de tous les dégâts laissés sur mon corps à la fois par le temps et par les trois grossesses. Et ma grande peur, si je me teins les cheveux maintenant, c’est de découvrir dans quelques années à quel point mes cheveux ont blanchi. Le choc, de se voir blanche d’un coup ! Alors que là, en les laissant au naturel, le blanchiment se fait progressivement et ça me permet d’accepter ces cheveux blancs (même si je n’accepte pas pour autant de vieillir hein !)
  • et enfin, c’est aussi une lutte féministe. J’ai écouté récemment un podcast qui parlait de l’image des femmes dans le monde patriarcal. Que des femmes de plus de 30 ans n’aient aucun cheveux blancs visibles est le fruit de l’image que renvoie une femme aux cheveux blancs : c’est une femme vieille, périmée, qui ne sert plus à rien, ou en tout cas qui n’est définitivement plus dans le bal de la séduction. Dans nos têtes, les femmes aux cheveux blancs sont les femmes de plus de 70 ans. Alors que la nature nous dote pour la plupart d’entre nous de cheveux blancs bien avant ! Donc c’est pour moi une manière de dire f*** à ce que les autres voudraient penser de moi, si certains étaient tentés de me juger uniquement sur la couleur de mes cheveux…
  • … ce qui m’amène quand même à un dernier point : une revendication politique. Pas dans le sens « appartenance à un parti politique » mais plutôt dans le sens « porter des valeurs de société ». J’ai remarqué que souvent, les femmes écolos, qui mangent bio, voire végan, qui se déplacent à vélo, engagées dans des actions de protection de la nature et/ou de lutte contre le changement climatique, féministes, portent leurs cheveux blancs au naturel. Ce qui ne les empêchent pas d’être jolies et féminines. Je me suis faite cette réflexion il n’y a pas longtemps car en peu de temps, trois personnes que je ne connaissais pas très bien, sont venues me parler en supposant de base que j’étais « écolo » (l’une que j’achetais des vêtements d’occasion – j’ai d’ailleurs cru au début qu’elle voyait mes enfants comme des mal habillés ! ; une autre que j’avais un mode de vie sobre et enfin que je me déplaçais à vélo alors qu’elle ne m’avait jamais vue à vélo). Et un jour ça a fait tilt : peut-être que je passe pour une écolo parce que visuellement je ressemble à ces femmes écolos dont les cheveux sont blancs !

Ce qui est assez drôle, concernant le fait d’assumer mon apparence et de me moquer totalement du regard des autres, c’est que même au plus bas de ce que j’ai pu être en 2021 pendant ma « dépression » post-partum, j’étais très affectée par ce que les autres pouvaient penser de ma famille, je n’assumais pas mes quatre enfants, mes jumeaux. Mais à aucun moment je ne me suis posée la question de l’image que MOI je renvoyais à l’époque. Alors que j’étais devenue une vraie loque, tant psychologique, morale que physique.

En tout cas, ce qui serait vraiment super, c’est que les femmes puissent s’épiler ou se colorer les cheveux uniquement pour leur plaisir à elles, et non pas pour paraître belles et soignées au yeux des autres.

Qu’en penses-tu ? Et arrives-tu à lâcher prise sur ces sujets ? Dis-moi tout !

6 commentaires sur “Mes poils, mes cheveux blancs et moi

  1. Brune aussi et bien poilue mais j’ai été élevée différemment. Ma mère a attendu qu’on lui en parle pour nous suggéré l’épilation. Et ce ne fut jamais en institut mais à la maison les demi-jambes et les aisselles.

    Vers 28 ans, j’en ai eu marre et j’ai cessé de m’épiler. Je ne le fais plus qu’en été si mes poils me gênent. (Dans les aisselles ca retient désagréablement la transpi je trouve.) Mais contrairement à toi, ca me paraît plus simple et plus accepté socialement de ne pas avoir les jambes épilées plutôt que les aisselles

    Depuis mes 25 ans j’ai des cheveux blancs. Et j’avoue que j’ai trouvé ca beaucoup trop tôt mais j’ai rien fait car je suis paresseuse et l’idée de payer tous les mois une blinde… Non c’est pas pour moi. (Je me suis quand même fait une couleur pour mon mariage.)

    Par contre, ce que je vis assez mal c’est depuis ma grossesse, la petite moustache et les poils ds barbes qui poussent de façon désordonnés. Je trouve ca moche et désagréable au toucher. Mais je ne trouve pas la bonne solution pour m’en débarrasser.

    Je n’avais pas vraiment fait le lien entre écolos et cheveux blancs. Pour le coup pour moi, ca n’est pas totalement vrai non plus.

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  2. Merci pour cet article !

    Me concernant, ma mère ne m’a jamais parlé épilation. Elle ne s’épile que les jambes et à la pince à épiler. Mais adolescente impossible pour moi d’assumer mes poils (jambe comme aisselles) alors avec mon argent de poche j’ai acheté un rasoir… Grave erreur !

    Aujourd’hui je n’assume toujours pas les poils donc je les épile l’été pour pouvoir porter débardeur, jupe, maillot de bain. J’ai croisé quelques femmes non épilées, j’ai trouvé ça moche (merci la société qui me fait penser ça) alors qu’en fait elles ont tellement raison. Un jour peut être j’y arriverai !

    Côté cheveux, j’ai toujours connu ma mère avec des cheveux blancs. Les premiers sont arrivés à 16 ans… J’ai croisé beaucoup plus de femmes avec des cheveux blancs que « poilues », certaines absolument magnifiques. Si je n’avais de toute façon pas le budget et désormais pas le temps pour aller chez le coiffeur pour des colorations, j’assume beaucoup plus facilement du fait de connaitre plus de personnes même « jeune » avec des cheveux blancs. Et c’est peut être mon côté bobo écolo qui ressort 😉

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  3. Côté poils franchement c’est tellement difficile pour nous les femmes de prendre sur nous pour déconstruire tout ce dont la société nous a bourré le crâne depuis notre naissence : ne soyons pas trop dures avec nous mêmes 🙂 ! Personnellement je ne trouve ça pas moche du tout sur les autres (notamment les aisselles je trouve ça plutot esthétique), moi-même je suis surtout en mode « flemme » et je travaille un peu à déconstruire la « honte », je suis par exemple capable d’aller au boulot dans un état de pilosité médium/avancée, mais il y a toujours un moment ou un autre ou je repasse au rasage, que je ne peux pas m’empecher de trouver plus joli sur moi-même (à cause du bourrage de crane précédemment évoqué). Je trouve toutefois important que mes enfants voient mes jambes et aisselles dans divers « états » de pilosité, qu’ils n’imaginent pas que les femmes c’est normal que ce soit glable – et honteux que ce ne le soit pas. Pour les cheveux blancs mes premiers sont arrivés à 23 ans (ce sont donc bien des cheveux blancs de jeunesse franchement!^^), pour moi il était clair que je n’allais pas me lancer à cet âge dans un cycle infernal de teintures pour ‘cacher » quelque chose à tout prix pendant plusieurs décennies. J’avais aussi l’impression que me teindre m’aurait créé une nouvelle honte mal placée (mince mes racines sont visibles!) que je n’avais pas envie de m’infliger. Et clairement du coup j’espère faire partie d’un mouvement de plus en plus grand qui montre enfin que les cheveux blancs arrivent doucement au fil de la vie et ne sont donc pas un signe de « vieillesse +70ans/grand-mère ». Je ne les trouve pas « beaux » mais je les accèpte, j’adhère pour ça pas mal au concept du « body neutrality » (vs. body positivity).

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  4. Très intéressant ces concepts du « body neutrality » et du « body positivity ». Ça a éveillé ma curiosité 😉 et je suis allée creuser…

    De mon côté, je trouve difficile de se détacher de ce que la société nous a appris. Mais perso, j’ai tendance à enlever mes poils quand je trouvent que j’en ai trop et que j’arrive à trouver le temps. Sinon je les laisse 😁.

    Niveau cheveux blancs, j’en ai très peu et ils ne se voient pas bien au milieu de mes cheveux clairs. Mais, comme on dit dans ma famille, « tête de fou, ne blanchit pas! »

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  5. Merci pour ton témoignage. Je suis très brune, les cheveux noirs, la peau très claire mais j’ai la chance d’avoir une faible pilosité mis à part mes sourcils.

    J’ai commencé à m’épiler vers 14 / 15 ans je pense à la maison (crème dépilatoire, rasoirs puis épilateur éléctrique). Puis je me suis mise à la cire et l’épilation en institut vers 19/20 ans). C’était un rituel qui me convenait bien, j’avais l’impression d’avoir ce temps pour moi et je trouvais le résultat plus net. J’ai continué d’y aller jusqu’à la fin de ma première grossesse puis les séances se sont espacées. Je m’épilais à la maison et pour les occasions j’allais en institut.

    Aujourd’hui avec 4 enfants, je ne prends plus le temps d’y aller. J’aimerais bien surtout pour les sourcils mais pas vraiment le temps. Je m’épile à la maison lorsque j’en ressens le besoin. Je me sens mieux sans, plus confiante en moi et plus féminine. Je pense que je m’épile minimum 1 fois par mois( plus souvent pour les aisselles). Je trouve aussi contraignant de devoir prendre un temps de préparation assez important avant d’aller à la piscine. J’aimerais, comme les garçons pouvoir me changer et hop aller nager sans me soucier de ce détail qui finalement n’a pas tant d’importance.

    Concernant les cheveux blancs, je commence à en avoir de plus en plus. Etant très brune, je n’ai jamais fait de coloration avant 32 ans, je ne voulais pas les décolorer ou faire de mèches, j’aimais beaucoup mes cheveux noirs. Maintenant, je fais des colorations végétales moi-même, je trouve le prix très élevé en salon. Mais je trouve qu’il faut en faire assez souvent pour garder mes cheveux bruns. Lorsque j’attends trop mes cheveux blancs deviennent roux entre deux colorations. C’est un peu de préparation, il faut ensuite nettoyer la salle de bain mais cela me prends moins de temps que si je devais rester 2 h au salon de coiffure car on peut faire autre chose pendant le temps de pose. Cela apporte aussi un soin aux cheveux et ils sont plus beaux et volumineux.

    Je crois que j’ai du mal à prendre de l’âge et accepter de laisser mes cheveux blancs. Ma mère qui a la soixantaine, les laisse au naturel elle a un beau gris et c’est très joli.

    Je trouve important de normaliser tout cela, et de laisser libre chacune de faire selon son choix, son besoin et non par soucis de la société et de l’acceptation des autres. Ce n’est pas facile je trouve, donc bravo à celles qui ose et qui s’affranchisse de cela.

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  6. C’est vrai que c’est encore difficile de s’enlever de la tête que poils = moche, alors qu’en effet, c’est complètement absurde au fond !

    De mon côté, j’ai plutôt la vie facile sur ce point, parce que même si j’ai les cheveux noirs, ils sont très fins et mes poils ne se voient presque pas. Du coup, depuis l’adolescence je n’épile que les jambes et les aisselles (enfin, je rase en fait, parce que j’ai jamais pu m’habituer à la douleur de l’arrachage des poils), et je le fais de moins en moins parce que la repousse qui gratte sur les jambes m’agace x)

    Bon, en étant peu poilue c’est plus facile, j’ai aussi la chance d’avoir un mari qui se fiche éperdument que j’ai des poils ou pas (lui en a peu, d’ailleurs, on travaille à la réduction pilaire de l’espèce humaine ;)), et je suis pas très sensible au regard des autres, d’autant moins qu’il est rare que je montre mes jambes ou mes aisselles en fait. Et si je le fais, c’est à la piscine, où je suis tellement occupée à courir après ma fille que je ne remarquerais même pas si tout le monde me montrait du doigt (ce qui n’arrive probablement pas, puisque les autres sont tout aussi occupés à courir après les leurs haha). Le fait de voir d’autres femmes oser sortir sans s’épiler a sûrement pas mal aidé aussi, pas sûre que j’oserais le faire si c’était vraiment hyper rare comme il y a encore dix ans…

    Et par contre, j’adore les cheveux blancs ! Je commence à avoir une toute petite mèche blanche, qui est malheureusement à un endroit où mes autres cheveux la recouvrent, et j’hésite depuis des années à aller chez un coiffeur pour lui demander de la renforcer, mais je ne vais jamais chez le coiffeur, pour des raisons qui recoupent partiellement les tiennes : c’est super cher déjà, je n’ai pas le temps pour ça, j’aime pas qu’on me touche la tête, et surtout, j’aime avoir les cheveux très longs, ce qui, au vu de leur fragilité, nécessite de les traiter avec beaucoup de soins, donc je peux pas me permettre de leur jeter des produits chimiques à la figure. Du coup les décolorer à blanc, ouille… Et il faut tout le temps recommencer, ce qui ne me fait vraiment pas envie.

    Après, je n’ai jamais eu les « bons » cheveux (frisés, secs, bref, pas la chevelure de Raiponce, clairement), donc je pense que j’ai depuis longtemps fait mon deuil du regard de la société sur mes cheveux, c’est peut-être aussi plus facile pour moi de pas me soucier de mes cheveux blancs dans ces conditions…

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