Toi qui n’existes que dans mes rêves

Toi qui n’existes que dans mes rêves

Étrange, très étrange même, ce que notre cerveau peut nous projeter lorsqu’on dort.

J’ai, il me semble, toujours souhaité avoir des enfants.

C’est très cliché, mais lorsque j’étais petite, je m’amusais beaucoup à jouer seule à la mariée, envolée dans de grands draps pour faire une longue traîne. En guise d’époux, j’embrassais mon reflet dans le miroir. Et ensuite, mes peluches, mes poupées devenaient mes enfants.

J’ai grandi, je me suis réellement mariée, et j’ai fait un bébé. Rien ne s’est passé comme je l’imaginais petite pour sa naissance. Mais malgré les difficultés que nous rencontrions, mon post-partum dévastateur, j’ai très vite voulu un autre enfant. J’en ai fait un autre. Et je me suis jurée que ça serait le dernier.

Je déteste la grossesse. Cette période où le corps humain crée une autre vie est pour moi un amas de stress et d’anxiété, enrobé d’angoisse permanente qui m’empêche de savourer cet instant un peu hors du temps. À chaque fois, j’ai compté les semaines, les jours restants. Je savais exactement où j’en étais dans ma grossesse. Parce que la ligne d’arrivée me semblait tellement loin que c’était ma façon de me canaliser.

Lorsque mon fils est né, je suis restée sûre de moi. Je ne voulais pas d’autres enfants. Passée la période nouveau-né, on a enchaîné avec une période délicate qui n’a fait que renforcer ce sentiment. Je ne me sentais pas la force de revivre tout cela encore une fois. Et cette angoisse permanente…

En devenant maman, je n’ai plus jamais réussi à bien dormir. Pas simplement à cause du sommeil défaillant de mes enfants, mais aussi parce que cette peur viscérale pour eux ne me quittera plus jamais. Mon dévouement à la chair de ma chair est tel que même quand je dors, je ne pense qu’à eux. Ma fille et mon fils. Mais pas qu’eux.

Quand je m’endors, les barrières se relâchent, et mon cœur s’exprime.

Un autre enfant ? Pourquoi pas ? Après tout, tu l’as fait 2 fois, tu peux le refaire. Tiens, tu reprendrais bien un peu de cette sensation incroyable quand tu prends ton bébé tout frais dans tes bras pour ses premières nuits ! Tu reprendrais bien aussi un peu de cette explosion d’amour de voir ton plus grand bébé rencontrer le plus petit. Tu le sais qu’au fond de toi, ce petit troisième, si tu es très honnête, tu aimerais qu’il devienne réalité. Au-delà du rêve.

Photo personnelle

Ajouter un autre petit être exceptionnel dans ta vie, et voir l’amour des premiers se décupler, entendre encore plus de rires de joie, voir encore plus de câlins fraternels.

Mais mes yeux finissent toujours par s’ouvrir à nouveau. Retour dans la vraie vie, la vraie réalité.

Une vie, dans un monde où on laisse de moins en moins de place aux enfants, de temps aussi. Un monde de moins en moins adapté pour eux, où on ne veut pas les laisser être des enfants mais en faire de minis adultes. Un monde où l’altruisme, l’aide de son prochain existent de moins en moins.

Et puis il y a la réalité du quotidien aussi. Il ne faut pas se leurrer : j’élève deux enfants aux besoins spécifiques, et ça demande beaucoup d’énergie, de temps, et d’argent. Je ne vois pas comment je trouverais la place de m’occuper d’un 3ème, surtout s’il était lui aussi à besoins particuliers.

Alors, même si mon cœur voudrait, ma raison me parle plus que jamais. Je n’aurai pas d’autre enfant.

Je suis déjà chanceuse d’en avoir deux. Je les aime et les aide à grandir comme je peux.

Crédits photo : Amandine Gimenez

Ce 3ème enfant tant rêvé et désiré continuera de vivre durant mes nuits, dans mes rêves. Je ne connaîtrai jamais son visage sûrement, mais son existence n’en sera pas moins réelle. Je saurai me contenter de le retrouver et le cajoler seulement dans mes rêves.

2 commentaires sur “Toi qui n’existes que dans mes rêves

  1. Oh… j’aime beaucoup ce que tu écris là… mon expérience de la maternité est différente (j’adorerais accoucher encore une fois et revivre une grossesse malgré la fatigue qu’elles m’occasionnent), mais je me retrouve dans ton petit troisième rêvé, qui pour moi est un.e quatrième dont je n’arrive pas encore à faire le deuil de la venue (au bout de 3 ans pourtant)…J’aime beaucoup ta dernière phrase « son existence n’en sera pas moins réelle » (et voilà, je pleure maintenant 😅). Merci pour ton témoignage.

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  2. J’ai découvert (par surprise) que finalement je ne m’épanouissais pas tant que ca dans la maternité. Alors pour moi pas de deuil du petit 3ème. Je suis süre de ne pas vouloir repasser par les cases maternités, bébé, enfance… J’ai hâte qu’ils grandissent et que notre relation soit plus équilibrée.

    Par contre je te comprends car je me suis souvent demandée ce qu’il se serait passé dans des circonstances différentes. Et si j’avais fait cette fac d’histoire ? Et si j’avais fait cet erasmus en Amérique du sud ? Et si j’étais devenu prof ou j’avais eu le courage de créér ce business qui me trotte dans la tête… ? Ca m’occupe beaucoup la nuit !

    Je te souhaite de beaux rêves avec ce joli bébé (ou peut être est ce déjà un jeune enfant!).

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