Eux deux
Je me souviens encore de la réaction de Schtroumpfette face à l’assistante sociale qui lors de l’agrément lui a posé la question suivante : « et si on te dit que ce n’est pas vraiment ton petit frère ou ta petite sœur ? » Schtroumpfette s’était indignée très spontanément. Et la suite a prouvé que ce n’était pas simplement des mots pour elle.
Elle a suivi toute la procédure, nous demandant régulièrement des nouvelles, s’intéressant à la normalité adoptive (les traumas d’un enfant adopté, les réactions qu’il peut avoir, la manière dont il faut agir avec lui…)
Complices
Dès le premier jour, Schtroumpfette a réussi à créer une vraie complicité avec son petit frère. Et celle-ci ne s’est pas démentie depuis, avec son lot de bonnes choses, et de petits tracas.
Il s’en souvient encore : ils ont joué à la balle, puis aux petites voitures, puis fait des bulles. Il a de suite été très proche d’elle. Elle lui lisait des histoires, jouait avec lui, dessinait avec lui, lui montrait des petits jeux qui l’ont émerveillé et enchanté : s’écrire sur les mains, faire tenir un ballon gonflable au plafond après l’avoir frotté sur les cheveux…
Au début, nous n’empêchions aucun contact entre eux. Mais nous avons malheureusement dû y avoir recours. En effet, Pirlouit a vite compris que Schtroumpfette était « cool » car elle ne grondait jamais et avait toujours du temps à lui consacrer, contrairement à son papa et moi qui étions plus exigeants et parfois moins disponibles (difficile de jouer avec lui pendant qu’on prépare le repas !) Bref, nous jouions notre rôle de parents. Il allait donc plus facilement dans ses bras et souvent s’y réfugiait quand il avait fait une bêtise, comme pour se protéger de nous. Nous avons donc demandé à Schtroumpfette de ne plus lui faire de câlins et de ne plus le prendre dans ses bras. Elle pouvait toujours jouer avec lui, dessiner, se promener avec nous mais sans aller plus loin. Elle l’a très bien compris et accepté, car on lui avait expliqué que cela pouvait arriver avant que Pirlouit nous rejoigne. Cette situation a duré environ 1 mois et demi, juste le temps pour Pirlouit de créer un attachement avec M. Chéridamour et moi, et comprenne le rôle de chacun.

Depuis, les choses sont revenues à la normale et cela ne pose aucun souci qu’ils se fassent de gros câlins. Leur complicité n’en a absolument pas été affectée.
Des séparations difficiles
Il a été compliqué pour Pirlouit de comprendre que sa grande sœur n’est pas avec nous en continu. La première séparation, 2 jours après notre retour en France, a été un vrai déchirement. Pleurs et colère s’en sont suivis. La suivante a été difficile également. Puis les choses se sont calées. Pirlouit a compris que Schtroumpfette repartait chez sa maman (il l’a accompagnée une fois pour bien visualiser) et qu’elle n’était pas toujours présente chez nous.
Le plus difficile sur le long terme, ce sont plutôt les retours impromptus pour quelques heures ou une nuit. En effet, notre maison étant en centre ville et non à la campagne comme celle de sa maman, Schtroumpfette a tendance à revenir régulièrement quand elle finit ses cours plus tôt, qu’elle a prévu de se retrouver en ville avec les copines ou qu’elle souhaite sortir le soir. Difficile alors pour Pirlouit d’accepter que son passage chez nous n’est que temporaire et court.
Il est également compliqué de lui faire comprendre qu’il doit laisser sa grande sœur tranquille dans sa chambre et ne pas aller la déranger quand elle invite des copines ou qu’elle est au téléphone. Et lui apprendre à frapper à la porte avant de rentrer dans sa chambre.
Heureusement, il s’y est fait petit à petit. Certainement parce que les relations avec nous se sont apaisées. Nous avons également mis en place des stratégies pour que les transitions soient plus souples et faciles à vivre pour Pirlouit : lui proposer un bain au moment où sa sœur repart chez sa maman, un jeu quand elle s’en va retrouver des copines… Dans le même temps, il est toujours content de son retour mais il n’est plus aussi excité ou collé à elle car il a compris qu’elle revenait toujours.
12 ans d’écart
Cet écart d’âge me questionne et m’inquiète. Schtroumpfette et Pirlouit ne vivront finalement que peu ensemble. Dans quelques mois, elle va en effet à la fac, loin de notre ville. Et lorsqu’elle rentrera le week-end, son passage sera éclair.
Quelle relation vont-ils construire avec le temps ? N’ayant pas vécu ensemble longtemps, leur lien restera-t-il fort ? Auront-ils des choses à partager, des souvenirs communs assez nombreux ?
Au final, Pirlouit va être élevé presque comme un enfant unique. J’espère néanmoins qu’il resteront proches. J’ai 7 ans d’écart avec ma propre sœur et malgré ça et malgré la distance (elle vit dans un autre pays) nous sommes restées proches. J’espère qu’il en sera de même avec eux.
Cette grande différence d’âge a aussi quelques avantages. Nous n’avons aucune inquiétude quand Pirlouit est avec Schtroumpfette. Elle nous a réclamé assez vite de pouvoir aller le chercher seule à l’école, d’aller se promener en ville avec lui. Je n’ai pas voulu avant que l’attachement soit bien là et que je sente Pirlouit prêt. C’est arrivé 1 an après notre rencontre. Par contre, nous avons commencé à profiter de sorties en amoureux avec M. Chéridamour 9 mois après que Pirlouit soit arrivé : nous le couchions et attendions qu’il dorme, puis Schtroumpfette faisait du baby-sitting (sachant que Pirlouit ne se réveille jamais la 1ere partie de la nuit).
Schtroumpfette est aussi assez grande pour défendre son petit frère, lui apprendre les astuces pour obtenir quelque chose et faire en sorte que nous soyons un peu plus souples avec lui (« allez, donnez-lui un autre chocolat quoi, c’est Pâques ! »)
Ils jouent souvent ensemble dans la chambre de Schtroumpfette, et il n’est pas rare de voir ensuite Pirlouit le sourire jusqu’aux oreilles et ayant soit un secret (une carte préparée pour l’anniversaire de son papa, pour envoyer à papy et mamie…) ou encore les avant-bras tout tatoués au stylo ! Et Schtroumpfette est toujours fière de pouvoir transmettre ses livres, ses peluches ou ses jeux à son petit frère.
En attendant, nous faisons tout pour leur créer de beaux souvenirs en famille. Cet été, nous ferons certainement nos seules vacances tous ensemble, Schtroumpfette quittant bientôt le nid. Et je continue avec bonheur d’entendre les « petit frère » et « grande sœur » fuser à la maison, petits mots tendres que l’on sent remplis d’amour.
OMG à quel moment Schtroumpfette a-t-elle suffisamment grandi pour aller à la fac en septembre ??????? 😉 pardon, c’était la minute « que le temps passe vite ! »
Quant à l’attachement entre eux d’eux, j’ai assisté à ce type de « phénomène » avec ma fille et son cousin par alliance (le fils de la copine de mon frère). Elle ne le voit que quatre ou cinq fois par an mais ça fait 6 ans qu’elle lui accorde une totale adoration. Elle apprécie ses autres cousins mais, lui, c’est différent. Je ne sais pas pourquoi, à quoi c’est dû et il est d’une patience à toute épreuve avec elle. J’ai appelé ça le coup de foudre d’amour familial 😉 Nous intervenons assez souvent pour qu’il puisse faire ses trucs d’ado cinq minutes mais elle est toujours après lui et lui ne la rejette jamais. À voir effectivement ce que ça donnera dans le temps mais je ne vois pas pourquoi l’affection ne perdurerait pas, après tout, même si Schtroumpfette ne fait que passer à l’avenir, elle le fera régulièrement et fera donc régulièrement partie de son quotidien, et elle sera d’autant plus dispo pour lui que ce seront de courts laps de temps.
Ton article m’interroge sur un tout autre point, je comprendrai que tu ne répondes pas : si Pirlouit a eu l’occasion de visualiser le côté « maman de Schtroumpfette », c’est que « l’ex » est aussi impliquée. Et franchement, je trouve ça top car ça signifie qu’il est accepté vraiment par toutes les composantes de sa famille, même celle qui pourrait être « hostile » de par l’histoire parentale. Est-ce seulement ton compagnon qui a « briefé » son ex ou as-tu été impliquée ? Comment l’as-tu vécu ?
Désolée pour les multiples guillemets mais l’objectif est vraiment de ne heurter personne sur cette question possiblement très délicate.
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En fait, la maman a été impliquée naturellement sans qu’on en discute avec elle. La première fois qu’elle est venue récupérer Schtroumpfette à la maison, elle a vu Pirlouit et on lui a dit qui c’était. Et un jour où on a ramenée Schtroumpfette chez sa maman, Schtroumpfette lui a montré la maison et sa chambre (elle avait fait pareil pour ses petits frères du côté de sa maman chez nous). Là encore ça s’est fait de façon impromptue et sans prise de tête. Ça s’est arrêté là. Les petits frères de Schtroumpfette ont également d’eux même fait un dessin à Pirlouit, ce que j’ai trouvé vraiment attendrissant.
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Chaque relation dans la fratrie est unique donc il est difficile de faire des généralités mais il est tout à fait possible et probable que malgré l’écart d’âge et de « vie », leur relation reste belle et proche. J’ai une amie d’enfance qui a un petit frère de 13 ans de moins et à mes yeux ils sont toujours restés très proches (bien plus que mon frère et moi qui n’avons que 4 ans d’écart). La complicité et les souvenirs sont différents que ceux d’une fratrie d’âge proche qui vit l’enfance ensemble mais ils ont aussi beaucoup de choses à partager, et c’est même une belle chance pour ton fils d’avoir une soeur déjà grande avec une « expérience de la vie » à lui partager. 🙂
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Je vois également le côté positif avec Schtroumpfette qui est plus grande ! Vraiment ça fait énormément de bien à Pirlouit, et la complicité qu’il a avec elle est très belle à voir. C’est une réflexion que je me suis faite d’ailleurs, le fait que les familles ayant déjà des enfants ne sont souvent pas choisies pour adopter en France alors que les fratries apportent beaucoup !
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Tout d’abord, j’ai toujours autant de bonheur à lire les chroniques de votre vie de famille depuis ces quelques années 🙂 Et je voulais dire que la photo est magnifique, tout en pudeur, mais on devine un magnifique garçon ^^
Ensuite, je souhaite témoigner pour l’écart d’âge dans la fratrie, car j’ai justement 12 ans de plus que ma soeur. Nous sommes quatre enfants, trois grands, rapprochés et la dernière, née quand nous avions 10, 12 et 14 ans. J’ai adoré m’occuper de ma soeur quand elle était petite. On disait de moi que j’étais une deuxième maman. Je me rappelle vers ses 4 ans, prendre le car avec elle (nous étions à la campagne), pour aller en ville passer l’après-midi toutes les deux.
J’ai quitté la maison à 18 ans, elle en avait 6. Et j’ai rencontré celui qui deviendrait mon mari quelques mois après. J’étais forcément moins présente et disponible pour elle. Je suis même partie pour mes études à 6h de route, ne rentrant que pour Noël et les vacances d’avril. Mais Elle est venue passer une semaine dans mon studio, seule avec moi, vers ses 9 ans. Et je lui écrivais très régulièrement (whatsapp n’existait pas encore !), une lettre par mois.
Notre complicité est toujours restée. Aujourd’hui, j’ai 34 ans, elle 22. Elle est une super tata pour mes enfants, et nous continuons d’avoir une relation privilégiée. Elle sait que je suis disponible pour elle. Nous avons passé des heures au téléphone quand elle était était au plus bas. Nous avons notre complicité, nos films doudou…
Elle m’a avoué que le plus difficile est quand je suis devenue maman. Car elle serait moins prioritaire dans ma vie. Et c’est vrai que l’ordre des choses a été bousculé. Mais je suis heureuse de voir que dans le temps, l’écart d’âge n’a pas empêché de cultiver une belle relation.
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Merci pour ce témoignage ! C’est une belle relation entre soeurs. J’espère vraiment que Pirlouit et Schtroumpfette en auront une aussi enrichissante.
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