Mon accouchement intense et violent

Mon accouchement intense et violent

La dernière fois, je te disais que ma fin de grossesse était marquée par de nombreuses contractions et un Polichinelle qui passait son temps à semer le doute sur son arrivée… Il est donc grand temps de te raconter son entrée en fanfare !

Cette fois, ça y est… ?

Ce mardi-là, on évacue les derniers cartons. Je suis à 38 SA + 3. J’ai des contractions, comme tous les jours depuis près d’un mois. Mais elles ne diminuent et ne disparaissent pas. Je continue à vivre ma vie, montre l’appart à un couple d’amis, fais manger Pépette, mais toujours avec des contractions. Je prends une douche, j’en profite pour m’épiler en me disant « on ne sait jamais, c’est peut-être pour aujourd’hui ! ». Mes contractions s’intensifient et ne deviennent gérables que debout. Je couche ma Pépette, et je ne sais pas pourquoi, mais cette fois, je le sais, je le sens : c’est le bon jour. Tout est prêt pour accueillir Polichinelle, mes parents veillent sur le sommeil de Pépette, je suis sereine. Je me permets de dîner avant de prendre le taxi pour la maternité, il est 21h30.

J’arrive pour un monitoring, sans Mister Man, qui ne me rejoindra que si je suis bien en travail. J’ai géré depuis 11h, mais je n’ai aucune idée de l’avancée du travail et ne veux pas me faire trop d’espoirs : après tout, cela fait un mois que je pense que c’est sûrement le bon jour ! Verdict : je suis complètement effacée, à 3 bons centimètres : mon instinct ne me trompait pas, ça y est ! Mister Man me rejoint et l’ambiance générale est la joyeuse effervescence.

Je me mets sous la douche pour gérer la douleur. J’en sors, me mets sur un ballon (qui grince énormément, on en rigole beaucoup avec le papa) et très vite ça s’accélère. Il est 23h30, les contractions se rapprochent, deviennent assez gratinées. Je vomis, ce que je sais être le signe que bébé s’est engagé. Je demande du gaz, mais avant la sage-femme veut refaire un monitoring rapide. Je suis fière de gérer avec respiration, visualisation, et le soutien de mon homme. Je suis à 5 centimètres, il est minuit. Mais d’un coup ma concentration est fissurée par un énorme blocage : on ne trouve pas le cœur du bébé. On place une électrode sur le crâne de Polichinelle pour trouver son pouls. Gros flashback sur la naissance de Pépette, où il s’est passé exactement la même chose : à 7 centimètres, l’électrode montre bébé en détresse, passage express sur le billard pour césarienne sous anesthésie générale. Je ne veux absolument pas revivre ça. Je panique. Quand l’électrode montre un cœur stable, j’éclate en sanglots incontrôlables. Impossible de me calmer, ma technique de respiration en prend un coup !

Crédit photos (creative commons) : Sharon McCutcheon

On me demande de me mettre sur le côté pour pouvoir continuer le monitoring. Je déteste cette position, où je souffre beaucoup plus que celle que j’avais trouvé, à quatre pattes sur le lit. En plaçant l’électrode, la sage-femme a percé la poche des eaux. Et d’un coup, soudainement, les contractions sont l’une sur l’autre et je commence à pousser sans pouvoir contrôler. Je le hurle aux sages-femmes (à ce moment, les hurlements sont ma seule méthode d’expression) qui me disent d’arrêter. D’un coup, tout le monde s’agite autour de moi. Je me rends compte que des deux sages-femmes qui m’accompagnaient, on est passé à cinq personnes avec nous. On m’enlève mes bagues, on appelle le docteur, on me répète de ne pas pousser. Je ne sais pas ce qui se passe, mais je sais qu’ils préparent l’éventualité d’une césarienne. Je fais ce que je peux pour ne pas pousser, mais la pression est immense et le besoin animal. Je panique, totalement. Et personne ne veut répondre à mes questions. Mister Man me glisse la seule chose qu’il a compris : le cœur du bébé faiblit. On me met en position obstétrique, « je vais vous aider à sortir le bébé » m’annonce une femme que je n’ai même pas vu arriver. Ok. Puis on me dit de pousser.

Oh bon sang. Je pousse, en continu me semble-t-il. Je ne sens pas quand finit une contraction, peut-être n’ai-je qu’une seule contraction qui dure l’éternité, je ne sais pas. Trois femmes s’affairent là en bas et me font clairement souffrir le martyr (j’en ai insulté quelques unes). Je pousse, je beugle. Je garde la tête dans le masque à gaz, mais ça ne semble faire aucun effet. La douleur est extrêmement intense, entre les contractions et la sensation de brûlure, mais par-dessus tout, je pense que je ne sais pas ce que je fais, je ne sais pas ce qu’il se passe. Je cherche la main et le regard de Mister Man, mais difficile de me concentrer sur grand chose. Puis je l’entends me dire : « elle est là ! » Je ne le sens pas, moi qui avait imaginé ce moment comme un grand révélateur. Mais, oui, encore une poussée et je me sens comme délivrée d’un poids, et la voilà, enfin, ma fille ! On me la pose sur le torse…. Il est 0h21. Mais il y a clairement un problème. Elle est bleue. Elle ne bouge pas.

S’ensuivent des minutes d’angoisse. Ils me la retirent et s’affairent autour d’elle. Impossible de la voir. Mister Man est près d’elle et me dit ce qu’il voit. Pendant ce qui paraît des heures, je ne sais même pas si son cœur bat. Puis le verdict : son cœur bat mais elle ne respire pas seule. Ils l’amènent en néo-nat. En courant. Le papa les suit. Je suis seule, enfin avec la sage-femme, qui me recoud. Je pleure. Les infos arrivent au compte-gouttes, mais elles arrivent : elle respire. Puis elle respire seule. Puis elle crie, c’est bon signe. Dès que je suis recousue, promis, on m’y amène. Puis la porte s’ouvre et je vois l’image qui fait éclater mon cœur : Mister Man, avec le bébé dans ses bras et un grand sourire. Il me la pose sur moi et je peux enfin la rencontrer ! La vague de soulagement est immense.

Au final, comme sa sœur, elle était trop pressée de sortir : deux tours de cordon et une descente trop rapide (en 10 minutes, je suis passée de 5 à 10 centimètres). Besoin de ventouse et petites déchirures, mais c’était nécessaire : la sage-femme m’a expliqué après coup que si le bébé n’était pas sorti dans les cinq minutes, elles auraient effectivement fait une césarienne en code rouge. Le bébé a été très affaibli par la violence et la rapidité de l’accouchement, mais s’est finalement remis vite compte tenu des circonstances. On a pu faire une tétée d’accueil, certes un peu tardive.

Du coup, j’ai eu mon accouchement sans péridurale… Mais plus marqué par la panique et l’angoisse que par la joie et la fierté. Moi qui voulais me sentir forte de cette expérience, j’en ressors surtout traumatisée et chamboulée. Déçue d’avoir cédé à la panique mais incapable d’envisager avoir réagi autrement compte tenu de mes précédentes expériences. Au final, il me faudra du temps pour digérer cet accouchement violent… mais je suis trop occupée à profiter de mon petit bébé qui dort paisiblement contre moi.

Crédit photo (creative commons) : Luma Pimentel 

C’est ainsi que Polichinelle, en naissant change de pseudo et est maintenant : Flicka (qui veut dire fille en suédois).

4 commentaires sur “Mon accouchement intense et violent

  1. merci pour ce récit qui m’a fait pleurer à gros sanglots, que ca a du etre angoissant de ne pas savoir comment elle allait pendant aussi longtemps !
    Contente de savoir qu’elle va bien maintenant, et j’espère que vous aussi. Super que l’équipe médicale ait réussi à la faire sortir quand il fallait,meme si c’est aussi dommage qu’il n’y ait eu personne de disponible pour vous expliquer ce qui se passait, à un moment si crucial de votre vie…
    J’espère que vous arrivez à digérer ca et profiter de votre nouveau bébé

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  2. j’ai eu ma petite larme au coin de l’oeil ! Bravo quand même pour cet accouchement, ça a dû être tellement éprouvant. Mettre des mots dessus ce n’est pas toujours facile. Mais heureusement tout est bien qui finit bien !

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  3. Comme tu as dû avoir peur !
    J’ai l’impression qu’il est difficile d’admettre, à notre époque, qu’un accouchement reste un moment aussi intense qu’imprévisible. On peut s’y préparer, mais au bout du compte on ne peut pas maîtriser tout le processus.
    Comme toi j’ai accouché par voie basse sans péridurale après une césarienne… Et comme toi je n’en ai pas retiré l’impression de force, de puissance que j’espérais. Mon accouchement a été moins angoissant que le tien mais il m’a quand même fallu un peu de temps pour accepter l’ambivalence de mes sentiments et finalement parvenir à m’en sentir fière, sans regrets. J’espère que tu as pu cheminer toi aussi et que tu es aujourd’hui sereine auprès de tes amours.

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