La gratitude

La gratitude

Il y a quelques semaines, notre famille s’est agrandie et Paul et moi avons accueilli notre quatrième enfant. Depuis ce jour là, je retourne les mots dans tous les sens pour raconter cet accouchement loin de ce que j’avais imaginé, et je n’y arrive pas.

Alors, avant de te livrer un récit de naissance option tout est bien qui finit bien, je voudrais exprimer mon immense gratitude.

Lors de la naissance de notre troisième enfant, nous habitions encore en région parisienne, et j’ai accouché dans la grosse maternité de ma ville. Entre l’absence d’accompagnement et la révision utérine à vif, je suis contente d’avoir mené à bien mon projet d’accouchement sans péridurale, mais je garde un souvenir très mitigé de la naissance, et il m’a fallu du temps pour me remettre du traumatisme de la révision sans anesthésie.

Lorsque je me suis inscrite à la maternité pour cette grossesse ci, j’ai donc raconté mon histoire, celle d’un geste médical très douloureux posé sans aucun respect de la patiente, et de l’absence totale d’accompagnement ou d’explication a posteriori.

Merci à Clémence, la sage-femme, et à l’étudiante sage-femme, présentes ce jour-là en consultation, pour l’ouverture de mon dossier et qui ont pris le temps de m’écouter, de me rassurer et de noter en rouge dans mon dossier que je préférais une anesthésie générale plutôt qu’une révision utérine à vif si la situation devait se représenter.

Merci à Marion, sage-femme présente pendant une bonne partie du travail, qui a pris le relai pour me masser le dos et m’encourager lorsque mon mari a dû retourner travailler, prêt à revenir en vitesse si le travail s’accélérait.

Merci d’avoir su me rassurer, et m’accompagner avec douceur vers une naissance plus médicalisée lorsque le travail a commencé à prendre une tournure inquiétante.

Merci aux anesthésistes et à Claire, la gynécologue de garde ce soir là d’avoir tout fait pour que nous restions hyper sereins alors qu’eux-mêmes se tenaient prêts à intervenir.

Merci à Chloé, l’aide soignante présente tout au long de l’accouchement, qui indiquait discrètement chaque contraction à l’anesthésiste pour qu’il la laisse passer tranquillement avant de revenir et de continuer à poser la péri.

Merci une fois de plus à Clémence, présente en salle de naissance ce soir là, qui, une fois la naissance passée, a vu mon inquiétude et m’a dit « je connais votre dossier, nous sommes prêts, je vous promets que ça ne recommencera pas ».

Je n’ai pas accouché comme je l’imaginais. Rien n’a ressemblé à ce dont je rêvais, mais la douceur, la délicatesse et l’attention de l’équipe médicale présente ce jour-là et pendant toute ma grossesse ont dépassé de loin ce que je pouvais envisager.

Sans doute que ce bébé est le dernier que je mets au monde, après tout quatre enfants c’est déjà pas mal, ce qui est sûr en tous cas c’est que sa naissance haute en couleurs m’a permis de me remettre en mémoire que l’hôpital pouvait aussi être un lieu dans lequel on se sent bien et où on est pris en compte.

Je travaille au quotidien avec des agents de la fonction publique hospitalière, pour la plupart en souffrance. Je vois bien combien leur métier et leurs conditions de travail peuvent être durs et les broyer. Pourtant il s’est passé quelque chose ce jour là dans cette salle de naissance qui tient lieu du havre de paix.

Sans doute que Marion, Clémence, Claire, Chloé et tous les autres sont rentrés chez eux harassés après une garde ce jour là, mais leur passage fugace dans ma vie a laissé une vraie empreinte. Et si mon accouchement n’est pas celui dont j’avais rêvé, j’en garde un sentiment de gratitude et de douceur, sans doute grâce à elles.