la meilleure version de vous-même
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Juliette scrollait sur son téléphone sans grande conviction. Après une journée de boulot harassante, une troisième mi-temps pas simple avec les enfants, elle savourait enfin quelques minutes de calme sur son canapé. Mais comment font-elles, ces filles sur les réseaux sociaux qui semblent tout gérer : un mec de rêve, des enfants trop mignons et un boulot de dingue, en gardant leur maison rangée comme un appartement témoin ? Elle s’épuise et se perd dans son quotidien minuté et a l’impression à la fois de ne pas s’arrêter et de n’arriver à rien.
Peut-être ces formations pourraient-elles l’aider ? Voyons… Développer son assertivité et son ancrage, Accueillir ses émotions, Communication non violente, Du temps pour moi rien que pour moi, Être une équipe gagnante en couple et en famille… Alignés sur la page web, elle voyait tout ce qui lui manquait à la maison, tous ses défauts, listés les uns après les autres.
Elle cliqua sur le lien d’inscription, après tout, qu’avait-elle à y perdre ? Et puis vu les gains potentiels sur l’image qu’elle avait d’elle-même et sur son bien-être, cela valait bien le coût annoncé.
Les conférences s’enchainaient, un soir par semaine ou par quinzaine. Les conférenciers étaient de vrais coachs, et les participantes leur équipe de sport. Tous les conseils étaient bons à prendre et dessinaient une Juliette nouvelle que Juliette elle-même n’aurait jamais imaginé pouvoir devenir. C’était grisant ! En parallèle, la conversation whatsapp associée ne s’arrêtait pas : bons plans, photos des réalisations de la semaine, partages d’expérience… Chacune y allait de son grain de sel. Juliette se prenait au jeu : c’était valorisant de se voir encouragée et reconnue pour les moyens qu’on mettait en œuvre chez soi après les conférences.

Le quotidien de Juliette changeait peu à peu, elle se sentait reprendre le pouvoir sur elle-même, comme si elle s’était oubliée pendant des années et qu’elle devenait enfin le héros de sa propre histoire. Elle apprenait à s’affirmer au travail et à la maison. C’en était fini de la Juliette insipide et timide qu’elle était avant, elle n’accepterait plus jamais de se faire rouler dessus par les autres. Elle avait aussi refait sa garde robe grâce à un service facturé en plus de coach en image. Ce n’était pas si cher et permettait à son bien-être intérieur de s’exprimer à l’extérieur. Et ça c’était important.
Marc, lui, regardait tous ces changements d’un œil circonspect. Juliette allait mieux, certes. Elle semblait plus sûre d’elle, plus forte, et il s’en réjouissait. Mais ce nouvel équilibre semblait fragile, et ne laissait pas de place à la discussion. Oh oui, c’était important de se sentir bien et de prendre soin de soi et de sa santé mentale, là n’était pas la question. Mais ces coachs et ce groupe d’entraide, étaient-ils vraiment si bienveillants qu’ils le disaient ? Pour vendre des conférences ou des livres supplémentaires, pas de souci, mais pour prendre en compte les contingences matérielles des unes et des autres, le fait que leur quotidien ne puisse pas être l’exact calque de la théorie exposée en conférence, là il y avait déjà beaucoup moins de monde.
Juliette ne comprenait pas que Marc et les enfants ne la comprennent pas. Elle travaillait sur elle, elle faisait des efforts pour devenir la meilleure version d’elle-même, elle se sentait enfin devenir quelqu’un, mais eux ne semblaient pas le voir ainsi. En temps normal, Juliette se serait dit que ce n’était pas grave, elle aurait laissé sur le bord du chemin les relations qui ne lui faisaient pas de bien, mais quand même, son mari, ses enfants, c’était plutôt compliqué.
Au travail aussi d’ailleurs, passées les premières semaines où ses collègues l’avaient félicitée pour les changements entrepris (c’était un peu comme Activia ça, ça fait du bien à l’intérieur et ça se voit à l’extérieur), Juliette sentait des changements d’attitude chez ses collègues qui finissaient par l’agacer. Elle faisait de son mieux pour conserver une attitude intérieure positive, mais le manque de coopération des uns et des autres entamait sa motivation.
Comment voulez-vous devenir et rester la meilleure version de vous-même quand l’univers s’attache à anéantir vos efforts ? Et ces imperfections contre lesquelles elle luttait et qui restaient là quand même… La meilleure version de Juliette lui semblait finalement n’être qu’une chimère. Les autres femmes sur la conversation whatsapp ne faisaient plus que la faire complexer et culpabiliser quand elle lisait leurs réalisations et les mettait en face des points sur lesquels elle butait. Mais en même temps, avouer aux autres qu’elle luttait, ç’aurait été reconnaître un nouvel échec, et c’était trop pour Juliette.
Il fallut un soir, le soir de trop, le message de trop, pour que Juliette puisse entendre ce que Marc avait à lui dire. Que ce n’était pas une volonté de l’empêcher d’avancer, mais que cette « meilleure version d’elle-même » qui lui faisait considérer les autres comme des obstacles sur son chemin de développement personnel était en train de la changer en une version d’elle-même parfois un peu trop auto-centrée et moins ouverte aux autres. Que s’il était important qu’elle prenne soin d’elle-même – d’ailleurs il lui proposait de faire le point sur ce dont elle avait besoin pour lui ménager une soirée par semaine rien que pour elle et mieux répartir les taches dans la maison pour faire sa part et la soulager – des conférences délivrant des conseils standardisés sans se poser la question de leur applicabilité au quotidien des personnes inscrites n’étaient pas forcément le meilleur moyen de le faire. Et que peut-être que la meilleure version d’elle-même c’était tout simplement elle-même, prenant soin d’elle et évoluant au mieux dans son environnement.

C’est un texte très parlant, qui doit faire écho à beaucoup d’entre nous !
Tout d’abord par l’envie qui naît fréquemment de certains comptes qui nous semblent parfaits, idylliques et tellement plus « facile » que notre quotidien.
Mais aussi face à toutes ces propositions de coaching en publicité, selon nos centres d’intérêt (mieux dessiner, enfin publier son premier roman, alimentation équilibrée, exceller en running, avoir une maison à la Marie Kondo, être le parent parfait pour ses enfant…)
Je pense aussi que la meilleure version de nous-même peut se révéler quand on se sent bien (pouvoir prendre soin de soi, ce qui est parfois un luxe selon les agendas), se sentir entourée/aimée/reconnue à certains degrés.
Mais garder en tête que la meilleure version de nous-même contient aussi des défaillances, c’est essentiel. ❤
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Je suis assez d’accord : il est important de prendre soin de soi, de savoir se dégager du temps pour soi malgré nos emplois du temps de ministres, mais je trouve bien des dérives aux millions de formations miracles de développement personnel qui sont souvent très standardisées et laissent l’impression amère que si on n’y arrive pas c’est qu’on n’a pas assez essayé ou que c’est la faute des autres. Je trouve ça à la fois très culpabilisant et auto-centré comme façon de voir les choses.
Il m semble comme toi, important d’accepter que la meilleure version de nous-même ne sera jamais parfaite, et que si nous pouvons travailler sur nos défaillances, il faut aussi accepter leur existence plutôt que de vouloir les gommer à tout prix (ce qui me semble impossible et plutôt dangereux au final)
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Je fais partie des ces personnes qui pensent que nous sommes par nature notre meilleure version de nous mêmes. Mais trop souvent c’est notre environnement (proches, travail, lieu d’habitation…) qui ne nous permet pas de libérer tout notre potentiel.
Il est à mon avis contre productif de vouloir changer notre image, le naturel ne se change pas.
Mais il faut parfois savoir s’éloigner des personnes toxiques ou des milieux qui ne nous correspondent pas pour s’épanouir pleinement.
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Je suis d’accord avec le fait que l’épanouissement passe par l’éloignement des personnes et milieux toxiques. En revanche, j’ai vraiment du mal avec l’expression « meilleure version de soi-même ». Si nous étions déjà nous mêmes, sans chercher à être une version améliorée, nous serions déjà bien, je pense.
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