Quand il en suffit d’un (Partie 1)

Quand il en suffit d’un (Partie 1)

Le 17 octobre donc, j’arrête la pilule. Une semaine de règles, et on est partis pour le protocole décidé. En pleines vacances de la Toussaint chez ma maman. Première galère : nous devons faire 400km, avec 5 boites de traitement censées rester au frais. Manifestement, octobre n’est plus la saison pour trouver des glacières… nous tombons d’accord sur un sac isotherme de compet’, le blindons de pains de glace, et surveillons la température. Ouf, nous arrivons avec l’ensemble sans encombres, mais je me serais bien passé de cette petite pression pour commencer…

Crédit photo : image personnelle de Monsieur Loup préparant le Menopur sous l’oeil attentif de la Lueur

Un protocole en famille

Chaque soir, entre 17h30 et 21h, Monsieur Loup me pique. On fait ça au milieu du salon, pendant que chacun est à ses occupations. Ma maman s’inquiète de ce que je suis censée manger ou pas durant le traitement, mes enfants nous tournent autour. La Lueur lève mon t-shirt, le Lampion va chercher la compresse pour désinfecter la peau. On leur a expliqué tout ce qui se passait. Nous lisons très souvent ensemble le livre « le parcours de Paulo« , mes enfants savent donc, biologiquement, comment on fabrique un bébé. Nous leur avons expliqué en quoi c’était différent chez nous et dans le livre. On utilise les mots du livre pour leur expliquer :

« Tu vois, les Paulo de papa, ils sont dans des tubes, au frigo de l’hôpital. Ils sont tous là. Ils attendent. Mais ils ne peuvent pas nager comme le Paulo du livre ! Alors on va prendre un Paulo, et le mettre directement dans l’œuf. Et pour être sûr que ça réussisse, il faut que je fabrique plein d’œufs. Des petites bulles, en fait, qu’on va faire grossir grossir, puis on va les enlever de mon ventre, mettre un Paulo dans chaque bulle, et puis quand il y aura la bonne division cellulaire (l’image est dans le livre), on remettra l’oeuf dans le ventre de maman et on espérera que ça devienne un bébé ! »

Crédit photo : images personnelles des livres utilisés pour parler bébé avec mes enfants.

Nous rentrons de nos vacances le vendredi soir car, samedi matin, j’ai ma première écho pour vérifier que tout pousse bien. « On va regarder tes bulles maman? » – « Oui oui, chaton, tu restes avec papa, je reviens vite. »

Ca n’est pas si simple…

L’infirmière qui me pique me dit « ah ! moi aussi je m’appelle Marie ! C’est bien, les Marie. Il en faut une dans sa vie. » Je suis d’accord, mais je suis parti pris. On rigole, on discute. C’est détente. J’attends une heure mon rendez-vous. Pas grave, je m’occupe… La sage-femme fait le point. Elle passe la sonde, et je vois mon uterus sur l’écran face à moi. « Votre endomètre s’épaissit bien, ça a l’air pas mal » (si y a un truc dont je suis sûre après toutes ces années d’auscultations internes, c’est que « mon endomètre est parfait » et mon utérus aussi…). Elle compte les follicules de mon ovaire droit. Il y en a un de 10 mm, et 5 ou 6 autres trop petits. L’ovaire gauche nous donne du mal, comme toujours. 4 petites taches apparaissent, trop petites pour être intéressantes. On va continuer les traitements et se voir lundi. Lundi 1er novembre donc, rebelote (autant dire que je n’ai pas trop fait de grasse mat’ ce long week-end là…), à l’heure cette fois. Ça pousse gentiment des deux côtés mais c’est toujours beaucoup trop lent. Je m’en veux, car la veille j’ai oublié de me piquer dans le créneau : il était 22h quand j’ai percuté, et en plus on avait changé d’heure la nuit précédente donc le décalage de piqûre était énorme ! A chaque fois que je rentre de consultation, le Lampion me demande « elles poussent bien tes bulles maman? » ou  » ça y est ils ont mis un Paulo? »

2 jours plus tard, me revoici de bon matin en consultation. Les nouvelles ne sont toujours pas réjouissantes, et j’avoue que je panique. On a poussé la dose au max du traitement, pour avoir le max de follicules et le max de chances. Si les follicules ne poussent pas, à quoi bon tout ce cirque ? Les infirmières sont adorables, je revois Marie plusieurs fois qui me dit « avec un peu de chance je vous vois en bas vendredi ! » En bas, c’est les salles de ponction en anesthésie locale. Mais non. Rien à faire. Ça ne pousse pas. Ce mercredi là, la sage femme me dit : c’est beaucoup trop lent. Le seul follicule apte à être ponctionné est à 18mm, les autres sont loin derrière avec à peine 13 ou 14. Celui là sera sacrifié, on ne ponctionne pas pour un seul ovocyte. Selon le résultat de la prise de sang, vous revenez nous voir vendredi pour une dernière surveillance, ou bien on arrête tout.

Je suis au 36ème dessous, je me sens incapable. J’attends le couperet tout l’après-midi, personne ne m’appelle. Je me rends vendredi à mon rendez-vous. Je me sens nulle, je ne comprends pas comment, pourquoi, qu’est-ce qui prend tant de temps. Je ressors plus déprimée de chaque consultation, ça n’a jamais autant trainé. 15 jours d’injections. 15 jours ! J’ai même dû aller racheter des traitements (et à 400€ la facture pour la sécu, j’aurais vraiment préféré que ce soit bon.) Le vendredi, la sage femme qui s’occupe de moi chaperonne une interne. Elles trouvent mon ovaire gauche sans difficulté. Elles comptent tout scrupuleusement, et décident que c’est bon. On déclenche à l’ovitrelle samedi soir à 21h, et rendez-vous à 7h lundi pour la ponction !

Il en suffit d’un…

Le jour J arrive, je suis shootée à l’Atarax absorbé la veille, à 21h je ronflais. J’arrive à 7h, on est une longue file de femmes à attendre notre tour. Je suis appelée la première. Comme à chaque fois. La chambre, la tenue de star, une voisine, brève discussion, les bruits se calment dans les couloirs, tout le monde est casé. On revient me chercher. La première, toujours la première. Le docteur qui opère me prévient « on va être un peu nombreux, on a de nouveaux internes ».

Crédit photo : image personnelle, le selfie avant de descendre !

Nous sommes donc 5 , dans cette pièce minuscule. L’infirmière passe de la musique, je focalise mon attention sur mon rythme cardiaque mesuré à l’écran. Je « joue » à le ralentir. On y va. Anesthésie, puis images de mon utérus. Les follicules font de grosses bulles noires. « l’espace entre 2 points jaunes madame, c’est 10mm ». Ah oui, énormes. Ça a bien poussé. L’aiguille absorbe ce qu’elle peut, le médecin ne s’acharne pas à gauche sur le follicule restant, trop petit, on n’y trouvera rien.

Je remonte en chambre, le docteur et son interne passeront 3h après. « On a eu 3 ovocytes, rendez-vous samedi pour le transfert » – « le papa pourra être là ? » – « oui, nous sommes soulagés de ça, les papas peuvent à nouveau assister au transfert ». J’écoute à peine. Tout mon esprit est focalisé sur ce ridicule petit chiffre.

3 ovocytes.

3.

C’est tout ?

7 commentaires sur “Quand il en suffit d’un (Partie 1)

    1. Oh oui, c’était long, et le résultat décevant quand on a « l’habitude » d’avoir plus d ovocytes avec un traitement moins fort… Comme l’avait dit la gynéco a la précède fiv « ça ne s’explique pas, c’est la nature, la loterie… » Mon poids, mon âge, le bon dosage, le bon moment… Il y a un équilibre à atteindre qui change sans cesse, j’imagine…

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  1. Oh ma belle … je suis de l’autre côté moi … côté ponction … on sait que vous vivez des choses compliquées mais on a pas vraiment le temps d’en parler avec vous … je suis heureuse de lire ton témoignage et suivrait la suite avec intérêt 😊 Je souhaite que la suite soit positive, de tout cœur ! Et meme que 3 ovocytes ça peut être les bons 😉! Belle journée 🫂

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    1. Donc toi tu preleves ? Je pense qu’on a conscience que vous voyez passer une tapée de femmes qui n’esperent qu’une chose : que cette fois, cette fois pitié, ça marche ! Moi j’aime qu’on m’explique tout et qu’on me parle mais j’ai croisé aussi beaucoup de femmes qui préféraient se couper au max de toute explication médicale. En tous cas, j’ai apprécié la considération, qu’on me parle, qu’on me dise ce qu’on me fait, que « attention ça va être froid mais je vais mettre de l’eau là », et le fou rire qui s’en suit « je vous assure qu’on ne la laisse pas au frigo hein, elle est a température ambiante mais comme le corps est chaud, le choc n’est pas très agréable… ». J’ai aimé la musique, les voies basses, la sensation d’intimité même a 5 dans une mini pièce. J’aime le « bonjour madame » du manipulateur de l’autre côté de la vitre, qui va prendre soin de mes gamètes. Bref, ya pas de solutions miracles, mais tout ce qui est fait sans violence et avec considération est doux dans ce genre de parcours sur médicalisé…

      En tous cas, oui, 3 ça peut être bien, vu « qu’il en suffit d’un » … Tu liras la suite la semaine prochaine 😉

      Aimé par 1 personne

      1. Oui je suis une des infirmières qui aident le médecin à prélever vos si précieux ovocytes au bloc 🙂 J’adore prendre le temps d’expliquer, choisir une musique pour la dame, faire en sorte que l’ambiance soit détendue, mais parfois, selon les chirurgiens, le moment, ça peut être plus compliqué ^^. Mais notre eau à nous vient d’un réchaud, elle est à 38, moins de choc, au moins pour cette partie là ^^. Moi ce qui me fait le plus mal c’est de voir passer le même nom plusieurs fois … j’ai vu passer la même dame plus de 6 fois, elle tombait toujours sur moi la pauvre, elle m’a tellement touché… Avoir des enfants ne devrait pas être si difficile … mais je suis heureuse de savoir que nos petits gestes peuvent rendre tout ce parcours moins difficile 😔🙂

        Aimé par 2 personnes

  2. Ça doit être super déconcertant d’avoir deux FIV si différentes !
    je n’en ai qu’une et je me suis fait tellement traité de « bonne pondeuse » que je n’imagine pas comment j’aurais réagi face à l’inverse… Mais bon c’est vrai qu’à la fin un seul bon suffit 😉

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    1. Oui, clairement c’est perturbant… En plus on avait comme projet de donner les embryons excédentaires, et moi je voulais donner mes ovocytes… Mais là c’est sur, je ne pourrais pas vu que je réagis manifestement de moins en moins…

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