Mes seins, les tire-laits, et la Poupette

Mes seins, les tire-laits, et la Poupette

Cet article est publié dans le cadre de la semaine mondiale de l’allaitement, qui a lieu du 13 au 19 octobre 2025 en France vu qu’on ne peut rien faire comme le reste du monde qui fait ça début août.

Aujourd’hui, j’ai décidé de te raconter mes allaitements. Enfin, ceux de mes deux premiers enfants, le troisième n’étant pas encore livré à l’heure où j’écris (et il est prié de ne pas se décider à arriver d’ici à la publication de l’article, c’est encore un poil trop tôt). Et comme j’aime le suspens, aujourd’hui je te raconte l’allaitement de la Poupette, et la semaine prochaine celui de Nino !

Photo de Wendy Wei sur Pexels.com

Quand j’étais enceinte de la Poupette, jeune future maman de son premier enfant, j’ai tout entendu sur l’allaitement : c’est magique, c’est mieux que le biberon, ça fait mal, c’est une aliénation, tu es femme pas vache (oui oui), c’est naturel, c’est le lien maternel ultime, tu vas en ch*er, la lactation c’est difficile à mettre en place et maintenir, ton bébé aura faim, tu n’auras peut-être pas assez de lait, tu dormiras pas de la nuit, c’est le meilleur sentiment du monde, etc.

Moi, je voulais tenter. Mon idée c’était : on essaie, et on verra bien. Ma maman m’a allaitée (ainsi que mon frère et ma sœur), la légende familiale veut qu’au bout de 3 mois de tétées toutes les 2h on a fini par me donner un énorme biberon que j’ai englouti et de ce jour j’ai fait mes nuits et j’ai été sevrée. Bon.

Et puis la Poupette est née. Pas tout à fait comme prévu. Pas tout à fait au moment prévu. Je suis sortie de la salle de réveil, on m’a emmenée en néonat voir mon tout petit bébé. On me l’a mise en peau à peau. C’était incroyable. Et puis je sais plus si c’est moi ou l’infirmier qui a demandé, mais je me suis retrouvée avec un tire-lait. 10 minutes toutes les 3h madame, mettez pas trop fort, les téterelles sont là y’a trois tailles. Apportez tout ce qui vient même si c’est quelques gouttes.

Moi, j’aime les procédures. Je suis pas ingénieure pour rien. Celle là était plutôt simple à suivre alors je l’ai fait. On m’avait prévenue qu’entre la prématurité et la césarienne, la montée de lait qui se fait habituellement entre J2 et J3 pouvait arriver plus tard. De fait, elle arrivera à J4.

Et donc me voilà, mon bébé branché de partout, avec une sonde dans son tout petit nez (et même une voie centrale les premiers jours). Et moi, toutes les 3h, je tire mon lait. Même la nuit. 10 minutes à gauche, 10 minutes à droite.

Les premiers jours, en effet, je tire quelques gouttes. La poupette, elle, bénéficie d’un don de lait maternel. Elle entre dans les critères, faisant moins d’1.5kg.

Dès le 3ème jour, j’ai assez pour lui donner. Au bout d’une semaine, je tire 1L par jour. Je ne me rend absolument pas compte, on me dit que c’est très bien, vraiment super madame. La Poupette boit … 20mL par repas. 8 repas par jour. Au max elle sera à 320mL par jour, la semaine de la sortie.

En parallèle, la Poupette est mise au sein quand je suis là. Ça aussi c’est une procédure. Peser la Poupette, s’installer, moi sur le fauteuil, le coussin d’allaitement sur mes genoux, la poupette allongée dessus, face à moi, mettre le bout de sein sur mon téton, aligner bouche-téton, mettre le téton dans sa bouche, et zou, elle tête. Et puis retourner la peser après pour calculer de combien la sonde doit compléter.

Les premières semaines, elle ne tourne pas la tête pour se mettre face au téton. C’est moi qui l’aligne. Mon téton est trop gros pour rentrer dans sa minuscule bouche, aussi. Donc : bout de sein. Par contre, elle sait téter, très vite elle arrive à prendre un peu de lait. Mais elle se fatigue très vite et n’arrive pas a manger autant qu’elle devrait.

À ma sortie de la maternité, je récupère un tire-lait de location et je continue, 10 minutes toutes les 3h. Je me mets à faire les tirages en simultané, les deux seins à la fois. Et je sais pas si c’est le rythme régulier du tire-lait, les hormones, ou que sais-je, mais pendant ces 10 minutes : je plane. Complet. C’est de la bonne.

À un moment donné, on nous propose de lui donner des biberons de lait tiré, pour qu’elle se fatigue moins et dans l’espoir d’un retour à la maison plus rapide (l’enjeu, c’était qu’elle se nourisse seule, sans sonde). La maternité ne donne pas de biberons aux bébés allaités sans l’accord des parents, le premier biberon doit être donné par Papa (ou un parent). Je regarde donc Mr Sans Chaussettes prendre un petit cours de biberon. Ca restera un moment fort de cette hospitalisation. La Poupette boit. Pas tout, mais elle boit.

Un des petits biberons de la neonat

Et quelque jours plus tard, on sort de la maternité. À trois cette fois. Et si l’allaitement est maintenant à la demande (VS toutes les 3h comme en néonat) on continue le rythme alterné biberon / sein. Quand la Poupette arrive vers 3 mois, on est au sein à 100%. On a aussi lâché les bouts de sein quelque part en route. Petit à petit, elle apprend à tourner la tête, à choper le sein, elle s’autonomise. Moi, je l’allaite partout, tout le temps. J’ai pas peur du regard des autres, de toute façon elle est si petite que personne n’ose rien nous dire. Cette naissance inattendue m’aura au moins décomplexée.

Et moi, je continue de tirer mon lait. À mon tour de le donner au lactarium, qui nous a bien aidé aux premiers jours de vie de la Poupette.

Quand la Poupette a 3 ou 4 mois, je remarque qu’elle se cabre après les tétées. Elle hurle, souvent à la tétée du matin. C’est très angoissant pour moi, chaque refus me renvoie à l’hôpital et au besoin de prendre du poids. Heureusement, on est très bien suivi par notre pédiatre. Verdict : fort reflux, œsophagite, due notamment à une Allergie aux Protéines de Lait de Vache (et de toutes les autres bestioles à priori). Je passe donc au régime sans produits laitiers. Plutôt facile, c’est l’été et je suis à la maison.

Et puis vient le moment de revenir au travail, en présentiel cette fois. Et les débuts de la crèche. La Poupette va sur ses 6 mois.

Je ne voulais plus tirer mon lait. Trop de souvenirs de l’hôpital. Et puis … la Poupette n’est absolument pas sevrée, et moi j’ai absolument pas envie d’arrêter l’allaitement qui devient enfin un rituel plus naturel et moins procédural. C’est là que je découvre le tire-lait manuel. C’est la solution parfaite : ce n’est plus un tire-lait « d’hôpital » et mes seins répondent nickel, je tire facilement la dose nécessaire en 3 ou 4 fois au bureau, où on me donne une « salle d’allaitement » (que je partage d’ailleurs avec ma cheffe !).
Je tiendrais un mois à ce rythme avant de décider de passer en allaitement mixte : lait maternisé de jour, et sein matin/soir/nuit. Il me faudra 6 semaines pour arriver à ne plus tirer en journée. 6 semaines à décaler chaque tirage au maximum, mais bien souvent 10′ après l’heure j’ai déjà les seins énormes et qui tirent. Mais peu à peu, la production s’adapte au nouveau rythme, et même si le lundi matin j’ai les seins lourds après un week-end de tétées, ça se passe.

Et puis je reprends les déplacements. 48h au début, jusqu’à 6 jours juste avant ses 1 an. La Poupette s’en fout, je reviens, elle reprend le sein direct à mon retour. Le lait est là aussi, même si je ne tire plus systématiquement, juste quand j’ai mal.

Et puis c’est à ses 1 an, je commençais à fatiguer, et un jour d’elle même elle a arrêté de prendre le sein. Le sevrage s’est fait d’un commun accord, c’était parfait.

Je n’ai jamais eu mal pour cet allaitement. Sauf pendant les quelques nuits complètes de la Poupette à ses 4 mois (rassure toi, y’en a pas eu beaucoup et surtout ça n’a pas duré !). J’ai eu du lait en quantité, un mélange de chance et de confiance aveugle en la procédure, je pense. N’empêche que c’était une chouette expérience. Pas exactement un moment calin ni serein, avec l’histoire de la Poupette chaque repas a été source de stress pour moi pendant très longtemps (et, honnêtement, encore parfois aujourd’hui), mais une chouette expérience.

Longtemps après, j’ai lu un témoignage de maman de prématuré qui disait en substance « j’ai allaité, parce que c’est la seule chose que je pouvais vraiment faire, concrètement ». Et je me suis un peu reconnue là-dedans, quand mon bébé était toute branchée de partout, qu’elle était minuscule parce que mon corps avait cessé de la nourrir bien trop tôt, ben je pouvais faire une seule chose : du lait.

2 commentaires sur “Mes seins, les tire-laits, et la Poupette

  1. Trop beau et bien décrit cette aventure de l’allaitement! Impressionnée aussi par ton optimisme et ta persévérance! Et du coup tu a jamais eu mal? C’est marrant car moi aussi maman de prématuré, je n’ai pas du tout eu eu ce même instinct. Mon micro bébé câblé, je rêvais qu’on me le gave au lait artificiel ultra protéiné! Je dois aussi dire que dans la suite de l’accouchement d’urgence et de la césarienne, mon corps avait envie de dire : arrêtez de me faire mal. Quand l’infirmière m’a amené le tire lait (comme toi, sans demander), j’ai eu l’impression qu’on m’imposait encore une épreuve, et en plus moi ça me faisait uuuuultra mal (pourtant un tire lait de compet il parait). Je l’ai fait deux fois et la troisième, j’ai pleuré : mon corps disait stop et j’ai menacé l’équipe de ne jamais essayer l’allaiter mon bébé si on me forçait à tirer mon lait (scène boosté aux hormones de post partum qui a du être très cocasse). Contre toute attente ils ont dit okay. On a fait dal+sonde pendant les 15 jours de l’hospitalisation, ma montée de lait est arrivée jour 4, on a fait allaitement mixte au début à la maison, et a un mois de vie on était en allaitement exclusif!

    Aimé par 1 personne

    1. Je crois que je ne me suis surtout jamais posé de questions sur l’allaitement. Ce qui est fou, parce que je me suis tellement fait de cheveux blancs sur tout le reste. Mais non, jamais de douleurs. Je crois que j’ai de la chance.

      Je comprends aussi ce besoin de dire stop. Je pense d’ailleurs que c’est une grande force que d’en être capable. Et qu’au final, on fait tous au mieux avec ce que la vie nous donne !

      J’aime

Laisser un commentaire