* * * UN AN * * *

* * * UN AN * * *

Mon bébé,
Ma grande fille,

Demain matin, tu auras un an.

Un an depuis cette journée interminable du 11 novembre où tu as décidé de nous rejoindre, à 22h04 très précisément.

Un an que je suis ta maman.

Je pourrais m’extasier — mi-ahurie, mi-émerveillée — devant la vitesse à laquelle cette année a filé. Et c’est vrai. Mais, si je veux être complètement honnête, certaines périodes m’ont paru durer une éternité.

Je garde de tes six premiers mois le souvenir d’un grand brouillard entre la logistique d’une vie à cinq, la préparation des déménagements, tes pleurs incessants et les nuits sans fin.

Et puis, presque du jour au lendemain, autour de tes six mois, on a découvert une petite fille apaisée, un petit bulldozer souriant qui fonce à toute allure en se marrant tout le temps. Aujourd’hui, tu fais coucou et bravo, tu montes et descends les escaliers et tu as fait tes premiers pas maladroits.

Un an, beaucoup de photos et autant de souvenirs. J’ai ressorti pour l’occasion toutes mes notes de téléphone, soigneusement consignées, où j’ai noté, semaine après semaine, tout ce que je ne voulais pas oublier.

Un an et presque dix mois d’allaitement, avec des hauts et des bas. J’ai retrouvé avec tellement de bonheur cette sensation : les tétées collées serrées, ton corps chaud contre le mien à toute heure du jour et de la nuit. Les tétées repas, les tétées câlins, celles qui apaisent, celles qui endorment, celles qui rassurent… Et puis tu as décidé, au bout d’un moment, que c’était bon pour toi, merci bonsoir. J’ai continué à tirer mon lait encore un peu, le temps pour moi de faire le deuil de cette bulle à deux que j’aurais volontiers prolongée ; puis j’ai terminé l’aventure en gardant précieusement au congélateur un dernier sachet de lait en souvenir.

Il y a eu, en un an, très, très peu de nuits complètes. Je ne savais pas qu’il était possible de se réveiller aussi souvent, aussi longtemps, sans décéder. J’ai découvert à quel point le post-partum, sans l’option sommeil, pouvait être différent.

Et dans ce brouillard, ces souvenirs, cette fatigue immense, il y a eu la chance inouïe de ne pas avoir eu à reprendre le travail, et de pouvoir rester auprès de toi, aussi longtemps que j’en ai eu envie. Quel plaisir et quel émerveillement de te voir grandir jour après jour. De te regarder, de t’observer sous toutes les coutures. De voir tes cils s’allonger, tes cheveux pousser, ton corps s’alourdir dans mes bras. De te voir t’affirmer, t’épanouir et te développer jour après jour.

Je crois vraiment que c’est ce que j’aime le plus dans la maternité : cet émerveillement constant, ce plaisir infini que je prends à t’observer, te développer, grandir chaque jour et redécouvrir la simplicité du monde à travers tes yeux.

Jour après jour, mois après mois

1 mois – Novembre
Te voilà toute emballée comme un gros burrito, quand on est remontés de la salle de naissance, épuisés.
La rencontre avec tes frères le lendemain.
Le retour à la maison trois jours après, les sushis et ce magnifique bouquet de fleurs offert par ton papa.
Les premières semaines ne sont pas les plus difficiles : l’allaitement est lancé, je vis à ton rythme.
J’essaie d’en faire le moins possible, de respecter le “mois d’or”. Ta grand-mère me fait de la soupe.


2 mois – Décembre
Les tétées sous le sapin, les lumières qui clignotent.
Ton premier Noël.
Ton papa en congé maternité.
Je savoure.
J’ai une pensée pour la “moi” d’il y a un an et ma fausse couche du 25 décembre.
Cette fois, tu es bien là et je ne me lasse pas de te regarder et de te serrer contre moi.
C’est dingue comme tu as déjà changé. Au fil des tétées, je regarde tes cils s’allonger.


3 mois – Janvier
Le début du brouillard. Les nuits sont toujours compliquées et, petit à petit, les journées s’allongent. Ton papa a repris le chemin du travail et le rythme avec tes frères s’intensifie. La machine à laver nous lâche.
Nous n’avons pas eu de place en crèche. Ton papa me dit que ce sera pour la prochaine commission ; de mon côté, je panique un peu.
Tu pleures parfois pendant des heures, je ne sais plus quoi faire. Je finis par enfiler mon manteau sur mon pyjama, je te mets dans la poussette et on descend faire un tour. Tes pleurs s’arrêtent. Les miens prennent le relais.


4 mois – Février
Ton papa te compare au baron Harkonnen dans Dune. Moi, je trouve que tu ressembles à Oncle Fétide dans la famille Addams. Parents indignes que nous sommes.
Tes cacas sont tellement explosifs qu’ils transpercent instantanément ton body, ton pyjama et le tissu du transat. Tu détestes toujours autant le bain. J’ai tout essayé : emmaillotée dans un lange, blottie contre moi, rien à faire…
Je continue de chercher une place dans les crèches privées, mais comme nous sommes fonctionnaires tous les deux, je me fais débouter de partout…


5 mois – Mars
Rendez-vous des quatre mois chez le pédiatre : tu n’as pas pris un gramme. On ajuste l’allaitement et on trouve un nouvel équilibre.
Tes sourires sont plus francs. Tu babilles et tu manges tes pieds. Tu commences à attraper des objets et à enlever ta tétine toute seule…
C’est la période des siestes collées serrées.
On part en week-end toutes les deux au bord de la mer, car je sens que mon équilibre est de plus en plus précaire et que j’ai besoin d’une pause…
Tes arrière-grands-parents viennent te rendre visite et tu es en admiration quand ils chantent “Les marionnettes”. Moi, je chéris ce moment que j’inscris précieusement dans ta mémoire.
On a trouvé notre maison.


6 mois – Avril
Victoire, j’ai trouvé une place en crèche ! En accueil occasionnel, quelques jours par semaine, mais c’est toujours ça. En plus, l’équipe est incroyable…
On prend nos marques. Je souffle un peu, même si l’administratif des ventes, la vie à cinq et les préparatifs du déménagement ne me laissent pas trop de temps pour reprendre pied.
Côté alimentation, on commence doucement les purées, mais ça ne t’intéresse pas tant que ça…
Tu aimes de plus en plus être sur le ventre.
Ton grand frère adore prendre des selfies avec toi et mon téléphone est rempli de photos floues de vous deux, tous sourires.


7 mois – Mai
Te voilà désormais fière comme Artaban sur ta chaise haute, où tu bidouilles pendant de longs moments avec tes jouets. Tu as rattrapé ta courbe de poids. On souffle un peu.
L’attrapage de tétine est désormais maîtrisé, alors on t’en achète plein, phosphorescentes, qu’on dispose partout dans ton lit. Parfois, je te vois, une tétine dans chaque main, t’agiter comme si tu faisais des signaux lumineux pour faire atterrir un avion.
On profite des ponts de mai pour faire notre premier week-end à cinq, avec des amis : nuits chaotiques et apéro toujours prêt. Tu vois la mer pour la première fois.


8 mois – Juin
On sent vraiment que tu t’apaises ces derniers temps. Les nuits sont plus sereines, même si tu as toujours besoin de ton biberon la nuit. Tu te marres tout le temps quand tes frères font les andouilles…
Tu te retournes du ventre sur le dos et je commence à te retrouver en plein milieu du salon. Tu es fascinée par le chat et fais ta première séance de bébé nageur.
Côté alimentation, tu es de plus en plus intéressée et la DME commence à prendre. J’adore te regarder attraper tes petits légumes avec toute la concentration du monde.
Nos appartements se vident et les cartons s’accumulent…


9 mois – Juillet
Nous voilà dans ta nouvelle maison. Le déménagement a été atroce, mais petit à petit, tu prends tes marques et tu as désormais ta chambre à toi.
L’été est là et on profite à fond du jardin. Assise dans l’herbe, tu regardes tes frères jouer au ping-pong.
On te surnomme Madame Panier : je te donne de gros paniers avec plein de jouets et tu te plonges toute entière dedans avant de sortir les jouets un par un.
Tu commences tes sessions de gainage pour être prête pour le quatre pattes.


10 mois – Août
Et c’est parti pour le quatre pattes ! Après quelques semaines de gainage, te voilà à crapahuter partout. Tu te mets aussi debout.
C’est la période “bulldozer”, où tu tombes et te cognes régulièrement. La crèche nous appelle trois fois par semaine pour nous dire que tu es tombée, t’es cognée contre le mur ou assommée avec un jouet.
Mi-août, la crèche ferme pour trois semaines. Tes grands-parents et arrière-grands-parents viennent te rendre visite, puis nous partons pour nos premières vacances tous les cinq.


11 mois – Septembre
L’automne est là. La couleur de tes yeux a changé, passant du bleu au vert. À la crèche, ils te surnomment bébé soleil.
Tu passes ton temps à sourire, à rigoler et à faire coucou à la porte.
On fait Paris–Bordeaux en train pour aller rendre visite à tes cousines sur le bassin d’Arcachon.
Tes passions du moment : monter l’escalier, escalader le lave-vaisselle et tourner les pages de tes livres.
Tu babilles tout le temps et fais bravo.
On récupère en braderie une table d’activités dont tu te sers comme trotteur pour crapahuter dans toute la maison.


12 mois – Octobre
Dans quelques semaines, tu auras un an.
Tu fais tes premiers pas maladroits pendant les vacances scolaires. D’abord un, puis deux, puis dix. Ça tangue, mais tu gardes l’équilibre.
On t’achète tes premières chaussures.
C’est le début de la période des transvasements, alors je te sors des bols et des petits objets, et tu joues pendant de longs moments.
Je t’aménage aussi un placard dans la cuisine, dans lequel tu adores trifouiller.
C’est le mois de ton premier Halloween et je te prends une photo dans une énorme citrouille avant d’aller faire la chasse aux bonbons avec ton frère.


Et voilà.
Une année est passée.
Parfois très vite. Parfois moins.
Ce qui est certain, c’est que ça a été une année très dense. Parfois difficile. Mais aussi merveilleuse.

J’ai adoré te voir grandir, passer du burrito à la petite fille qui marche.

Et j’ai tellement hâte de continuer cette aventure avec toi. 💛

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