Assistante sociale dans un CAMSP
Aujourd’hui, j’ai envie de te parler de mon métier. Un métier que j’exerce depuis bientôt 10 ans et qui continue de m’animer. Un métier où je me sens utile et à ma place, même si ce n’est pas simple tous les jours et que j’ai parfois envie de me reconvertir. Je suis assistante de service social et je travaille dans un Centre d’Action Médico-Social Précoce (CAMSP).

C’est quoi un CAMSP ?
Tout d’abord, je vais t’expliquer exactement ce qu’est un CAMSP. Il s’agit d’un établissement médico-social qui accueille des enfants de 0 à 6 ans pour de la rééducation et des soins en équipe pluridisciplinaire. Au sein du CAMSP se côtoient des psychomotriciens, des kinésithérapeutes, des ergothérapeutes, des psychologues, des orthophonistes, des éducateurs spécialisés, des puéricultrices, des neuro-psychologues, des médecins (pédiatres, neuro-pédiatres, pédopsychiatres…) et des assistants sociaux dont je fais partie. Les enfants que nous recevons ont différents profils : polyhandicapés (maladies génétiques, pathologies liées à la naissance ou aux premiers jours de vie, prématurité…), retard global de développement ou encore enfants diagnostiqués avec un Trouble du Spectre Autistique (TSA). Nous avons donc aussi bien des enfants qui ne marchent pas que d’autres qui ne parlent pas, certains présentant une déficience intellectuelle et d’autres des troubles du comportement. Parfois, le tout se combine. Parfois, le handicap est plus léger. Mais dans tous les cas, il impacte de plein fouet une famille, et mon rôle est de les aider au quotidien pour que le handicap de leur enfant ait un retentissement moindre sur la vie personnelle, professionnelle, familiale… Et ce n’est clairement pas une mission simple car en France le handicap conduit toutes ces familles touchées dans un véritable parcours du combattant pour pouvoir vivre, voire juste survivre.
Mes missions d’assistante sociale
Contrairement à mes collègues qui ont un rôle de soignant et/ou de rééducateur, moi je me positionne hors du soin. Je suis la référente sociale pour les familles des enfants accompagnés. Mes missions sont très variées et larges. Tout d’abord, il est important de préciser que je rencontre les 67 familles. En effet, je suis en charge de leur proposer un entretien dans le cadre de la pré-admission au CAMSP, afin de faire un bilan au niveau social. Je balaye un peu tous les domaines : la situation familiale, la situation professionnelle des parents, le parcours de l’enfant (de la naissance à sa scolarité, son handicap, etc), la situation administrative de l’enfant et de la famille, l’adaptation du logement, et tout autre sujet qui touche de près ou de loin aux difficultés de l’enfant suivi dans la structure. Ensuite, j’accompagne la plupart des familles dans la constitution et le suivi des dossiers auprès de la Maison Départementale pour les Personnes Handicapées (MDPH) afin de faire valoir les différents droits (allocation de base, complément, prestation compensatoire du handicap, accompagnement pour la scolarité, etc). Je suis également sollicitée pour accompagner et suivre la scolarité des enfants, que ce soit en milieu ordinaire ou spécialisé. Je suis amenée aussi à aider les familles face aux difficultés financières liées au handicap (renoncement à l’emploi, achat de matériel spécifique et adapté…). Et enfin, j’ai aussi un rôle très important concernant la protection de l’enfance, tant en matière de prévention que de protection.
Le handicap, un combat quotidien pour les familles
Mon travail au CAMSP m’a fait rencontrer jusqu’à maintenant des familles courageuses qui doivent faire face au handicap de leur enfant depuis des années. Que le handicap ait été diagnostiqué en anténatal, à la naissance ou dans les mois et années qui ont suivi, il a eu l’effet d’une bombe au sein des familles et les impacte de plein fouet au quotidien. Au delà du deuil de l’enfant rêvé, de l’acceptation du handicap, de la maladie ou des différences, il y a la dureté de l’administration française qui nécessite de se battre en permanence pour faire valoir leurs droits. Je rencontre chaque jour des parents épuisés par toutes les adaptations permanentes dans leur vie de tous les jours, leurs renoncements à une vie « normale ». La scolarité est également un parcours du combattant pour certains enfants et certaines familles, que ce soit pour pouvoir bénéficier de ce que l’on appelle l’inclusion en milieu ordinaire ou pour être pris en charge par des structures spécialisées où l’attente de place peut durer parfois jusqu’à 7 ans ou plus. A l’Éducation Nationale (milieu ordinaire), une pénurie d’accompagnant d’élève en situation de handicap (AESH) liée aux conditions de travail très précaires se répercute sur les enfants accueillis dans la classe de leur niveau, ne leur donnant alors pas toutes les chances d’entrer dans les apprentissages. Alors moi, en tant qu’assistante sociale, je suis là. Pour les écouter, les soutenir, les orienter, les conseiller et parfois mener les combats avec eux pour que leurs enfants puissent vivre dans la dignité et obtenir le meilleur.

Et encore tant de missions
Ce que j’apprécie dans mon métier et sur ce poste en particulier, c’est la diversité de mes missions. Je suis aussi amenée à soutenir la parentalité, à aider les familles à trouver des solutions de répit. Je travaille en équipe pluridisciplinaire et c’est une vraie richesse que de partager avec d’autres corps de métier. Petit à petit, je comprends moi-même l’intérêt de proposer telle ou telle rééducation à un enfant selon son handicap. Au fur et à mesure de ces échanges, je peux aussi devenir source de propositions d’accompagnements dans les soins. J’aime mon métier et j’ai à cœur d’accompagner ces familles fragilisées par le handicap ou la maladie, afin de les aider à monopoliser leurs compétences et leurs forces face à ce qu’elles vivent au quotidien.
Un métier qui fait sens pour moi
Depuis que j’ai pris mes fonctions sur ce poste, j’ai retrouvé du sens à mon métier. Jusqu’à présent, j’ai travaillé en tant qu’assistante sociale hospitalière. Et si je me retrouvais totalement sur les postes où j’étais assistante sociale en néonatalogie (accompagner des familles face à la prématurité de leur enfant et les conséquences), en hématologie (accompagnement social auprès de patients atteints de lourdes pathologies invalidantes et impactant leur vie) ou encore lorsque j’exerçais à la Permanence d’Accès aux Soins de Santé (PASS) ; depuis mon retour de congé parental, je n’arrivais plus à prendre du plaisir ni à reconnaître mon identité professionnelle. Le rôle du service social des malades dans l’hôpital où j’exerçais s’étant, au fur et à mesure, limité à faire sortir les patients de l’hôpital le plus vite possible sans avoir forcément de solutions adaptées au domicile. Tout cela afin de réduire les coûts. Je ne me sentais plus à ma place, inutile et surtout mal à l’aise avec les familles et patients accompagnés, car le système m’obligeait à pratiquer d’une façon qui allait à l’encontre de mon éthique professionnelle. Désormais, au CAMSP, j’ai retrouvé le cœur même de mon métier, le sens du mot accompagnement social et je me sens de nouveau utile et droite dans mes baskets d’assistante sociale. Je n’ai toujours pas de baguette magique, mais je m’en sors pas trop mal !
Oh ! En voilà un métier qui doit être passionnant ! Juste une question : comment gères-tu quand les parents démissionnent, finissent par divorcer, quand la famille se déchire face au handicap ? Je ne porte aucun jugement, franchement je n’aimerais pas être dans leurs bottes.
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Cela arrive en effet malheureusement… On s’adapte et on accompagne en fonction des histoires de chacun. Parfois, on est obligé de passer par l’aide sociale à l’enfance pour protéger les enfants qui sont au milieu… Pas tous les jours facile…
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Je suis depuis peu AESH après avoir exercée des missions d’assistante sociale en Centre d’action social, ton article me parle beaucoup et est très intéressant…
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J’espère que le métier d’AESH va être revaloriser très rapidement car je trouve la situation de plus en plus catastrophique face à la pénurie d’AESH. En tout cas, bravo pour votre travail, les enfants ont énormément besoin de vous !
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Merci beaucoup oui ça me paraît indispensable et c’est fou qu’aujourd’hui ce ne soit toujours pas considéré comme un métier a part entière…
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Je suis infirmière en établissement accueillant des enfants et jeunes polyhandicapés, votre article me parle beaucoup.. vous faites un travail tellement important que je ne pourrais jamais faire !!!
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C’est un merveilleux métier que tu fais là !
Je peux témoigner, en tant que maman, que toi et tes collègues sont une aide indispensable, essentielle, voire primordiale. Oui, quand le diagnostic tombe, c’est une vrai bombe. Même quand on le voit arriver. Un soulagement aussi – en tout cas, ça l’a été pour moi. Mais sans accompagnement, sans guide, on peut se perdre tellement vite ! J’ai eu la chance, une fois que le diagnostic a été formulé, d’avoir trouvé en face de moi, des personnes qui ont su me guider dans les différentes étapes à suivre. Des personnes qui ont su me soutenir et parfois me mettre certains points sur les i – car c’est parfois nécessaire – et m’aider à trouver de nouveaux points de repères dans ma vie, un nouvel équilibre, une nouvelle « normalité ».
je tiens à dire, également, que je trouves également que le métier d’AESH est loin d’être assez bien rémunéré et assez valorisé. Ici, j’ai pu constater que la plupart des assistant.e.s scolaires abordaient cette activité comme une sorte de métier d’appoint, à défaut de mieux, dans l’attente d’un « vrai » métier, une « vraie » carrière. Il faudrait, en France, en Autriche, ou partout ailleurs que ce métier soit enfin considéré comme une vraie profession où on peut faire carrière avec un vrai salaire.
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