Quand le métier passion épuise…

Quand le métier passion épuise…

J’ai eu la chance d’exercer pendant un peu plus de 20 ans un métier passion mais la passion ce n’est pas vraiment bon sur le long terme….

Je vais revenir sur ces 20 années et comment peu à peu je me suis épuisée jusqu’à ne plus pouvoir aller travailler et devoir me reconvertir…..

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J’ai commencé à enseigner la musique à 15 ans. Oui je sais j’étais très jeune.

Laisse moi te redonner le contexte :

  • Mes parents et mon grand-père sont professeurs de musique dans une association qui a à peine 6 ans d’existence.
  • A cette époque là les cours dispensés par cette association sont également faits par des musiciens de l’association avec juste un défraiement
  • Les horaires de mes parents ne  correspondent pas pour une élève au piano.

Voilà comment je me retrouve avec ma première élève au piano à 15 ans épaulée par ma maman bien évidemment. L’année d’après je me retrouve professeur de flûte traversière épaulée par mon grand-père. Et l’année d’après mon grand-père décède brutalement quelques jours avant la rentrée de l’école de musique et je me retrouve avec l’ensemble de la classe de flûte… Nous sommes en 2002 et j’ai 17 ans.

Je n’ai quitté l’association en tant qu’enseignante qu’en 2022. Mon lien avec cette association est indescriptible. Peut être qu’un jour je le raconterai dans un article.

J’ai donc dès le lycée commencé à travailler de manière régulière. Et je te le dis j’adore transmettre ma passion (tu vois je parle encore au présent).

J’ai peu à peu élargi mes compétences : en plus de professeur de piano et de flûte je suis devenue professeur de formation musicale (solfège est devenu un « gros mot » au fil des années), professeur de tuba, chef d’orchestre… La véritable couteau suisse !

J’ai cumulé plusieurs écoles de musique en plus de mes études et/ou d’un deuxième travail alimentaire (surveillant par exemple).

Le problème d’être professeur de musique dans des écoles de musiques c’est qu’il faut cumuler les emplois pour pouvoir vivre. Il n’y a eu que 2 années scolaires où j’ai pu seulement vivre de ce métier.

Et puis chaque été, c’est la même question : vais je avoir assez d’heures pour vivre cette année ?

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La bascule vient en 2014 quand je deviens maman.

Dans un premier temps j’arrête mon poste de surveillante en lycée avec internat. Il n’est pas question de laisser mon bébé la nuit.

J’arrête ensuite d’être chef d’orchestre d’une harmonie d’adultes.

Je cumule pendant 2 ans chômage et emploi dans mon association de départ tout en postulant à droite à gauche. Je vis à ce moment là une sorte de lune de miel mais cela ne va pas durer.

Mon mari travaille en poste donc ou de matin ou de soir jusqu’à 22h…  tu le vois venir le problème ? Tant que le petit n’est pas à l’école il n’y en a pas, mais un professeur de musique travaille quand les enfants n’ont pas école…. donc une fois rentré à l’école il va se poser la question des horaires pour ne pas le coucher trop tard.

Au moment de sa rentrée à l’école une opportunité s’offre à moi : devenir contractuelle à l’éducation nationale. J’y vais sans grande conviction et finalement j’adore ! Nous sommes en 2017 !

Mais même si j’adore cela annonce le début de la fin de mon métier passion.

Préparer les cours de l’école de musique et du collège, déplacer les cours de l’école de musique pour participer aux conseils de classe, une association qui en parallèle se professionnalise avec les exigences qui se renforcent… Côté personnel, un deuxième enfant, le lancement de l’autoconstruction d’une maison, des problèmes de santé chez mes beaux parents…

Chaque année je craque plus ou moins avec de 1 à 3 semaines d’arrêt par an pour surmenage. 2020 et son confinement ne fait finalement que retarder l’échéance. 2021 une super équipe dans un collège un peu difficile m’aide à tenir.

Septembre 2021 : première alerte le médecin veut m’arrêter longtemps je négocie et je gagne. Mais ce n’est que reculer pour mieux sauter.

1er décembre 2021 je me lève en larmes incapable d’aller travailler. C’est fini, mon métier passion m’a épuisée et j’admets avoir perdu la flamme.

Je suis en arrêt 3 mois (fin de mon contrat dans l’éducation nationale), j’annonce à mon association dès ma reprise que je finis l’année mais que j’arrête (j’ai assez mal vécu leur manque de compréhension mais je m’y attendais).

Dans mon premier article je te parlais de donner pour recevoir, ce n’est pas un adage qui se vérifie malheureusement.

Je décide donc un peu sur un coup de tête de passer les concours administratifs de la fonction publique d’état et je les ai. Me voilà adjointe administrative dans un tribunal.

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Une page s’est tournée….

Mais la passion de transmettre est bien là…. je sais que je reviendrai un jour ou l’autre à l’enseignement ou à la direction d’orchestre.

Pour l’instant je veux laisser mes enfants grandir.

Pour l’instant je veux renouer avec le plaisir de faire de la musique.

Pour l’instant je veux m’occuper de moi.

Pour l’instant je veux panser mes blessures.

Pour l’instant je veux oublier la rancœur que je peux avoir.

Pour l’instant je veux vivre en paix avec moi-même…

Même si pour l’instant mon nouveau métier m’apporte de nouveaux désagréments que je viendrai te raconter très bientôt !

Un commentaire sur “Quand le métier passion épuise…

  1. J’ai une copine qui vient de finir les corrections éditoriales de son roman, c’était très intense alors elle fait une pause d’écriture et profite de sa grossesse. J’ai un chef qui adore ce qu’il fait, qu’il bosse 50h/semaine quand tu comptes les heures qu’il fait chez lui, le week-end, etc. et qui n’inscrit pas dans l’annualisation, mais là la prime Ségur vient de passer sous le nez de notre service, et c’est un peu la goutte d’eau du manque de reconnaissance. Je pense que c’est ça, le problème du métier-passion. C’est que tu aimes tellement ça que tu vas au-delà des limites, et ensuite quand tu veux de nouveau respecter tes limites, les gens autour ne comprennent pas pourquoi tu travailles moins. Comme c’est ta passion, tu es censé accepter tous les problèmes… je pense que c’est important d’aimer son métier, mais de garder une passion comme passion, je pense…

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