Chapitre 4 : visite nocturne
« Monsieur Méline » s’empara prestement du médaillon et l’approcha de son visage. Il resta un long moment impassible. Joe et Mina n’osaient pas ouvrir la bouche, de peur de le déconcentrer, le temps semblait suspendu. Après un examen méthodique du médaillon et du portrait, le libraire se dirigea vers l’avant de sa camionnette et revint très vite vers les deux détectives en herbe avec une photo jaunie qu’il leur tendit. Ses yeux s’étaient emplis de larmes.
– C’est la photo de mariage de mon arrière-grand-mère. Expliqua-t-il, la voix légèrement chevrotante. C’est elle sur la photo, regardez, c’est un double de cette photo qui a été découpé. Je ne sais pas si c’est ma mère que vous avez rencontrée ce matin mais cette dame a un lien avec ma famille. Il faut que nous éclaircissions ce mystère…
– Nous ? Vous n’aviez pourtant pas l’air très impliqué, il y a quelques minutes ! Tout cela n’avait rien à voir avec votre famille ! Vous croyez vraiment que vous pouvez décider comme ça que c’est votre enquête alors qu’on s’est tapé tout le travail. Nous allons trouver le fin mot de l’histoire toutes seules ! Viens Mina, on s’en va, explosa Joe.
Durant la tirade de Joe, l’homme tremblait d’émotion. Joe était tellement en colère qu’elle n’avait rien vu. Mina avait prêté attention à cette manifestation d’émotion. Elle s’approcha doucement du libraire et attrapa, au passage, la main de son amie.
– Joe, il n’est pas question de se voler une enquête, nous ne sommes pas dans un de tes romans policiers adorés !
Elle sourit chaleureusement à son amie et reprit :
– L’histoire que nous venons de raconter à ce monsieur est tout de même un peu ubuesque, tu peux comprendre ses réticences ! Maintenant que nous avons assemblé quelques pièces du puzzle, il nous propose son aide, acceptons là ! Et d’ailleurs, reprenons les choses comme il faut. Je m’appelle Mina, enchantée.
Elle lui tendit la main et il la serra franchement. Joe s’avança également vers lui, en proposant une poignée de main qu’il accepta.
– Joe, enchantée également.
– Laurent.
– Accompagnez-nous jusqu’à l’ancien hôpital psychiatrique ! s’exclama Joe. Ce soir ça devrait être plus calme.
– Hum… Avant de reprendre la librairie ambulante de ma mère, j’ai fait des études d’architecture. L’un des projets était d’imaginer comment restaurer la Villa Bon Repos. J’ai toujours les plans chez moi. Mais surtout, si il n’a pas été bouché, il existe un passage secret qui mène du puits qui est juste au bout de la jetée jusqu’à l’intérieur de la villa. J’étudie mes plans et on se retrouve…. Hum… disons à 22h devant le puits.
– D’accord, s’empressa de répondre Joe.
Mina n’eut pas le temps de donner son avis. Joe et Laurent conclurent ensemble les détails du rendez-vous et ils se séparèrent. Mina trouvait bizarre qu’un inconnu participe aussi facilement à leur délire.
A 22h, deux silhouettes enjambaient le puits en riant comme des enfants. La troisième silhouette était un peu en retrait, silencieuse.
– Mina, le passage est libre, dépêche-toi, appela Joe et sa voix résonna dans la nuit silencieuse.
– Chut, j’arrive, souffla Mina en enjambant le puits à son tour.
Joe arriva en bas et atterrit dans une mare d’eau croupie.
– Eurk, attention Mina, tu vas pas aimer ça …
Mina resta perchée sur la dernière marche de l’échelle. Elle regarda Joe enfoncée jusqu’aux genoux dans l’eau verte et prit son courage à deux mains pour vaincre sa répulsion. Elle s’accrocha à Joe et elles commencèrent à avancer.
Laurent sauta dans l’eau sans aucune discrétion et arrosa Mina qui se retint de hurler.
– Vous ne pourriez pas essayer d’être un peu plus discret ? demanda Joe, passez devant c’est vous qui connaissez les plans.
Laurent alluma sa frontale et prit la tête. Ils marchèrent ainsi une dizaine de minutes.
Dix minutes pendant lesquelles Joe essayait de comprendre cette histoire. Dix minutes pendant lesquelles Mina resta accrochée à Joe en combattant sa peur.
Joe ralentit l’allure. Elle voulait parler à Mina sans que Laurent ne l’entende. Il y avait des incohérences dans tout ça. Et puis Joe commençait à avoir mal à la main, Mina s’accrochait très fort, il fallait qu’elle la distrait.
– Dis Mina, t’en penses quoi de cette histoire d’arrière-grand-mère, de grand-mère et de mère qui disparaissent ?
– Je sais pas trop là…
La main de Mina resta crispée.
– Mais si, allez, réfléchis ! Et ce livre qui serait inspiré de l’histoire de l’arrière-grand-mère ?
– Franchement ? Ça n’a pas de sens…
La main de Mina se desserra.
– Tu crois vraiment que trois femmes pourraient disparaître comme ça sans enquête ? reprit Joe, Que la dernière serait enfermée dans un ancien asile à quelques kilomètres seulement de son village et que personne ne se serait rendu compte que les lieux étaient habités ?
– Peut-être qu’elle était ailleurs et qu’ils viennent seulement de revenir ? La maison avait l’air sale.
– Je ne sais pas, mais ce n’est pas la seule chose incohérente. Comme par hasard, il a des plans ? Dit-elle en baissant le son de sa voix. Genre il a une arrière-grand-mère, une grand-mère et une mère qui disparaissent, et il reprend gentiment la boutique ? Je sais pas moi j’aurais ameuté la terre entière.
– Peut-être qu’il l’a fait on ne sait pas, dit Mina en continuant d’avancer. Laurent tout va bien ? demanda-t-elle en haussant la voix pour que Joe se rende compte qu’il était juste devant elles.
– Oui mais je vous voyais plus, j’ai cru que vous vous étiez perdues. On est arrivé.
Sur le côté se trouvait une échelle qui remontait à la surface. Une échelle neuve. Pas fixée dans la pierre comme à l’entrée par le puits. Une échelle achetée récemment dans une boutique de bricolage.
– Et on est où là ? demanda Joe suspicieuse.
– Normalement on arrive dans le parc. C’est un ancien puits. Mais avec l’arrivée de l’eau courante il a été condamné.
– Il n’a pas l’air condamné, reprit Mina. Elle sort d’où cette échelle ?
Laurent réfléchit un moment, puis haussa les épaules et monta par l’échelle. Les amies de moins en moins rassurées se regardèrent.
– On fait quoi ? demanda Mina à voix basse, on le suit ?
– Je ne sais pas, j’avoue je ne suis pas rassurée.
– Quelle idée de suivre un type qu’on ne connait pas dans un tunnel souterrain en pleine nuit ! On aurait dû se faire un resto et regarder un film, s’énerva Mina.
Joe eut un grand sourire, signe qu’elle avait une idée.
– Non mais c’est pas possible, tu n’es jamais contente ! Dit-elle en haussant le ton et en regardant par le trou. Puis elle fit un clin d’œil.
Mina et Joe se connaissaient depuis tellement d’années, elles avaient tellement partagé de films de livres et de séries ensemble que Mina compris immédiatement. Elle continua de fait à s’énerver en haussant elle aussi le ton.
– Tu sais quoi, j’en ai marre de ces sottises. Je patauge dans de l’eau dégoûtante depuis tout à l’heure, on a passé la journée à chercher je ne sais pas quoi ! Je – veux – des – vacances ! Je rentre !! Débrouille-toi toute seule.
Mina rendit son clin d’œil à Joe et montra son téléphone. En texte elle avait écrit. « J’appelle la police ? Et je me renseigne ? »
Joe hocha la tête.
– Et bien vas-y part ! Moi je vais aider Laurent à retrouver sa mère !
Et Joe monta à l’échelle pendant que Mina repartait en courant dans la direction opposée.
– Où est votre amie ? demanda Laurent.
– Mina ? dit Joe, feignant l’agacement. Elle est bien trop pleutre pour se joindre à nous. Depuis le début des vacances, elle ne fait que se plaindre, elle est partie et nous n’avons pas besoin d’elle. Où est-ce que l’on se trouve déjà, demanda Joe pour détourner l’attention de Laurent.
– Dans le parc, lui répondit-il d’un air lointain. Il existe une porte de service près des cuisines, on devrait pouvoir accéder à la bâtisse principale.
– Comment savez-vous cela, c’est également sur votre plan ?
– Non, dit-il sans développer.
Joe continua de le suivre, en silence. Elle pensait à Mina.
Ils arrivèrent au niveau de la porte de service qui s’avérait réellement ouverte. Cela en était trop pour Joe, qui s’arrêta net et exigea de Laurent des explications. « Je ne comprends pas comment vous avez pu avoir toutes ces informations, je ne comprends pas vos motivations, vos humeurs changeantes. Je sais que vous me cachez des choses, et cette fois-ci je vous somme de me donner des explications.»

Ah bien joué, je ne m’attendais pas à ce genre de suspicion ! Ya des maîtresses en suspens dans cette équipe ^^
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On est jeudi, le dernier chapitre paraît demain, et je ne vois pas comment sauver la femme au KWay rose… vivement demain !
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