Ces êtres extraordinaires

Ces êtres extraordinaires

Aujourd’hui, je souhaite introduire un sujet qui me tiens énormément à cœur. Je vais te parler des spécificités de mes enfants qui sont atteints de ce qu’on appelle des troubles du neurodéveloppement (TND). C’est un sujet assez vaste que je vais essayer d’expliquer le plus simplement possible au travers de plusieurs articles tournant autour de notre quotidien avec nos enfants.

Image par Mimzy de Pixabay

Le neuro-atypisme

Si je te dis TDAH, TDL, Troubles DYS, TSA, ces acronymes te parlent peut-être. Ce sont tous des troubles du neurodéveloppement dont sont atteints les personnes neuro-atypiques. Le neuro-atypisme concerne les personnes dont les façons de penser, de percevoir le monde et de se comporter diffèrent de la majorité et de la norme sociétale. Ces personnes ne sont pas malades stricto sensu mais présentent des variations de fonctionnement du cerveau humain.

Il existe autant de TND différents que de personnes atteintes, à des degrés plus ou moins marqués. C’est une condition dont on ne guérit pas, on apprend juste à vivre au mieux avec. Si je devais faire une analogie, je comparerais au fait d’être gaucher ou droitier. En tant que gauchère, j’ai appris à vivre dans un monde majoritairement droitier, en m’adaptant quand cela était possible. Pour autant, il y a des choses que malgré tout mon bon vouloir, je n’arriverai jamais à faire (utiliser un ouvre-boite par exemple).

Pour les neuro-atypiques, c’est la même chose. Ils sont en permanence en réflexion sur comment fonctionne le monde et comment s’y adapter le mieux possible. Aujourd’hui, il y a une bien meilleure connaissance du sujet et une sensibilisation accrue de la population. Les recherches ont énormément progressé sur le sujet ces 20 dernières années et les études ont montré que plus les troubles étaient détectés tôt, mieux on pouvait aider les personnes. Les grilles de repérages et de diagnostics se sont affinées, les professionnels de santé sont eux aussi mieux formés, ce qui donne l’impression qu’il y a en ce moment une épidémie d’enfants neuro-atypiques. Cette impression est d’autant plus amplifiée par les médias et les réseaux sociaux qui ont trouvé là une belle source pour attirer les gens. Internet regorge ainsi d’une foultitude de tests d’autodiagnostics pour savoir si son enfant est neuro-atypique, et une part de parents s’y fie sans chercher plus loin. Ce n’est pourtant pas aussi simple de décréter que son enfant a un trouble.

Le parcours médical

Avant d’arriver à un véritable diagnostic, il est nécessaire de passer de nombreux bilans. En prenant l’exemple de Petit Koala, son parcours a commencé quand elle avait 2 ans. Elle en a aujourd’hui 6 et on y est encore. Cela te donne un aperçu. Mais pourquoi est-ce aussi long ?

Déjà, avant d’aller investiguer au niveau du fonctionnement cérébral, il faut s’assurer que le décalage observé chez l’enfant par rapport aux autres enfants de son âge ne résulte pas d’un problème organique. Exemple : ma fille a mis longtemps à parler. Aujourd’hui, nous savons que c’était lié à son TND, mais 4 ans en arrière, on ne pouvait pas en être sûrs car cela pouvait également venir d’un problème auditif masqué. Il a donc fallu d’abord faire un dépistage et un suivi en ORL, associé à une rééducation en orthophonie et des bilans réguliers pour affirmer qu’elle avait un trouble du langage.

Image par Mimzy de Pixabay

Ensuite au niveau du comportement, là aussi il faut d’abord s’assurer qu’il ne s’agit pas juste d’un enfant de nature calme/agitée et qui traverse une phase tout à fait normale de développement de l’enfant. Exemple : ton enfant se met à hurler au milieu du magasin parce que tu as refusé d’acheter un paquet de bonbons, c’est relou mais ça fait partie de l’apprentissage de la frustration. Cependant si ce genre de réaction arrive tout le temps pour tout et n’importe quoi et qu’avec le temps (on parle de minimum 6 mois) il n’y a pas d’amélioration, on peut se poser des questions.

Une fois que plusieurs cases de dépistage sont cochées, il faut passer des bilans. Ces bilans sont calibrés, ce qui veut dire qu’ils doivent être passés à un âge précis dans des conditions précises et faits par des professionnels formés.

Après les bilans, le médecin qui suit l’enfant doit tous les compiler et les analyser avant de formuler son diagnostic. Des thérapies et des adaptations sont alors proposées pour aider l’enfant, et dans les cas les plus marqués une médication peut même être proposée.

Le dépistage

Comme je le disais plus haut, aujourd’hui les professionnels sont de plus en plus formés. En tant que parents, il arrive que parfois certaines choses ne nous marquent pas. Ce sont alors les encadrants (instituteurs, crèches, nourrices) qui vont constater des choses et nous le remonter. Il est important de les spécifier au médecin qui suit l’enfant au moment des visites de suivi. En effet de son côté, il relève certaines choses de ses différents interrogatoires de suivi, et ces choses, il ne nous les partagent pas forcément s’il ne les juge pas pertinentes sur le moment. Ce n’est pas la présence d’un point d’appel qui est inquiétant en soit, c’est la fréquence et répétition de ce point d’appel et la concomitance avec d’autres points d’appels, et ce dans des milieux différents.

Parfois ce sera l’inverse, l’enfant sera très démonstratif avec ses parents, et très peu à l’extérieur. C’est le cas de ma fille et j’appelle ça la technique du caméléon. Aussi, si c’est particulièrement difficile à la maison, il est important de le dire au médecin également. Oui nos enfants nous aiment et nous testent continuellement, mais si la vie en devient cauchemardesque sur une longue période, ce n’est pas normal.

Il faut aussi savoir que plusieurs TND peuvent cohabiter : un enfant ayant un trouble du langage peut aussi avoir un TDAH, un enfant ayant un TDAH peut aussi avoir un TSA.

Avoir un enfant neuro-atypique est épuisant autant physiquement que mentalement. Mais ce sont des enfants exceptionnels une fois qu’on a compris comment ils fonctionnent. Il est important d’interagir avec eux avec beaucoup de bienveillance mais aussi de fermeté. Je t’en parle plus en détails la prochaine fois.

5 commentaires sur “Ces êtres extraordinaires

  1. Je comprends à quel point le parcours pour obtenir un diagnostique peut être long et compliqué, pour les parents et pour l’enfant. Je suis toujours très admiratives de voir quelles ressources d’énergie, de patience et de plannification peuvent avoir les familles.

    Juste une petite remarque, ta dernière phrase marche avec la plupart des enfants au final. Ils ont tous besoin de bienveillance et de fermeté. Je pense surtout que les petites erreurs parentales sont plus facilement accepté par les enfants sans TND.

    Je suis curieuse de savoir quelle accueil/retour/aide tu as eu des professionnels de la petite enfance tu as recu durant ton parcours de diagnostique. Certains sont très aidant mais d’autres m’ont l’air de penser que les parents s’inquiètent toujours trop (« donnez du temps au temps, ca va s’arranger ») ou que les problèmes des enfants sont de la faute des parents uniquement. (Oui, je n’ai pas toujours rencontré les bonnes personnes.)

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    1. Bonjour Laura,

      Désolé pour cette réponse tardive (pas facile de se trouver un créneau de libre).

      Tu as parfaitement raison, ma conclusion est valable pour tous les enfants, la nuance est surement que sans TND on ressent peut être moins cette impression parfois de brasser du vent.

      Pour ta question concernant les professionnels de la petite enfance, disons que j’ai eu des retours hétéroclites. L’assistante maternelle de mes enfants a tendance a vouloir nous surprotéger puisqu’elle a elle même des enfants atteints de TND. Au début de la prise en charge de ma fille ça a été assez compliqué parce qu’elle n’y voyait vraiment pas la nécessité et l’urgence. A l’école aussi, même si les signes commencent de plus en plus à se voir, on est confronté a une sorte de refus de nous écouter/croire de l’équipe enseignante, qui a le don justement de nous agacer. Par contre je dois dire que pour l’accompagnement médical, on est super bien entouré et on a toujours été pris au sérieux lorsqu’on exprimait une inquiétude. Je me sens vraiment chanceuse parce que je sais pour avoir discuté avec d’autres parents que ce n’est pas toujours le cas.

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  2. C’esr vrai que ces diagnostics prennent du temps à être posés… Et c’est parfois difficile de voir soi-même la différence de notre enfant je trouve, parce qu’on s’habitue aux choses pénibles aussi ! Ma fille a aussi un trouble du langage et d’autres problèmes de développement (le tout lié à une cause génétique qui a pu être identifiée, ce qui facilite grandement le diagnostic et la surveillance des autres problèmes qu’on sait que sa mutation peut aussi causer ; ça doit être encore plus compliqué sans ça je suppose), et entre 2 et 5 ans elle a fait une sorte de terrible two continu, elle partait dans des colères que rien ne calmait pour des trucs anodins (genre on lui donne sa cuillère alors qu’elle voulait la prendre elle-même). Et à force, surtout quand on n’a pas d’autres enfants pour comparer, c’est juste la norme, on s’adapte tellement que ce n’est que maintenant qu’elle parle mieux et a arrêté de s’énerver si facilement que je réalise que c’était probablement lié à son incapacité à dire les choses. Mais sur le moment, on est dedans, et les gens (même les médecins parfois) tendent à minimiser un peu, du coup on se dit qu’on se fait des idées (voire qu’on n’est pas très compétent) assez vite…

    Sinon elle est extraordinaire en effet, je ne sais pas si ta fille fait pareil mais je suis toujours impressionnée par sa capacité de contourner ce qu’elle n’arrive pas à dire et à utiliser des analogies ! Longtemps, ma fille a utilisé le mot « ni » (nuit) pour désigner la nuit bien sûr, mais aussi tout ce qui était noir (c’est la nouvelle couleur officielle de mes cheveux depuis), et la lune (qu’on voit la nuit je suppose…). Pareil avec « po » qui désignait les portes, et tout ce qui part. Ça demande quand même de l’inventivité quand on y pense 🙂

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    1. Oui c’est vrai, tu as raison, avec le temps, on finit pas s’habituer. Je me souviens qu’à une époque pour moi quand ma fille ne se réveillait que 3 fois la nuit, je disais que j’avais passé une bonne nuit. Aujourd’hui avec le recul je me trouve folle de pas avoir penser aux troubles du sommeil plus tôt. Et comme tu dis, quand c’est le premier, l’absence de repères est difficile à gérer.

      aaahhh oui, on a eu la phase des mots qui n’ont aucun rapport pour etablir la communication quand ça s’est débloqué. Par exemple pour Mickey (son doudou) elle disait « éko », et pour voiture, elle disait « tahi ». Ils sont pleins de ressources ces petits!

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  3. Merci pour partager tout ça. Je me permets de conseiller la lecture d’un livre très intéressant…  » La fabrique des enfant anormaux  » de Thierry Delcourt.

    « La maîtresse dit que mon fils n’est pas normal, qu’il a un handicap. » « Votre enfant est hyperactif. Il perturbe la classe. Il a besoin d’un traitement. » « Il a 4 ans, l’institutrice dit que mon fils travaille mal, qu’il faudrait qu’on lui fasse passer un test de QI » Tous les jours, Thierry Delcourt entend ces « mots qui tuent » de parents désemparés qui doivent faire subir à leur enfant des tests pour détecter un trouble neurodéveloppemental, un handicap, puis les rééduquer et leur prescrire des médicaments. Aux Etats-Unis, le nombre de jeunes concernés avoisine les 20 %. En France, il a augmenté de 300 % en quinze ans. Or, ces enfants ne sont pas handicapés ni anormaux, ils sont seulement anxieux, insécurisés ou en difficulté psychique. Au-delà du scandale que ce livre dénonce, il est une aide aux parents pour lutter contre la stigmatisation de leur enfant. Il s’adresse aussi aux enseignants afin de les aider à trouver des solutions pour que l’enfant fasse de sa différence une force.

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