Celle qui se sentait complète

Celle qui se sentait complète

Dès le départ, il avait été très clair pour mon mari et moi que nous n’aurions pas qu’un seul enfant si la nature nous le permettait. Il est fils unique, moi non, nous connaissons les avantages et inconvénients des deux situations. Quel était le bon nombre pour nous ? J’aime à penser que la vie a parlé pour nous. Nous nous sommes rencontrés alors que nous n’étions déjà plus si jeunes, alors le chiffre de deux nous a toujours paru idéal. 

Nous avons été les bons derniers de notre groupe d’amis et de proches à nous marier et à avoir des enfants. C’est donc bien préparés que nous nous sommes lancés dans la grande aventure de la parentalité. Malgré toute notre préparation, la vie de jeunes parents n’a pas toujours été un long fleuve tranquille, bien au contraire.

Aussi, et alors qu’il avait été facile de se lancer pour une première grossesse, en envisager une seconde a été bien plus compliqué. Mon mari et moi, nous n’étions pas totalement en phase sur notre envie de second enfant. Chez moi le désir était viscéral malgré la peur que notre couple n’y survive pas cette fois-ci. Pour mon mari, c’était le pragmatisme qui dominait. Les conditions matérielles d’accueil étaient particulièrement défavorables et notre couple avait été mis à mal par l’arrivée de notre aînée. Difficile dans ces conditions de se projeter dans une nouvelle organisation familiale. Et pourtant, nous avons toujours désiré et évoqué ce quatrième membre dans notre famille, comme si nous ne pouvions être complets sans lui. 

Cette seconde grossesse a été simple comme une évidence. Une grossesse désirée mais non planifiée, sereine malgré les petits tracas. Une grossesse pendant laquelle j’ai eu une confiance totale dans la vie. Depuis le test positif, je n’ai eu aucun doute sur l’issue de cette grossesse, j’étais certaine que tout se passerait bien. Cela peut paraître un peu présomptueux, mais la vie m’avait fait une nouvelle fois un merveilleux cadeau, il me fallait le savourer. Dans ma tête et mon cœur, je savais déjà que cette grossesse serait la dernière.

Crédit photos : Regina_zulauf

Comme si les planètes étaient alignées, toutes les sources d’angoisses se sont unes à unes écartées du chemin menant à la naissance de notre cadette. Une fin de grossesse toute douce, un accouchement plus que parfait, des premières semaines idylliques, bien loin de mon premier post-partum angoissant.

Et puis, je ne te l’apprends pas, mais un méchant virus est passé par là et a un peu bouleversé l’ordre établi. Je ne te cache pas que j’ai assez mal vécu le premier confinement qui me volait ces premiers moments avec mon bébé. Il m’a fallu faire le deuil de ce que je m’étais imaginé pour mon congé maternité, et ce deuil était d’autant plus difficile à faire que je savais qu’il n’y aurait pas d’autre grossesse. Et puis, les mois ont passé, j’ai repris le travail différemment, ma vie s’est organisée autour de mes deux filles. Et avec le recul, je dois avouer que l’on en a quand même tiré quelques bénéfices. Bien sûr c’était très différent de ce que je m’étais imaginé, mais cela fait aussi partie des surprises de la vie non ?

Alors voilà, alors que nous nous rapprochons doucement du premier anniversaire de notre cadette, je tire un trait sur la grossesse, sur ce bidon rond que j’ai tant aimé, sur ces petits et moins petit coups dans mon ventre qui remplissaient mon cœur de joie (moins quand ils me réveillaient en pleine nuit). Et surtout, je tire un trait définitif sur la période nouveau né. Je crois que cela me paraît d’autant plus facile que cette période de la toute petite enfance n’est clairement pas celle que je préfère. A mesure qu’elle s’éloigne, je commence à entrevoir la relation naissante de mes deux filles et cela me réchauffe le cœur de savoir qu’elles seront là l’une pour l’autre, si différentes et pourtant si complémentaires.

Sœurs fratrie filles bonheur
Crédit photo : Jessebridgewater

A la naissance de ma cadette, une amie très chère à mon cœur m’a écrit « qu’elle avait trouvé sa place dans notre famille, très naturellement, tout en douceur et simplicité ». Je n’aurais sans doute pas pu mieux décrire la sensation que j’ai au fond de moi.

Aujourd’hui, je me sens complète, j’ai une famille heureuse et en bonne santé. Peut-être pas la famille de mes rêves d’enfants, qui il faut bien l’avouer étaient sans doute un peu naïfs, mais une famille que j’aime profondément et qui me comble de bonheur au delà de ce que j’aurais pu imaginer. Et rien que pour cela, cette année 2020 n’en aura été que plus spéciale.

6 commentaires sur “Celle qui se sentait complète

  1. C’est beau ce sentiment de complétude. Et de savoir avec sérénité que c’est la fin et le début des dernières premières fois. Je te souhaite une belle belle route avec tes deux louloutes et ton mari. Je ne sais pas si je ressentirai un jour ce sentiment tant j’ai une très très forte envie d’encore. Si ça ne tenait qu’à moi, on aurait 4 ou 5 enfants. Mais je ne suis pas sûre que mon mari me suive jusque là 🙂😉.

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  2. C’est drôle de lire comment on peut arriver aux mêmes conclusions avec des situations assez différentes. Depuis que j’ai lu ton article, j’ai beaucoup réfléchi sur cette histoire de se sentir complète. Je ne m’étais jamais posée la question comme ça, et je me demande même si je peux appliquer ça à ma situation sachant que je ne me suis jamais sentie pas complète…
    Tu le sais, ici aussi notre deuxième sera le dernier. Mais cette décision est plutôt venue du fait que je me sens comme en butée. J’ai l’impression d’avoir tout donné, surtout en grossesse (4 quand même !), et je n’ai plus aucune envie de soumettre mon corps à tout ça. C’est peut être un peu égoïste et j’avoue ne pas avoir laissé le choix à mon mari, mais il me semblait vital de savoir reconnaître ses limites ! J’imagine que la conséquence en est que ma famille est au complet et complète je l’espère XD

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    1. Je comprends tout à fait ce dont tu parles. Moi aussi j’ai l’impression d’avoir tout donné dans mes deux grossesses (et pourtant je n’en ai eu que deux). J’ai envie que mon corps soit de nouveau le mien à 100%. Je ne pense pas que ce soit égoïste, c’est bien normal de se fixer une limite. Ma prochaine étape c’est la contraception définitive, je tournerai définitivement cette page de ma vie.

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  3. Très bel article. Sobre et complet. Merci bcp. Ca m’aide a mettre des mots dur mon ressenti.
    Je comprends totalement ce que tu décris sur différents points : l’envie viscérale d’avoir un 2ème et l’apaisement, le sentiment d’être au complet. Pour ma part, l’envie d’agrandir la famille a débuté aux 6mois de ma 1ère… il m’a fallu attendre 6autres mois pour avoir le « oui » de monsieur…et merci la vie, bébé était aussi pressé que moi de nous rejoindre. Je suis tombée enceinte le 1er mois. Une 2ème fille. Ma grossesse n’a pas été idyllique, mobbing au boulot, burnout… l’arrivée de ma 2ème a chamboulé notre vie de famille et de couple, mais aussi et surtout a achevé nos nuits. Une catastrophe. C’est pourtant le confinement qui nous a rapprochés tous et qui, je le sens au fond de moi, a permis à ma cadette de s’apaiser la nuit et faire de très gros progrès moteur et enfin de décrocher la marche à ses 18mois, été 2020. A peine ce fut le cas, que nous nous sommes sentis prêts à accueillir une 3ème vie. Mon bébé est prévu pour fin du printemps 2021. C’est ma grossesse idyllique, parfaite. C’est aussi ma dernière grossesse et je la savoure. Je nous sens et nous sais déjà au complet. C’est un tel apaisement.

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