Je suis responsable financier
Et non, ce n’est pas un métier horrible – ennuyeux – avec plein de mathématiques – austère… et j’en passe. À toi de choisir. J’ai longtemps hésité à écrire cet article en me disant que ce ne serait pas très intéressant, et puis je me suis dit pourquoi pas ? Je voulais mettre en perspective que l’on pouvait avoir un poste de direction en étant jeune maman, et aussi t’expliquer comment je suis arrivée sur cette position qui me plait énormément.
Mon rêve, c’était le journalisme. Vraiment. J’adore écrire, réfléchir, parler sur différents sujets. J’ai fait Sciences Po pour cela d’ailleurs. Mais quand j’ai découvert la réalité du métier, mon envie a évolué. Pour faire simple, j’avais donc deux choix si je laissais le journalisme de côté. En premier lieu, j’adore la sociologie. Au point où je lis énormément d’articles, de livres sur le sujet… J’aime comprendre les sociétés, leur évolution. Pour être honnête, la précarité de chercheur en sociologie ne m’a pas vraiment inspirée. Ma deuxième matière adorée pendant mes études, c’était l’économie. En même temps avec un bac économique et social, spécialité économie avec un 17 ou 18 au bac de mémoire, rien de très étonnant que de partir dans cette voie.
J’ai donc choisi la spécialisation Économie et Finance pendant mes études pour commencer ma carrière professionnelle en vérifiant les comptes de grandes sociétés cotées en cabinet d’audit (ce qui est un peu la « prépa » du monde du travail – coucou les deux heures du matin pour clôturer un dossier). Après avoir fait quatre ans en cabinet, j’ai démissionné pour trouver plus de stabilité et une vie avec des horaires plus normaux en entreprise. Ainsi j’ai été embauchée en reporting financier dans un groupe d’industrie lourde. J’ai clairement adoré. En audit, j’avais eu l’opportunité de travailler dans l’industrie, le monde des médias, ainsi que pour le secteur public. Or dès le départ, j’ai apprécié de faire de la finance dans l’industrie. C’est du concret ! Et les ingénieurs, les personnes travaillant en industrie m’ont paru très passionnés ! Autant dire que partir dans le monde de l’industrie au fond ne s’est pas tellement fait par hasard, et je ne changerai aujourd’hui de secteur en aucun cas.

Le reporting financier pour faire simple, c’est consolider les données financières des différentes filiales pour la grande direction. Après deux ans sur ce poste, je suis devenue contrôleur financier international avec des missions telles que auditer les usines à travers le monde, travailler sur des acquisitions. Des sujets très techniques, stratégiques mais aussi consolider les résultats financiers des usines sous mon périmètre. C’était réellement chouette mais je crois que j’étais fatiguée d’être dans les avions et de ne pas être réellement « responsable » de ces données financières. C’est chouette de consolider des données, de faire de beaux powerpoint, de connaitre les gens, mais je voulais MON usine.
A 31 ans, j’ai démissionné et j’ai eu cette opportunité énorme de rentrer au Comité de Direction d’une usine dans l’automobile en temps que responsable financier. Pour beaucoup d’anciens collègues, cette opportunité n’en était pas une : quitter Paris pour un poste loin des « grands chefs » et puis pourquoi « s’enterrer » dans une usine quand on parle couramment anglais et qu’on aurait l’opportunité « de grimper plus vite en siège »? Et bien, je suis partie pour avoir mon usine, mon périmètre, de vraies responsabilités avec une équipe à gérer. En siège social, c’est rare d’avoir du management. Ici j’ai mon équipe. Au delà de cela, je suis responsable de la rentabilité de mon usine – même si bien sûr je n’ai pas en main par exemple les commandes des clients, mais du moins je considère que je suis « sa représentante », que mon rôle, c’est de la défendre mensuellement devant la direction. Être responsable financier, ce n’est pas être tout le temps dans les chiffres. C’est se poser des questions sur une organisation, sur les procédures, voir s’il n’a pas de risques de fraude, mettre en perspective une action afin de mesurer son impact financier. C’est un métier très stimulant où l’on ne s’ennuie jamais, où il faut bien communiquer pour avoir toutes les informations nécessaires, et je suis aussi très fière d’être une femme sur un poste de ce niveau. Alors oui, je ne suis pas un grand PDG non plus, mais même à ce niveau là, la parité est loin d’être présente, encore plus dans l’industrie. En outre, en étant au Comité de Direction, j’interviens sur d’autres sujets et participe à des sujets élargis tels que la sécurité sur mon site industriel, j’anime des formations… C’est vraiment stimulant d’avoir une fonction aussi polyvalente. Les inconvénients d’un tel métier, c’est que mes enfants sont bien souvent les derniers à la crèche… Oui, je travaille beaucoup. Cela m’arrive de rouvrir l’ordinateur le week-end ou après 21 heures le soir, mais j’y trouve une réelle stimulation intellectuelle. J’arrive à concilier ce métier avec ma vie familiale parce que mon mari gère aussi en partie les enfants et parce que je suis très flexible dans ma manière de travailler. L’autre inconvénient, c’est que la finance sur site industriel est bien moins valorisée qu’en siège, mais comme je ne fais pas cela pour la gloire, je m’en accommode 🙂 Enfin, au delà des chiffres, du métier en lui-même, ce qui me rend heureuse au quotidien, c’est d’aller dans l’atelier, parler avec les gens (il a fallu me faire violence car j’ai un caractère réservé à la base…), comprendre les opérationnels, amener un peu de ma bonne humeur, d’être moi. Cette usine, c’est un peu mon « bébé » même si je ne suis qu’une salariée sur le papier et que je n’y resterai sans doute pas jusqu’à ma retraite (quoique ?) !
Qu’est-ce que j’envisage ensuite ? La suite logique, ce serait d’être responsable d’un plus gros site ou directeur financier d’un pays, mais je me prends à rêver qu’à 34 ans tout est possible et que devenir directeur d’usine, serait aussi une très belle perspective en adéquation avec mes attentes. Mais là, je crois que je rêve un peu trop pour le moment 🙂
Voilà quelques lignes sur ma vie professionnelle bien remplie et très épanouissante !
C’est intéressant d’autant qu’on a souvent une mauvaise image de ce type de métier. Je connais quelques DAF, CGI et autres financiers de site, ils sont généralement hyper intéressants à écouter et semblent de bon conseil. On les sent vraiment investis de la mission « mon site sera rentable » « je défendrai ça au siège », etc., depuis 2008, ça a de la valeur ce genre de raisonnement 😉
En revanche, je suis un peu étonnée que tu occultes la part un peu que je qualifierai de sombre de ta première partie de carrière, c’est-à-dire le résultat parfois catastrophique pour une usine de ton audit Groupe justement. Peut-être parce que, à travailler à l’échelon mondial, on ne se rend pas compte des conséquences locales pour le site audité ?
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Quel ravissement d’avoir des témoignages tel que le tient. J’adore lire les retours des personnes passionnées par leur métier.
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je suis triste … je cherche tellement un dir financier qui te ressemble 😉
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Tu m as l air bien plus fun que les personnes qui s occupent de la finance (au siège ou sur site) dans mon groupe! Ils sont chanceux de t avoir et je te souhaite de diriger un jour ton usine!
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Très intéressant ton article. Moi aussi une femme dans un métier d’hommes, je suis ingénieure mécanique et j’adore tout ce qui est chiffres et mathématiques. J’ai fait un peu d’analyse financière lors de mes études et cela m’avait passionnée alors je comprend ton engouement.
J’ai beaucoup aimé en savoir plus sur ce qu’était vraiment ce métier en tout cas.
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