Une relation toxique, du rêve au cauchemar (Partie II)

Une relation toxique, du rêve au cauchemar (Partie II)

Je t’ai raconté dans la première partie de mon récit les débuts idylliques de ma relation toxique. Voici aujourd’hui comment elle s’est poursuivie… et terminée.

couple amour nuit

Crédit photo (creative commons) : susan-lu4esm

La chute

Comme je le mentionnais dans l’article précédent, l’homme que j’avais rencontré était très aimant, très attentionné et rassurant. Il trouvait toujours les mots justes pour me donner confiance en moi, me montrer mes qualités et criait son amour pour moi sur tous les toits. Mais petit à petit, et c’est plus facile de m’en rendre compte maintenant avec le recul, il changeait un peu. Il avait toujours eu un côté taquin : mais de plus en plus, il faisait des remarques sur le ton de la rigolade ou des blagues un peu vexantes, qu’on soit seuls tous les deux ou avec d’autres personnes. Quand je lui en parlais, il s’excusait, il ne voulait pas me blesser, j’en venais à me dire que le problème venait de moi car j’étais trop susceptible. Il était tellement parfait par ailleurs que je ne mesurais pas le problème de ce trait de caractère. Pas plus que son côté ronchon, à certains moments il pouvait râler sur tout et rien (mais pas sur moi) pendant plusieurs heures et rien ne pouvait le dérider. C’était pesant, mais une fois encore, j’étais habituée à ce trait de personnalité qui se retrouve dans beaucoup de membres de ma famille (oui, moi aussi).

Un jour, nous regardions ensemble quelque chose sur son téléphone et un compte mail s’est affiché sur l’écran, portant deux prénoms de garçon et son propre nom de famille. J’ai demandé naïvement qui ils étaient, il m’a répondu qu’il s’agissait des enfants de son cousin « B » dont il était très proche auparavant, il avait gardé cet e-mail qu’ils avaient créé pour des jeux en ligne par nostalgie, car depuis, son cousin avait divorcé et les voyait très peu. Le même jour, il m’a avoué que son père (décédé l’année précédente) était alcoolique et le battait. Je me suis surprise à ce moment-là à penser que, quand même, cela faisait beaucoup de malheurs pour la même personne : j’ai eu un léger doute pour la première fois, que j’ai vite balayé et dont j’ai même eu honte.

Quelques semaines plus tard, j’ai repensé à cette conversation, et sans trop savoir pourquoi j’ai cherché le cousin « B » en question sur Facebook. Et là, sur la photo de profil, il y avait deux enfants mais il s’agissait d’un garçon et une fille. De fil en aiguille, je suis tombée sur le profil du père de mon compagnon qui, à ma grande surprise, était toujours actualisé. Pas de doute possible sur un éventuel homonyme, il y avait une photo de famille avec mon conjoint qui tenait un enfant dans les bras. Ça m’a fait un choc ; mais je me suis raisonnée assez vite en me disant que ça pouvait être n’importe quel enfant de la famille. Néanmoins, je lui ai demandé de me confirmer le prénom de son père, et là premier doute : il m’a dit un autre prénom. J’ai également reparlé de son cousin « B », et là aussi, il m’a dit un autre prénom ! J’ai commencé à avoir de gros doutes mais je ne m’attendais pas à l’importance de ce que j’allais découvrir.

Tu l’as peut-être déjà deviné, mais les deux garçons en question étaient en réalité… ses propres enfants. Il m’a expliqué que leur mère les avait emmenés à l’étranger, et qu’elle avait coupé le contact et qu’il les avait donc perdus définitivement. Il préférait ne pas parler d’eux quand il faisait de nouvelles rencontres, pour ne pas voir dans les yeux des gens de la pitié ou du jugement… Il préférait donc dire qu’il n’avait pas d’enfants, ce qu’il m’avait dit dès notre première discussion, lorsque nous étions à des kilomètres d’imaginer que nous finirions par former un couple. Depuis, il n’avait pas osé rétablir la vérité de peur que je le quitte. Concernant son père, il n’était pas mort mais ils étaient totalement brouillés. C’était en réalité son parrain, qui avait été un réel soutien pour lui, qui était décédé l’année précédente dans les mêmes conditions qu’il m’avait racontées.

Pendant deux jours après ma découverte, nous avons beaucoup parlé et beaucoup d’attitudes et de choses qu’il m’avait dites ont pris sens. J’étais extrêmement choquée par ma découverte, surtout par le fait que nous avions abordé le sujet des enfants et que j’avais du mal à accepter le fait qu’il comptait ne rien me dire et que j’aurais cru découvrir ce bonheur avec lui alors qu’il l’avait déjà vécu deux fois… De plus, au vu de son parcours si douloureux, je ne pouvais pas imaginer que rien n’aurait ressurgi en tenant un nouveau-né dans ses bras et je m’imaginais, jeune accouchée, à vivre mon propre chamboulement intérieur sans rien comprendre des réactions de mon partenaire de vie.

Cette chute de 40 étages, j’ai ressenti le besoin de la partager avec plusieurs personnes de mon entourage et notamment mes parents. À ce moment-là, j’étais vraiment perdue sur la suite des évènements : j’aimais mon conjoint et je « comprenais » pourquoi il m’avait menti. Cependant, j’ai le mensonge en horreur, et, quelque part, j’avais un sentiment de « c’est tout de même un peu gros ». Ce doute a été renforcé par le fait que, trois jours après ma découverte, Monsieur m’a annoncé qu’il ne voulait désormais plus parler du passé, que c’était trop douloureux pour lui, et que l’unique solution pour avancer était de reprendre notre vie telle qu’elle était, et tiens, si nous achetions un canapé ? Cette réaction m’a énormément surprise, et un peu freinée. J’estimais assez légitime d’avoir besoin de temps pour digérer les choses et de poser des questions pour en savoir un peu plus sur tout cet aspect de sa vie qu’il m’avait caché. J’ai essayé de lui expliquer, mais à partir de ce moment, il est resté campé sur ses positions.

Le début du cauchemar

Cette réaction n’augurait rien de bon et m’a poussé à continuer à fouiller pour savoir s’il m’avait dit la vérité. Je pourrais certainement me reconvertir en détective privé (n’hésite pas, chère lectrice, si tu as besoin de mes services) car j’ai pu rassembler énormément d’informations avec mes recherches. J’ai eu assez vite de gros doutes sur la localisation de ses enfants. J’ai découvert d’autres mensonges à propos de sa famille et de son passé. J’ai pris peur évidemment, mais à côté de ça il restait toujours le même ! Prévenant, attentionné, amoureux… Après réflexion, j’ai décidé de lui parler et de lui proposer un compromis : j’acceptais de ne pas tout savoir de son passé et de ne plus poser de questions pour le moment, s’il pouvait me prouver que le présent et l’avenir avec lui étaient fiables. Mes questions étaient simples bien qu’assez intrusives : me prouver son emploi actuel, sa santé financière, et me présenter son amie qui était veuve, dont j’avais beaucoup entendu parler mais dont je ne trouvais aucune trace, pas plus que du décès de son mari. Peut-être imagines-tu la réponse : il a d’abord accepté l’idée, mais au vu de mes demandes, s’est braqué et m’a annoncé qu’il se sentait rabaissé et qu’il valait donc mieux envisager une séparation, puisque je n’étais pas capable de lui faire confiance. Bien sûr, cela m’a fait énormément souffrir, et je me suis résignée à cette séparation puisque de toute façon, avec tant de zones d’ombre, il était impossible de construire un avenir ensemble.

Néanmoins, il n’est pas parti, et je n’y étais de toute façon pas prête. J’étais dans un brouillard épais dont je sortais progressivement. Les semaines qui ont suivi ont été assez douloureuses parce que je l’aimais, je savais qu’il allait énormément me manquer, mais je savais qu’il allait devoir quitter ma vie. J’ai commencé à détecter de petits mensonges dans la vie quotidienne, ma psychologue m’a parlé de « maladie » et de « mode de fonctionnement ». Je me suis renseignée sur la mythomanie, en comprenant qu’il ne le faisait pas forcément exprès, et en ayant du mal à croire qu’on pouvait mentir autant et sur n’importe quel sujet. J’ai pris des distances avec lui, physiques déjà, chose qu’il ne comprenait pas du tout et qu’il a commencé à me reprocher. S’en sont suivies des tentatives de culpabilisation de sa part qui ont eu pour effet de m’éloigner encore plus. Ceci étant alterné avec des phases où il avait de nouveau le projet de partir, j’ai lâchement attendu que ce moment arrive pour ne pas avoir à prendre la décision moi-même. J’avais continué à fouiller, à trouver des informations et à lui distiller avec parcimonie (car j’avais peur de ses réactions au vu de ce que j’avais pu lire sur la mythomanie) pour avoir des explications, jusqu’à me rendre compte que le problème n’était pas de savoir ce qui s’était exactement passé, mais que je ne pouvais le croire sur rien ! J’avais la certitude désormais que ses enfants étaient tout près, mais quand je lui en ai parlé, il a persisté dans son mensonge. Évidemment, j’étais très inquiète sur les raisons qui faisaient qu’il n’avait pas la garde de ses enfants ! Je me suis tout imaginé, et je n’ai toujours pas la réponse. J’ai eu beaucoup de mal à accepter qu’il n’était pas la personne que je croyais connaître.

Le cauchemar

À force de me voir m’éloigner, et certainement en comprenant que ses tentatives de culpabilisation ne fonctionnaient pas, il m’a annoncé que la séparation était la seule solution et qu’il cherchait donc un appartement. Quelque part, j’ai été soulagée de cette annonce. Il a fait ses recherches devant moi, m’a annoncé des visites puis qu’il avait une réponse positive pour obtenir un logement quelques semaines plus tard. En parallèle, il a commencé à avoir des accès de colère, notamment quand je lui ai dit que j’avais annoncé à mes parents notre séparation. À ce moment, il a mis toutes ses affaires (il n’y en avait pas beaucoup…) dans des sacs, prêt à partir sur le champ. Je suis restée stupéfaite, en comprenant à ce moment que soit il comptait vraiment partir de cette façon et donc me faire souffrir, soit c’était du bluff… pour me faire souffrir aussi. La deuxième proposition était la bonne, et à ce moment j’ai vraiment pris la mesure de ses mensonges… Il était capable de mentir même sur ses émotions. En quelques jours, la situation a dégénéré, avec des messages très virulents de sa part jusqu’à l’accès de colère de trop où j’ai eu l’intuition que la prochaine fois, cela pourrait être beaucoup plus grave. En effet, il semblait totalement hors de lui parce que je ne réagissais pas. J’ai pris peur : il fallait vraiment que je le fasse partir au plus vite ! J’ai tenté de lui annoncer ma décision par message, et là son comportement a complètement changé, avec des supplications, des mots d’amour, qui m’ont finalement encore plus effrayée… Étant plus que déterminée, j’ai réussi à le faire partir le soir même en étant accompagnée de proches. Ce moment a été extrêmement traumatisant pour moi et j’en fais encore des cauchemars.

Et aujourd’hui ?

Tout cela est arrivé très récemment et il me faut encore du temps pour digérer tous ces évènements. En à peine quelques semaines, je suis passée du rêve absolu, du sentiment que j’avais trouvé la personne avec qui j’allais tout construire et finir ma vie, au cauchemar, à la peur, au manque de lui malgré tout (ou plutôt de l’image que je m’en faisais), à l’incompréhension de ces comportements. Cela soulève également de nombreuses questions sur les raisons qui ont fait que j’ai vécu cela.

Mais je garde cela pour plus tard, je te raconterai ce qui s’est passé à la suite de cette séparation brutale dans un prochain article.

8 commentaires sur “Une relation toxique, du rêve au cauchemar (Partie II)

  1. Bravo à toi d’avoir réussi à le mettre dehors, je comprends que cela ait du être traumatisant. Tu as eu beaucoup d’intuition et de talent pour tes recherches. Il y a incontestablement de la mythomanie mais une bonne dose de manipulation aussi. C’était un vrai phénomène ! penses tu qu’il existe un moyen pour prévenir ses potentielles prochaines victimes ? D’avoir publier cet article y contribue en tous les cas !

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    1. Merci beaucoup pour ton commentaire ! En effet il n’y a pas que de la mythomanie chez lui (d’ailleurs, d’après mes lectures, les personnes mythomanes ont tendance à fuir dès qu’elles sont découvertes, ce qu’il n’a pas fait) mais beaucoup de manipulation voire de la perversion. Je n’ai pas encore tout compris à son mode de fonctionnement et je crois que je ne comprendrai jamais parce que justement, il n’y a rien à comprendre. C’était pour moi très important de publier cet article même si sa visibilité reste limitée pour aider les personnes qui ont été, sont ou seront dans la même situation que moi. J’aimerais pouvoir prévenir ses prochaines victimes, lui mettre une étiquette où je ne sais quoi mais malheureusement c’est très compliqué…

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  2. Franchement, je ne vois pas à quel moment tu aurais pu te douter de quelque chose. A part l’aspect exclusif de son côté dans la première partie de ton récit, je n’ai tiqué sur quasiment rien. Pourquoi est-ce que ce serait forcément ta faute si tu as vécu cette expérience ? Hâte de lire la suite car, vraiment, je ne vois pas où quoi et comment tu arrives à culpabiliser vis-à-vis de quelqu’un qui est tout simplement malade.
    En revanche, sachant qu’il sait où j’habite, je me demande si je n’aurais pas déménagé au cas où …. parano que je suis 😉

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    1. Merci pour ton commentaire, en effet de plus en plus je travaille sur cet aspect-là, du fait que ce n’est pas de ma faute. Pour le déménagement, je l’aurais fait si j’en avais eu la possibilité mais pour diverses raisons un peu trop longues et personnelles à expliquer aussi ce n’était pas possible. Je te laisserai découvrir ce qui s’est passé ensuite dans quelques jours mais tu comprendras qu’il aurait en effet mieux valu.

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  3. On te suis « au quotidien » et cette aventure va mettre du temps à te laisser sereine… Bravo pour ce 2eme récit, qu’elle spirale infernale… Tu as fait une sacrée enquête, et en effet eu une sacrée intuition, bravo de Ten être rendu compte « si vite ». Ça te semble dur aujourd’hui, mais imagine ce que ça aurait donné si ça avait fait « tilt » dans 5 ans ? 😬

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    1. Merci 🙂 ça me fait en effet froid dans le dos d’y repenser, j’ai d’ailleurs eu un peu de mal avec la publication de la première partie car c’est compliqué de repenser à quand tout allait « bien ». Et bien sûr, il y a maintenant une part de soulagement de penser à tout ce à quoi j’ai échappé en me rendant compte si rapidement de tous les problèmes (même si je ne me doutais pas encore de tout quand je l’ai fait partir)

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  4. J’en reviens toujours pas de cette manipulation… Je te trouve tellement forte et courageuse d’arriver à prendre déjà du recul, et d’arriver à en parler aussi bien, de la façon la plus neutre possible. Tu as affronté une sacrée tornade, et je crois aussi que tu t’es rendue compte très vite des mensonges, ça aurait pu aller beaucoup plus loin, longtemps…

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    1. Merci beaucoup pour ton commentaire 🙂 Je ne sais pas si je suis particulièrement forte et courageuse, j’ai des moments où je vois tout en noir… Ce qui m’a aidée je crois c’est que j’ai laissé du temps entre le moment où je me suis dit « il va devoir partir » et le moment où je l’ai fait. J’étais ainsi sûre de ma décision et campée sur mes positions, ça m’a aidé pour l’après car j’avais déjà commencé à prendre du recul justement. Je pense souvent à ses autres victimes, passées et futures et toutes les conséquences que ça peut avoir…

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