Comment j’essaie de vaincre ma peur de l’eau

Comment j’essaie de vaincre ma peur de l’eau

Je viens te parler aujourd’hui d’aquaphobie et de la façon dont j’essaie de vaincre cette peur (et j’y suis arrivée… en partie).

Piscine

Crédit photo : Pixabay

À mon âge, c’est assez rare, mais plus fréquent chez des personnes plus âgées qui n’ont pas forcément eu accès à la natation étant petites. Pour ma part, j’ai eu des cours de natation pendant l’enfance, avec l’école mais également en privé. Ça ne m’intéressait pas vraiment et je me suis montrée peu engagée dans mes leçons. De plus, mes parents n’étaient pas très à l’aise avec l’eau (ma mère sait nager mais n’aime pas ça et mon père a lui-même peur de l’eau) et ne nous accompagnaient pas à la mer ou la piscine. Mais pour autant, je ne me souviens pas à l’époque avoir eu peur, juste une flemme immense car je ne voyais pas l’intérêt de ce loisir. Mon père a essayé de me motiver en me promettant de me construire une maison de Barbie mais ça n’a pas suffi (et pourtant j’en rêvais !).

Au collège, ma tante s’est proposée pour m’apprendre à nager et je dois dire qu’elle a presque réussi. Je parvenais à faire des longueurs, la tête sortie de l’eau, en ayant simplement une ceinture avec un seul bouchon. Mais sans cette ceinture, impossible de faire quoi que ce soit. Elle me disait « mais flotte ! » et je ne voyais pas du tout comment c’était possible. Nous en sommes restées là.

Ma véritable phobie s’est développée plus tard, au moment où j’ai été obligée de me confronter à mes lacunes. En classe de première, la natation était obligatoire et, même si nous étions classés par groupes de niveaux j’étais la seule à ne pas savoir nager. Le professeur a donc traité mon cas à part (joie à cet âge d’être mise en pleine lumière). Sa stratégie était de faire travailler l’ensemble du groupe, puis de les faire s’asseoir sur le côté pour me faire travailler seule sur l’approche du grand bassin (avec tout le groupe qui me regardait donc). Pour cela, il me faisait sauter dans l’eau, d’abord en tenant la perche (ce que je parvenais à faire tant bien que mal), puis en insistant pour que je le fasse seule. Une fois, il a éloigné la perche au dernier moment alors que j’allais la saisir en sautant (je rappelle que je ne savais pas nager). Je crois qu’il se disait que dans une situation d’urgence j’allais comme par magie réussir à gagner seule le bord et que ça allait me « décoincer » mais ça a été tout le contraire. Après cet épisode, je ne voulais plus rien faire du tout. Même avec la perche, même avec une copine volontaire qui me donnait la main à côté, c’était devenu impossible. Il me hurlait dessus et évidemment cela n’arrangeait rien. J’avais piscine le jeudi après-midi et j’en étais malade plusieurs jours avant. Mes relations avec mes parents n’étant pas au top, je n’osais pas en parler et j’usais plutôt de stratagèmes pour être dispensée autant que je le pouvais (en étant « indisposée » à la rentrée quand j’avais eu mes règles pendant les vacances par exemple). À la fin du trimestre, le soulagement d’avoir fini cette torture hebdomadaire a été plus important que l’engueulade monstrueuse que j’ai reçue en voyant le bulletin de notes avec un joli 2/20 en sport. J’ai reparlé très récemment de cet épisode à ma mère qui a été effarée de ne pas s’être rendue compte à l’époque du calvaire que m’avait fait vivre ce prof, et qui m’a dit que si elle avait su elle m’aurait dispensée tout le trimestre (bon… c’est trop tard).

Après cela, je n’ai pas mis les pieds dans une piscine pendant des années. À la mer, je parvenais à entrer dans l’eau jusqu’à la taille si j’avais la certitude que mes pieds allaient bien rester posés par terre. Je refusais toutes les sorties dès qu’il y avait un rapport avec l’eau, impossible de monter dans un bateau ou d’aller dans un parc aquatique. Même me doucher en ayant de l’eau sur la tête était compliqué. Les premières fois où je suis retournée dans une piscine, c’est parce qu’il s’agissait d’un espace bien-être et je suis restée bien près du bord. C’était assez handicapant mais pas assez problématique dans la vie quotidienne pour que je veuille faire l’effort d’y changer quelque chose. De toute façon, je ne disais rien à personne et je m’étais faite à l’idée que l’eau n’était pas mon élément et que je vivais très bien sans.

Les années ont passé et sans que je puisse dire que j’ai eu un déclic, le chemin s’est fait progressivement dans mon esprit qu’il y avait peut-être quelque chose à faire pour remédier à ce problème. J’ai entendu parler d’une association qui proposait des stages puis des cours hebdomadaires pour vaincre cette phobie. Je suis passée de « de toute façon je n’y arriverai jamais » à « peut-être que je devrais essayer pour voir ». J’ai pris contact avec le responsable, sans donner suite. Et puis dans ma dépression j’ai eu besoin d’accomplir ce défi, de me prouver que j’étais capable de faire des choses. Alors je me suis inscrite, j’ai envoyé le chèque en essayant de ne pas trop réfléchir. Il m’avait fallu des années mais je me sentais prête.

Le jour du stage, je ne faisais vraiment pas ma maligne. J’ai eu envie 10 fois de reculer, mais j’y suis allée. Nous avons été classés en deux groupes de niveau. Les autres participants étaient plutôt plus âgés, mais il y avait aussi quelques personnes de mon âge. Nous avions tous en commun le fait d’avoir vécu un traumatisme, mais certains avaient malgré tout déjà des bases de natation. J’étais une des personnes avec le niveau le plus faible (je ne savais même pas mettre ma tête dans l’eau) et pourtant je crois que j’ai eu la progression la plus importante sur le week-end. Le moniteur a fait preuve d’une bienveillance infinie, en y allant très progressivement, en nous donnant confiance au fur et à mesure en nos capacités. J’ai appris à mettre ma tête dans l’eau, à faire la planche sur le ventre. Je me suis surprise à me sentir bien, dans mon élément. Je me suis surtout rendue compte que je n’étais pas seule, et que c’était possible de mettre cette phobie derrière moi. Je me suis confrontée à ma crainte du grand bassin, et en voyant les autres participants le regard (plein de bienveillance) tourné vers moi mon traumatisme a pleinement ressurgi. Je leur ai demandé de regarder ailleurs, mais je suis parvenue à y aller et même à me laisser aller dans l’eau (pas debout, mais assise depuis le bord).

Après ce stage, qui a boosté ma confiance en moi, j’ai commencé les cours hebdomadaires pour consolider mes acquis. Je n’avais pas spécialement d’attentes, mais petit à petit j’ai commencé à apprendre à avancer dans l’eau, à améliorer instinctivement mes mouvements, à sortir la tête de l’eau pour respirer… Il me reste deux grandes difficultés majeures qui sont l’appréhension de la profondeur et la flottaison sur le dos qui me fait paniquer. Sur ces deux points, les progrès sont très longs, mais ils sont là… Parfois je me décourage et je me dis que je n’y arriverai jamais, puis je me rappelle d’où je viens et tout ce que j’ai déjà appris. Pour les JO, c’est raté (malheureusement… ou pas) mais j’appréhende beaucoup moins d’aller à la piscine ou à la mer pendant les vacances et ça n’a pas de prix. L’esprit de groupe nous aide beaucoup aussi lorsque certains ont déjà surmonté certaines difficultés que nous rencontrons. Désormais, mon objectif est simplement de pouvoir me débrouiller un minimum, même quand je n’ai pas pied, et surtout de prendre plaisir à ce loisir. Et peut-être vais-je enfin avoir ma maison de Barbie ?

4 commentaires sur “Comment j’essaie de vaincre ma peur de l’eau

  1. Je me reconnais dans ton récit… L’eau c’était pas mon truc ! Quelqu’un m’avait lancée dans une piscine sans que je sois d’accord et je me suis vue noyée à l’époque à cause de cela !

    Pour le concours de professeure des écoles, j’ai même attendu de savoir si j’étais admissible ou non pour apprendre à plonger et à nager la brasse coulée (c’était une des épreuves à l’époque..). Maintenant, avec l’âge, ça va mieux. J’apprécie de plus en plus les bains en piscine et même dans l’océan ! Je ne sais pas trop pourquoi d’ailleurs !

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    1. Merci pour ton commentaire ! C’est drôle parce que j’avais aussi eu en tête de passer le concours de professeur des écoles et je ne l’ai pas fait parce qu’il fallait savoir nager !

      Je pense qu’on devient quand même moins anxieux avec l’âge et c’est sans doute pour ça que tu apprécies plus de te baigner (et que j’ai réussi à passer la porte de la piscine pour le stage)

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  2. Merci beaucoup pour ton article, je me reconnais beaucoup dedans – sauf que je n’ai pas passé le cap de faire un stage pour vaincre la phobie de l’eau :p Me concernant, au-delà de la phobie de l’eau, il y a aussi de gros complexes qui font que j’ai horreur de me mettre en maillot de bain, donc ça vient renforcer encore ma hantise de la piscine et de la mer.

    Quel traumatisme ce que tu as vécu au lycée ! :-O Et j’ai eu les larmes aux yeux quand tu as décrit la bienveillance du professeur du stage, et tes progrès fulgurants. Ton message est porteur d’espoir, merci !

    Mon mari a encore plus que moi la phobie de l’eau, il ne sait pas du tout nager, et je ne voudrais pas transmettre ça à nos enfants. Mais comment apprendre à ses enfants à nager et à être à l’aise dans l’eau, quand on ne sait pas faire soi-même ?! A l’école ils n’ont pas de cours de natation, au collège non plus, parce qu’il n’y a pas de piscine dans notre ville (elle est en travaux et fermée depuis plusieurs années, et pour une durée encore indéterminée). En plus j’aime d’autant moins la piscine qu’à chaque fois on en revient avec des infections (staphylocoques et autres). Bref, vraiment, l’eau c’est pas mon truc !!

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    1. Merci pour ton commentaire, en effet au delà de la phobie en soi le fait de se mettre à nu ou presque physiquement renforce cette impression de vulnérabilité. Pour tes enfants, est ce que tu aurais la possibilité de leur faire prendre des leçons ? Ce n’est pas l’idéal, mais ce n’est pas non plus inéluctable que les parents transmettent forcément leurs peurs aux enfants. D’ailleurs, je suis la seule dans ma fratrie à avoir peur même si aucun des autres n’a eu l’idée de faire les JO non plus

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