Gastronomie d’expatriée

Gastronomie d’expatriée

Je ne sais pas si c’est la culture française ou si c’est une question que toutes les nationalités posent à un expatrié, mais tous ( et je dis bien tous !) les gens qui apprennent que nous vivons en Suède nous posent cette question : et alors, les Suédois, ils mangent quoi ? Je vais donc tenter de répondre à cette question, et même de te raconter ce que c’est que de manger à l’étranger quand on est française.

Petite histoire de la cuisine suédoise

Le principal problème quand on parle de la cuisine suédoise, c’est le manque d’ingrédients. Quand il gèle la majorité de l’année dans la majorité du pays, c’est difficile de faire pousser quoi que ce soit. Fruits des bois, champignons, racines, choux et céréales sont les ingrédients traditionnels, auxquels on peut rajouter poissons, crustacés et gibiers. Tout ça fait donc une cuisine rustique et terre à terre: on cuisine avec ce qu’on a, et ce n’est pas toujours savoureux. Un des produits phares de la « gastronomie » suédoise, c’est les kötbullar (boulettes de viande) ; et c’est assez représentatif de la pauvreté du terroir. On prend de la viande hachée (souvent un mélange de porc et de boeuf) que l’on épice (pour cacher un peu la misère) et qu’on fait cuire longtemps sur le feu (pour bien tuer tous les microbes). C’est plutôt bon quand c’est bien fait, mais ce n’est pas riche en saveurs.

La révolution gastronomique: le melting pot

Au cours du 20e siècle, la table suédoise a commencé à s’ouvrir aux autres influences. Dans les années 60, la pizza s’est largement démocratisée, et aujourd’hui, le fredagstaco (taco du vendredi) est de mise. Les meilleurs restaurants de ma ville sont asiatiques : les Suédois adorent voyager en Asie du Sud-Est, ce qui a créé un véritable engouement pour cette cuisine.

Depuis le début des années 2000, la gastronomie suédoise s’est démocratisée et modernisée grâce à ses nombreux chefs, qui gagnent de plus en plus de renom. Ils ont adapté leurs procédés, remis au goût du jour les légumes anciens, et prônent une proximité entre la table et les ingrédients. Cette volonté éco-responsable rend la nouvelle cuisine suédoise de plus en plus créative.

Mais du coup, qu’est-ce qu’ils mangent?

Bon, c’est bien gentil cette petite lecon d’histoire, mais qu’est-ce que ça donne au quotidien alors, la cuisine suédoise ? Eh bien, la tradition d’ingrédients « rustiques » est bien restée : l’alimentation de base des Suédois reste les légumes secs et les céréales, des produits laitiers fermentés, des charcuteries fumées, poissons salés et des soupes pour tenir chaud en hiver (et bien utiliser tous les légumes-racines comme ils les appellent : carottes, panais…)

J’ai déjà évoqué les kötbullars, gros succès pour les suédois de 3 à 83 ans. Et les pizzas, qui sont bien loin de la tradition italienne puisqu’elles sont souvent agrémentées de viande kebab, de béarnaise, ou, mon exemple préféré pour choquer tout le monde : pizza banane-jambon-ananas-curry (essayée une fois, plus jamais). En fait, la vie culinaire suédoise est truffée de traditions familiales : le jeudi, c’est soupe de petits pois-pancakes. Le vendredi, c’est tacos et des bonbons. Chaque pâtisserie a son jour dédiée : les kanelbullar (brioche à la canelle) le 04 octobre, les semla (brioche fourrée à la crème et pâte d’amande) pour Mardi gras. Le repas de Noël est toujours le même (jambon, gratin de patates et d’anchois, et strömming).

Les semla, pâtisseries à la pâte d’amande
Photo : Susanne Walström/imagebank.sweden.se

Je pourrais faire tout un article sur les poissons marinés dans leur jus, qui sont caractéristiques des saveurs nordiques. Le sürstromming, ce hareng fermenté à l’odeur inimitable, issu d’une méthode de conservation unique, est ressorti pour toutes les grandes occasions. Mais c’est un aliment exceptionnel, qui ne fait pas l’unanimité pour les palais scandinaves. La crevette (dans des sandwichs ouverts de pain noir) et l’écrevisse, en revanche, sont très prisées et en abondance. Au mois d’août, il y a des grandes tablées qui s’installent, où tout le monde peut s’assoir et partager les écrevisses tout juste pêchées des rivières (même si c’est de moins en moins possible malheureusement).

Les Kalix löjrom, oeufs de corégone, sur un toast
Credits: Magnus Carlsson/imagebank.sweden.se

À part ces quelques particularités, nous mangeons globalement la même chose en Suède qu’ici. Enfin, à quelques exceptions près, mais ces exceptions font toute la différence.

Manger français en Suède

En tant que française, il y a trois choses qui sont essentielles au quotidien : le pain, le fromage, et le vin. Cliché, bien évidemment, mais très vrai.

Le pain n’est pas trop un problème. Même si trouver une vraie baguette est difficile, leur remplacement est assez simple. Comme il n’existe pas de boulangerie (ce qui se rapproche le plus serait un salon de thé), la majorité des pains et pâtisseries disponibles s’achètent au supermarché, mais au moins c’est frais de la journée.

Pour les fromages, c’est un autre problème. Les quelques fromages français qui sont dans les rayons des supermarchés sont de toute évidence faits pour l’export et ne sont que de pâles ersatz de nos camemberts et chèvres. Pour avoir une sélection plus large et meilleure, il faut se tourner vers les spécialistes. Des fromageries « gourmet », avec un choix plus large mais un prix en conséquence. Et c’est en vivant loin des supermarchés français que je me suis rendue compte de l’importance du fromage dans la façon dont je mange et je cuisine. Au-delà du plateau de fromage qui me coûte un bras si je décide d’en avoir un pour quelques jours, ma façon de cuisiner incorpore beaucoup de fromage. Impossible de mettre la main sur un reblochon pour une tartiflette, par exemple. Et le seul fromage râpé disponible est un étrange mix de plusieurs fromages (pas de gruyère !). Il a fallu donc tester, adapter et parfois se résigner.

Credits: Tina Stafrén/imagebank.sweden.se

Le vin

En bonne française, j’aime profiter d’un verre de vin avec mon repas. Mais (et attention je repars un peu dans une leçon d’histoire), l’alcool et la Suède ont une drôle de relation. Face à un alcoholisme très fort, dans les années 50, le gouvernement suédois décide de frapper fort : il fonde SystemBolaget pour réguler la consommation de sa population. Systemet (comme l’appellent affectueusement les suédois) c’est un magasin appartenant à l’Etat, et qui a le seul monopole de l’alcool à plus de 3%. Vins, bières, alcools forts, champagnes ne sont disponibles que là. Le choix est généralement très large, et tu peux même demander à ton System de commander une bouteille d’un alcool que tu veux (dans la mesure du raisonnable). Mais du coup, impossible de s’acheter un pack de 6 le soir au supermarché: il faut prévoir ! Systemet a donc ce rôle paradoxal de vendre de l’alcool, tout en limitant la consommation d’alcool. Ce qui donne des « pubs » pour le magasin qui ressemblent à celles de la sécurité routière: « Boire, c’est mal. Venez acheter de l’alcool ».

On peut dire que cette tactique a marché : aujourd’hui, boire est très peu généralisé chez les Suédois. Un verre de vin à midi et mes collègues me regardent bizarrement. Bien sûr, ils ne sont pas les derniers, pendant les fêtes et soirées, à s’envoyer snaps sur snaps ; mais dans la vie de tous les jours, c’est très rare, voire parfois mal vu, de boire comme si de rien n’était.

J’espère que ce tour d’horizon de la gastronomie suédoise t’as donné faim, et que tu comprendras mieux les différents plats accessibles à Ikea maintenant !

4 commentaires sur “Gastronomie d’expatriée

    1. Tu passes par Malmö ?
      Si tu veux manger suédois, je te conseille bullen/två krogare au centre ville. J’aime aussi beaucoup spoonery. Si tu es aisé, ou si c’est un midi (environ 12€), tu peux passer à kitchen and table ou en plus de très bien manger, tu auras une superbe vue du haut de Malmö live.
      A västra hamnen, je te conseille les glaces à Baritalia.

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  1. Super intéressant cet article ! Pour l’alcool j’avais en effet pu découvrir ce système en Finlande et en Islande et c’est très étrange. Sans parler des coûts exhorbitants ! Mais concrètement, es-tu limitée dans les quantités que tu achètes où peux-tu quand même prévoir assez si tu organises une grosse fête ?

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