Et si demain…
Le sujet que je vais aborder n’est franchement pas le sujet le plus réjouissant, et je m’en excuse par avance. Je pense toutefois que c’est un vrai sujet, et un questionnement à avoir. C’est peut-être une déformation professionnelle, je suis assistante sociale, et j’ai été bien trop souvent confrontée à cela dans ma pratique au quotidien. Le sujet en question, c’est : « Et si demain, mon mari et moi, on disparaissait … ? » Tout simplement, et si je mourrai demain ? Plus largement, si les deux parents venaient à mourir. Pas joyeux, je te l’avais dit. Mais pour moi, c’est essentiel d’y réfléchir, car pour l’avoir vécu plusieurs fois (bien trop de fois à mon goût) au travail, je sais à quel point les décisions sont difficiles à prendre.

Au delà du choc provoqué par une telle perte, se pose la question du devenir des enfants. Qui va s’occuper d’eux ? Bien entendu, quand il s’agit du décès d’un seul des deux parents, la question ne se pose pas réellement. Les enfants sont confiés à l’autre parent – qui devra tout de même des comptes au juge des tutelles et à un Conseil de famille, afin de s’assurer que tout est fait dans l’intérêt de l’enfant -. Mais si le deuxième parent est absent, s’il est déjà décédé par exemple, ou s’il n’a jamais reconnu les enfants à la naissance, ou encore s’il ne s’occupe plus d’eux depuis plusieurs années… la question se pose alors au même titre que si les deux parents venaient à disparaître en même temps.
Comme je le disais, cette situation, je l’ai vécue au travail. Une maman solo, malade et se sachant condamnée à moyen ou long terme, mère de deux jeunes enfants. Elle a pu anticiper, grâce à mon accompagnement, l’avenir de ses enfants, en faisant le nécessaire pour qu’ils soient confiés à la personne de son choix. Bien sûr, quand nous avons fait les démarches, nous avions énormément d’espoir… l’espoir de ne jamais avoir finalement à transmettre ses « dernières volontés », mais cela l’a soulagée de le faire. Elle était plus sereine. Mais j’ai aussi vécu des morts plus brutales, imprévisibles, violentes… Une maman qui rentre à l’hôpital pour une opération bénigne en ambulatoire et qui décède au bloc. Les trois enfants confiés à la voisine pour la journée. Un petit bout de 2 ans que ma collègue assistante sociale de l’Aide Sociale à l’Enfance amène à 20h à l’hôpital pour qu’il puisse voir sa maman et qui me dit, avec ses beaux yeux remplis d’innocence « c’est la première fois que ma maman elle meurt »…
Alors, comment ne pas y penser, pour moi, depuis que je suis devenue mère ? Car c’est en effet, en devenant mère, que j’ai eu vraiment peur de mourir. J’y pense souvent, car c’est vraiment présent au quotidien. Un fou qui manque de me percuter sur la route, des résultats médicaux pas très bons, des annonces de drame autour de nous… D’ailleurs, depuis que je suis maman, la route me terrifie. Je trouve les autres tellement dangereux sur la route, inconscients… Et ça malheureusement, on n’a pas de contrôle là-dessus. Si un taré vient nous percuter à pleine vitesse car il a grillé un stop, un feu, une priorité… ça ne pardonne pas. Et ça ne prévient pas. En quelques secondes, tout bascule et ta vie est finie.
Quand j’avais douze ans, mes parents ont fait un voyage à l’étranger, en avion donc, et en plus dans une zone plutôt à risque au niveau géopolitique. C’était un voyage payé par l’entreprise de mon père, qui avait encouragé ses salariés à prendre des mesures justement par rapport aux enfants, en cas d’accident. Ils avaient aussi donné la possibilité à ceux qui le souhaitaient de voyager séparément en avion. Mes parents nous avaient alors demandé, à mon frère et à moi, chez qui nous aimerions vivre s’ils venaient à mourir. Drôle de question pour des enfants de 12 et 9 ans. On y a pourtant répondu, et j’avoue que depuis, ça ne m’a pas quitté. Qui prendra le relais ?
Aujourd’hui, je suis mère de trois jeunes garçons. Ils ont cinq ans, 3 ans 1/2 et 18 mois. Ils sont donc très rapprochés. C’est du boulot. C’est sportif. Déjà un enfant, c’est compliqué. Deux… aussi. Alors 3 enfants en bas âge ! Qui pourrait assumer une telle responsabilité, en plus de sa vie actuelle ? Nos parents n’ont plus vingt ans (logique, nous non plus !) Les parrains marraines ont leur vie de famille, avec déjà des enfants, petits ou grands… Les oncles et tantes n’habitent pas forcément en France et n’ont pas forcément la vie adaptée pour des enfants. Bref. C’est vraiment une question complexe. Car bien sûr, nous voudrions qu’ils soient ensemble, pour toujours. Une fratrie soudée pour faire face à un tel drame. C’est terrible d’y penser, et pourtant je dois avouer que je serai plus sereine si je savais ce qu’il se passerait pour eux, si je venais à disparaître avec leur papa.
Et même si je pense souvent à cela, que je réfléchis à qui pourrait endosser ce rôle de « tuteur », prendre notre place dans leur vie pour les aider à devenir de bons hommes dans notre société… J’ai aussi très peur d’en parler à notre entourage. Pas par peur de nous porter malheur, mais par peur du refus. Je me mets parfois à l’autre place, si demain, une amie ou un membre de ma famille venait à me demander si je pouvais m’occuper de ses enfants en cas de décès. Bien sûr, je pense que je dirai oui, même si j’ai déjà trois enfants. Tout simplement car je me dirais aussi qu’il y a heureusement peu de probabilité pour que ça arrive… Mais mine de rien, ça fait réfléchir, car c’est une sacré responsabilité, à tout point de vue. L’organisation familiale, la gestion du quotidien, l’aspect financier. Récupérer du jour au lendemain, trois enfants orphelins, ce n’est pas rien !
Pour en avoir déjà parlé à quelques copines et collègues, certaines ont pu me dire qu’elles préféraient laisser les gens décider le jour où ça arriverait. C’est aussi une solution, si ça leur convient (moi, j’ai trop besoin d’avoir « un plan »). Mais j’ai aussi malheureusement pu voir que quand ça arrive, souvent de façon très brutale (accident de voiture par exemple), les familles peuvent très vite se déchirer, quand il n’y a aucune directive. Car il y a déjà trop d’affect, trop d’émotions, trop de douleur et de chagrin. Des grands-parents qui viennent de perdre un enfant, des frères qui ont perdu un frère ou une sœur, des amis très impliqués… Tout le monde est sous le choc et pourtant, la vie continue et il faut réagir vite pour que des enfants retrouvent de la stabilité. J’ai donc aussi vu des enfants placés en famille d’accueil ou en foyer car personne n’était prêt à les accueillir. Et je ne veux pas ça pour mes enfants.
Alors un jour, je prendrais mon courage à deux mains, et avec mon mari, après en avoir discuté à cœurs ouverts tous les deux, on ira en parler à notre entourage… Si demain…
Et toi, t’es tu déjà posé ce genre de question ? As-tu déjà trouvé les bonnes personnes pour prendre ton relais auprès de tes enfants si un jour tu venais à disparaître ?

Coucou !
Ayant un projet de bébé toute seule, le fait de prévoir ce qui arriverait à cet enfant si je mourrais faisait aussi partie de la réflexion initiale.
Je pense qu’il est effectivement important de « désigner » un ou des gardiens avant que le pire arrive mais aussi de réfléchir au financement de la prise en charge des enfants: en effet, une personne qui aurait toute notre confiance et la capacité physique de prendre en charge les enfants pourrait par contre rencontrer des difficultés financières à assurer leur entretien jusqu’à ce qu’ils soient indépendants.
Certains contrats d’assurance peuvent être établis dans cette perspective (assurance-vie mais surtout prévoyance) et un conseiller financier pourrait sans doute proposer bien d’autres solutions…
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Oui pour ma part c’est la prochaine étape, de faire le point concernant les prévoyances possibles pour ce genre de situation, ce qu’on appelle tristement les « accidents de la vie »…
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Bonjour,
Effectivement c’est un sujet qui pour nous a été abordé dès la naissance de notre deuxième fils (on a perdu notre premier à la naissance). On ne souhaitait pas que nos parents prennent cette charge éventuelle car on voulait qu’il reste dans leur rôle de grands parents. On a donc regardé du côté de nos frères et sœurs. Et c’est naturellement que notre choix c’est porté sur une de mes soeurs: en couple stable sans désir d’enfants pour eux mais super tata, financièrement OK.
On en a parlé avec eux, leur expliquant notre raisonnement. Ils nous ont demandé un temps de réflexion puis nous ont dit qu’ils seraient OK.
Nous avons rédigé un courrier en ce sens en double exemplaire (un pour eux et un chez nous) et nous en avons parlé autour de nous.
De temps en temps nous leur redemandons si c’est toujours bon (nous avons maintenant deux enfants avec nous).
On ne sait pas de quoi l’avenir sera fait mais je suis rassurée de ce côté.
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C’est super que vous ayez pu avoir cette discussion et trouver les personnes qui pourront prendre ce rôle si jamais… Comme tu le dis, ça rassure et c’est déjà l’essentiel !
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Nous avons les mêmes interrogations : 3 garçons encore petits et d’âges rapprochés (3, 5.5 et 7 ans).
Quand nous avions uniquement notre aîné, nous sommes partis en vacances quelques jours en couple en le laissant en garde aux grands parents. C’est la 1ere fois que nous nous sommes posé la question et nous avions conclu que seule ma sœur pourrait prendre le relais (on ne veut pas que les grands parents endossent ce rôle car même si ils sont encore en forme, ils sont un peu déconnectés des réalités d’aujourd’hui. Et on n’est pas vraiment en phase en terme de philosophie avec les frères et sœurs de mon mari).
Mais on ne lui a jamais demandé et maintenant elle a 2 filles et nous 3 garçons…
Nous partons prochainement avec des copains, à nouveau sans enfants. En préparant le voyage, avec les copains on a parlé de ce sujet justement. Certains ont des plans bien établis, d’autres aucun … nous on sait surtout qu’on ne veut pas que nos 3 enfants soient séparés. Mais après on a bien conscience que 3 enfants à gérer ça ne s’improvise pas …
Quand j’y réfléchis aujourd’hui, c’est a un couple de copains à qui je demanderais. Mais ils ont déjà 4 enfants … certes des mêmes âges que les nôtres mais quand même.. je ne sais pas si on osera un jour leur en parler
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Je trouve en effet que le nombre d’enfants rend le sujet encore plus sensible… Moi la première, je me dis que si demain je devais passer de 3 enfants (les miens) à 5 ou 6 si j’accueillais les enfants de mes amies très proches… Je ne sais pas comment on ferait !
Et donc oui, il faut aussi pouvoir oser en parler.
Pour ma part, mon article n’avait pas du tout cette visée mais il a ouvert une porte, une amie m’a fait signe et ça m’a tellement soulagé… On reparlera bientôt de cela avec elle, mais je sais que nous avons notre personne désormais.
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Merci pour cet article tellement important.
Quand nous étions ados (trois enfants avec 2 ans d’écarts à chaque fois), nos parents nous avaient dit qu’ils avaient convenu avec notre tante et son mari que si l’un des couples décédait, l’autre prendrait la charge et l’éducation des enfants de l’autre couple. (Donc trois enfants d’un côté et deux de l’autre).
Je l’ai toujours gardé en tête.
Depuis que notre fille est née, j’ai souvent eu cette interrogation. Parfois le choix de la personne me paraissait évident, parfois moins. Les années ont passé, nous avons à présent deux enfants (8 et 5). Nous avons de bonnes relations avec nos frères et soeurs et nos parents, mais il y a tellement de variables (ceux qui n’ont pas/ne veulent pas d’enfants – mais s’en occuperaient très bien; ceux qui ont déjà deux ou trois enfants; les capacités d’accueil en terme de logement, de revenus – même si j’imagine qu’il y aurait des aides; les liens déjà existant avec nos enfants; les visions d’éducation parfois très différentes des nôtres…)
Bref, nous allons avoir un voyage sans enfants pour la première fois dans quelques mois. Ce sera l’occasion de parler de tout ça et de prévoir une solution.
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Et oui, le casse-tête de devoir faire avec la composition familiale de tous, entre autre. De toute façon, rien ne sera l’idéal dans tous les cas … mais c’est vrai qu’y avoir déjà réfléchi évite quand même beaucoup de complications si un jour la situation venait à se présenter… Bonne réflexion en tout cas…
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Depuis cet article, nous y avons réfléchi, mon mari et moi. J’ai proposé à un membre de ma famille s’il accepterait avec sa famille, d’accueillir nos enfants si un malheur nous arrivait. Ils ont pris plusieurs semaines de réflexion avant de nous répondre favorablement. Nous sommes sacrément rassurés et sereins de savoir que cette question a été abordée. A voir pour éventuellement faire un document. Juste entre nous, ou bien officiellement chez un notaire ? Nous allons voir cela.
Nous avons également choisi de confier la gestion des biens de nos enfants à un autre membre de la famille, afin de répartir les rôles.
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Alors là je dois avouer n’y avoir JAMAIS pensé et pourtant c’est presque l’une des premières questions qu’il conviendrait de se poser lorsque l’on met un enfant au monde.
Merci pour cet article
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Oui, c’est vrai que ça devrait en faire parti en effet… Mais c’est tellement difficile d’envisager sa mort quand on s’apprête à donner la vie…
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Comme Émilie : je n’y ai jamais pensé, et j’avoue que ni mon mari ni moi n’ayant de fratrie, mais tous les deux des parents vieillissants et des amis qui habitent relativement loin, et en ajoutant le fait qu’on a un enfant à besoins particuliers, ben c’est l’angoisse parce que je ne vois pas du tout qui pourrait remplir ce rôle !
Pour le moment, on conduit donc prudemment, on regarde des deux cotés de la route quand on traverse et on espère que ça va suffire, mais tu as raison, c’est une chose à laquelle on devrait réfléchir…
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Là aussi, la complexité avec nos enfants à besoins particuliers peut angoisser… Nous, ce sont nos enfants, on les connait, on les accompagne depuis le début etc mais qu’en sera-t-il avec des personnes extérieures ? C’est une véritable question et angoisse de nombreux parents dans ce cas…
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N’ayant pas d’enfant, j’ai néanmoins dû me poser la question pour nos neveux et nièces. Car en dehors de nos parents, nous sommes la seule famille proche qu’ils ont, que ce soit de mon côté ou du côté de mon mari.
Nous n’en n’avons jamais parlé directement à nos soeurs et frères, mais il serait évident que nous nous en occuperions, seulement si nos neveux et nièces étaient d’accord. La volonté des enfants passerait en premier.
Je trouve ça très sain de demander à vos enfants ce qu’ils en pensent. Ils sont peut-être encore jeune pour mesurer les conséquences, mais ça a le mérite de faire réfléchir.
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Oui c’est important aussi d’avoir le consentement des enfants, en fonction de leurs âges bien sûr…
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Outch, pas facile, mais réflexion nécessaire… Je vais commencer par faire lire cet article autour de moi, et voir où les réflexions engendrées amènent tout le monde !
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Nous avons un accord plus ou moins tacite, avec mon frère et ma sœur. Un accord sur le principe où les deux autres prennent en charge les enfants (nous avons tous 2 enfants) de la meilleure façon possible. Nous avons conscience que financièrement et au niveau de la place dans nos maisons cela serait difficile. Mais l’idée de cet accord est d’être présent, partie prenante et de faire au mieux.
Pour mon frère et moi, peu de risques de bagarre car pas de frère ou sœur dans la belle-famille. Pour les enfants de ma soeur, si cela devait arriver ça serait plus difficile….mais étant donné qu’elle est divorcée, ce serait quand même assez incroyable que les enfants se retrouvent avec aucun de leur parent…
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C’est une réflexion qui m’angoisse mais qu’on a déjà abordée avec mon mari. Je suis fille unique et ma mère est âgée ( elle pourrait épauler mais pas gérer seule). Nos amis habitent aux 4 coins du monde Si demain il nous arrivait malheur on aimerait que nos enfants aillent chez une de mes belles sœurs. Mon mari avait déjà fait un document officiel dans ce sens pour ses 2 aînées ( d’une autre union et maintenant majeures), nous n’avons pas fait de d’écrit ni abordé concrètement la chose mais on devrait.
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