C’est maintenant ?

C’est maintenant ?

« Si Lepen est élu, on va vivre au Canada ».

Cette phrase, ma mère l’a prononcée devant moi lors des élections de 2002. Aujourd’hui, je ris d’autant plus jaune que cela fait deux élections consécutives qu’une Lepen manque d’être élue première femme présidente de la République Française, et que j’ai compris que mes parents seraient sûrement les moins touchés dans leur quotidien par cette élection. Mais cette phrase a résonné en moi et résonne encore aujourd’hui.

Je te préviens tout de suite, cet article ne sera pas gai, et j’espère qu’il ne sera pas trop anxiogène sans pouvoir te le promettre. Si cela peut te miner, je préfère t’avertir tout de suite, pour que tu puisses arrêter de lire ici.

Peut-être qu’un jour, le monde dans lequel je vis ne correspondra plus aux valeurs dans lesquelles j’ai été élevée. Qu’un jour, je n’aurais plus accès au confort auquel je suis habituée (et ma famille non plus, surtout mon fils). Que nous serons à la place de ces êtres humains qui fuient leur pays dévasté, et meurent dans des canots en tentant d’atteindre des rivages plus cléments. Que tout va se jouer sur les compétences inhabituelles acquises par certain(e)s pour survivre. Qu’il faudra lutter, contre l’environnement, les autres, soi-même.

Récemment, l’idée que bientôt, il sera trop tard pour anticiper, m’est venue à l’esprit.

L’urgence écologique

Du coup, je me demande s’il ne serait pas urgent que je trouve un poste en 100% télétravail, pour pouvoir facilement déménager à la campagne, dans une grande maison avec un grand terrain. Grand terrain qui me permettra d’expérimenter et de m’essayer au potager, afin d’atteindre un jour (le plus tôt possible) l’autonomie alimentaire. Autonomie qui nous permettra, à ma famille et moi, de survivre le jour où notre société s’effondrera et que les supermarchés seront dévalisés par des hordes de pillards armés. Oui, ça va loin dans ma tête.

Ça va tellement loin que je me demande aussi si je ne ferai pas mieux de me reconvertir dans un métier qui pourra avoir une utilité plus directe à ma future nouvelle vie de femme devant assurer sa subsistance par le travail de la terre et non plus seulement le travail intellectuel. Je me rassure en me disant que peut être qu’on n’en arrivera pas là de mon vivant.

En attendant, dès que je vois un livre sur des astuces de grand-mère, sur les plantes médicinales, sur la permaculture, bref, sur des savoirs qui peut-être un jour pourraient m’être utiles, je l’ouvre, je le lis et j’essaie de retenir le maximum d’informations par coeur. Parce que je ne suis pas sûre de pouvoir emporter des livres avec moi si un jour tout s’effondre. Je regarde des vidéos Youtube sur l’auto-construction, la vie en tiny house, le jardinage. Parce qu’avoir toujours accès à internet dans un monde rendu stérile est une utopie. La connaissance sera peut être ce qui fera la différence entre ma (notre) survie ou ma mort un jour. Oui, je le répète, ça va très loin dans ma tête. Je suis habituellement une grande optimiste, mais j’avoue qu’il y a des moments où je ne peux pas m’empêcher de faire mon Usopp (personnage de One Piece extrêmement pessimiste, peureux et négatif – même s’il est très drôle). Heureusement, ce sont des phases assez courtes dans ma vie. La plupart du temps, je me raisonne en me disant que nous serons capables d’améliorer les choses. Et puis…

Dune de sable, une seule plante

Crédit photo : adege

L’urgence politique

Et puis j’entends parler de la nouvelle sortie d’untel ou unetelle sur une question de société. Je constate que mes valeurs actuelles sont menacées non seulement par d’autres pays (coucou les USA et le droit à l’avortement) mais aussi au sein de mon pays de naissance. Entre la montée de l’intolérance parmi les jeunes générations, le recul de certains droits par manque de moyens (à tout hasard, le droit à l’éducation) et l’augmentation de la violence quotidienne dans certains rapports sociaux, le pessimisme revient en force.

Les évènements récents (les élections européennes de 2024, pour ne pas les nommer) voient monter l’extrême droite et l’extrême gauche de plus en plus dans les votes. La mesure semble être un lointain concept, tout le monde vire en tournant le volant à fond dans l’espoir que les choses changent, rapidement (mais pas trop quand même, les êtres humains n’aiment pas le changement après tout). Peut-être que l’anxiété que je ressens parfois en entendant parler de l’état de la planète ou de tout le chemin qui reste à parcourir pour l’égalité des droits entre les humains conduit certain(e)s à faire des choix drastiques. De ce côté-là, je reste, naïvement peut-être, fidèle à la ligne de conduite que je me suis fixée depuis le lycée et mes cours d’histoire : jamais d’extrêmes. Logique donc que j’ai l’impression que mes concitoyens oublient les leçons apprises dans la douleur quelques générations avant. Je me sens perdue, je l’avoue. Le paysage politique changera peut être dans les prochaines années, je l’espère, sans toutefois y croire vraiment. A part continuer à voter, je ne sais absolument pas quoi faire pour enrayer cette progression. N’ayant pas d’emprise sur la situation, j’essaie d’y penser le moins possible pour garder une sérénité, de façade la plupart du temps.

Et je repousse le plus possible les pensées de type « scénario catastrophe » pendant lesquels je me demande que faire si un jour j’entends des policiers ou des miliciens venir chercher des voisins pour les expulser du pays, ou pire, obéissant aux ordres d’un gouvernement à l’idéologie basée sur des préjugés et non des faits. N’oublions pas que les biais cognitifs du cerveau humain sont nombreux et entraînent ou confortent des croyances, qui se révèlent souvent loin de la réalité, contre-intuitive le plus souvent (je te conseille la chaîne Youtube de l’ASTEC à ce sujet).

Je ne sais pas trop comment conclure cet article. Vois-tu tout en noir toi aussi, certains jours ? Arrives-tu à rester optimiste sur l’avenir ? Qu’est-ce qui te rassure ou t’aide à retrouver ta sérénité ?

13 commentaires sur “C’est maintenant ?

  1. Je ne commente pas souvent alors que je suis une fidele lectrice. Je suis votante pour le Nouveau Front populaire mais je ne suis pas LFI. Cependant le conseil d’état a évalué que LFI n’était pas un parti d’extrême gauche alors que RN a été jugé d’extrême droite (coir article du journa 20minutes). En 1936, il y avait aussi beaucoup de journaux qui avaient assimilé Léon Blum à un extrémiste pour faire peur aux gens.

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    1. C’est vrai, l’histoire se repète vraiment sur plein de petites choses ! Et aujourd’hui, nous sommes bien contents de jouir des progrès sociaux que ce gouvernement nous a apportés !

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  2. Merci pour cet article très intéressant MadameParenthèses.
    L’actualité est très anxiogène en ce moment, et je me demande toujours si elle l’est plus qu’avant, ou si c’est simplement une question d’accès H24 aux informations qui amplifie ce ressenti. Quand on regarde notre histoire, elle a toujours été anxiogène finalement.
    Je ne suis comme toi pas très optimiste sur l’avenir, mais j’ai un caractère plutôt pessimiste de base. Et généralement, ce qui m’aide à rester sereine, c’est finalement une forme de déni : me concentrer sur les petites choses du quotidien qui me font du bien, et ne pas pousser la réflexion sur l’avenir trop loin.
    Là où je me retrouve moins (même si ton propos est beaucoup plus nuancé), c’est dans le côté survivalisme de l’extrème. Quand je regarde des films catastrophe (genre grosse catastrophe nucléaire), je me demande toujours quel est l’intérêt de vouloir vivre à tout prix dans un monde pareil. Tu le vois là le côté pessimiste 😅 ?

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    1. Je vois, et je compatis !

      Perso, je ne regarde jamais la télé et je me tiens loin des infos. Je reçois la newsletter gratuite du Monde mais je parcours seulement le titre principal. Mais j’ai ressenti l’anxiété de la situation malgré tout.

      En tout cas, ton astuce est bonne et je crois qu’inconsciemment, on se raccroche tous au quotidien pour ne pas couler.

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  3. Je t’avoue qu’en ce moment moi aussi j’ai peur. Et même si je vis à l’étranger, je trouve que beaucoup de pays en ce moment sont et ont de plus en plus de votant pour l’extrême droite. Et là je me demande ou va le monde et si mes enfants auront encore la liberté d’expression, de se déplacer, de disposer de leur corps.

    Perso, l’urgence écologique me parait moins affolante (pas parce que les conséquences sont moins graves) mais parce qu’elle est plus progressive et que j’en ai pris conscience il y a plus longtemps. Je ne pensais pas il y encore 5ans que je verrais un jour où l’extrême droite serait au pouvoir. Et je ne sais pas comment me battre contre ca.

    Comme Esperluette, je ne vois pas trop de survivre à tout prix.

    Et désolée mais je pense que si des pillards essaient de survivre ils préferont les bons légumes de ton potager mal gardés que les légumes OGM des supermarchés probablement bien gardés…

    J’essaie de me dire que les états unis ont survécu et peuvent encore se relever après 5 ans de Trump. Donc on pourra peut être survivre à 3 ans d’êxtrême droite…

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    1. C’est vrai que la possibilité demeure que le passage de l’extrême droite ne soit qu’une parenthèse dans notre histoire politique… j’espère sincèrement que ce sera le cas !

      Dans ma vision de l’apocalypse, il n’y a plus de supermarchés bien gardés 😅 mais je comprends qu’on n’ait pas envie de vivre dans un tel monde 😅

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  4. Pardon, mais ma 1ere réaction ne va pas être très mesurée : on ne peut pas parler DES extrêmes mais seulement de l’extrême droite ! C’est un abus sémantique martelé par la droite mais le conseil d’Etat est très clair là dessus : ni les écolos ni LFI ne sont classés à l’extrême gauche. Il existe une définition précise des extrêmes et LFI n’y correspond pas. Selon bien des spécialistes, le NFP a un programme moins à gauche que la gauche des années 80. En cela, ton article continue de véhiculer une idée fausse.

    Bon, à part ça, je suis de tout cœur avec toi. Sur la question écologique j’essaye de rester optimiste parce que je le dois à mes enfants, mais parfois je m’effondre et me dis qu’on y arrivera jamais. Et quand la question politique se rajoute et que je vois l’extrême droite (un danger pour les minorités, mais aussi un danger pour notre avenir climatique) aux portes du pouvoir, je suis carrément dans la peur. Alors je prie pour que dimanche soir les dégâts soient limités…

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  5. Pour compléter ce qui a été dit sur l opposition lfi / extrême droite qui arrange bien les stratégies électoralistes droite et très droite

    Le RN est un parti en mesure de remporter la majorité peut être absolue

    LFI est une fraction d un parti, le NFP, et même en victoire de ce dernier ne sera pas en majorité

    C est fallacieux d opposer leur pouvoir d action une fois au gouvernement (sans compter que cela invisibilise par exemple les ecolo ou la gauche modérée)

    Pour creuser sur les biais de représentation que nous héritons tous des réseaux, n hésitez pas à lire : https://politoscope.org/2024/07/3471/ C est clair et ça fait réfléchir (et bader aussi)

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  6. On peut aussi réfléchir par soi même 10 secondes concernant le conseil d’état : voir justement quelques conclusions aberrantes concernant l’écologie…. on appelle parti extreme, ceux qui attisent la haine, entretiennent la désinformation. Et si on souhaite se voiler la face coté LFI, tan pis ! (d’affirmer que ce n’est qu’une partie du NFP, certes, en theorie, mais melanchon pas l’air au courant). Ce n’est pas parce qu’un parti est affolant (le RN) que les autres sont automatiquement mieux (meme si c’est rassurant de le penser). C’est en cela que ces élections sont anxiogènes. Les personnalités politiques compétentes et apaisantes, peu importe leur parti, sont rares. En tous les cas bravo d’avoir eu le courage de publier un article politique !

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    1. Tout n’est pas rose, c’est sûr, et il va falloir réfléchir sur le long terme. On verra bien si les partis présents en seront capables ou non 🙂

      Merci pour ton commentaire et tes félicitations en tout cas ❤

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