Ton arrivée au monde

Ton arrivée au monde

Suite à ta naissance « en silence » mais surtout ton manque de tonus et ta pâleur, nous sommes donc transférés à la maternité partenaire de la maison de naissance qui se situe 2 étages au dessus. Ce sont Laurine et Nathalie qui nous accompagnent. Je te tiens contre moi, en peau à peau. Tu dors et tu gémis. Moi, je trouve cela mignon, mais tout le monde me dit que ce n’est pas normal. Au fond de moi, je sens le stress m’envahir, j’ai peur qu’on nous annonce quelque chose de grave.

naissance hypotonique convulsion hypoglycémie
Credit photo : photo personnelle

Les premiers examens

Nous sommes accueillis par une sage-femme, une auxiliaire de puériculture et la pédiatre. Tout va si vite je trouve. Je me sens perdue. On te prend pour te faire des examens et notamment une prise de sang et un test de glycémie. Ton papa ne te lâche pas d’une seconde. Nos sages-femmes transmettent des informations aux équipes de la maternité, et moi, je me sens dépossèdée car ce n’est pas ce qui était prévu. Nous étions sensés être tous les trois dans le lit de la chambre Bulle, à atterir doucement après ta naissance et je me retrouve seule, dans un milieu qui m’angoisse. J’ai accouché il y a moins de 20 ou 30 minutes et j’ai l’impression que c’est comme si ça n’avait pas existé, ou comme si c’était déjà très loin. J’aimerais pourtant qu’on s’occupe de moi, qu’on me bichonne. Mais ce n’est pas possible. Tu es la priorité. Ma priorité. Alors quand ma sage-femme m’amène dans une chambre pour m’installer le temps de l’attente des résultats, et en t’attendant, je ne fais pas attention au fait que je perds encore du sang. Quand je me lève pour passer dans le lit, une mare de sang se dessine au sol. Dans ma tête, je me dis « oh non, pas une hémorragie en plus ». Les sages femmes m’installent donc au lit. Et là, alors que je n’étais pas du tout prête à ça, l’une d’elle m’appuie sur le ventre pour vérifier qu’il n’y a pas de problème. J’hurle. Cette douleur est atroce, insupportable, pire que les contractions. Je ne supporte absolument plus aucune douleur. J’ai besoin uniquement de douceur.

Une souffrance foetale

La pédiatre revient alors pour nous donner les premiers résultats. La prise de sang a révélé que tu as été en détresse fœtale modérée. Elle ne peut cependant pas dire quand. Elle situe ça autour de la naissance mais pas pendant l’accouchement car après débrief avec Nathalie et Laurine, il y a confirmation que l’accouchement s’est bien passé. Elle me dit que c’était peut-être un peu avant, à cause du pré-travail. Mais comme la souffrance fœtale semble être modérée, elle m’explique qu’ils ne feront pas plus d’investigations. Elle ajoute ensuite que tu es en hypoglycémie et qu’il faut donc te donner un lait pour prématuré qui est très riche pour que tu reprennes des forces. Elle m’explique que tu as dû puiser dans tes réserves pour ta naissance si intense et que ça explique l’hypoglycémie. Je crois que c’est à ce moment là que les choses se sont aggravées. Alors que tu étais encore tout endormi dans mes bras, en peau à peau, nous avons essayé de te faire avaler quelques gouttes de lait préma à la seringue pour te rebooster. Sauf que tu n’as eu aucun réflexe de succion. La pédiatre a essayé, ton papa a tenté et l’auxiliaire de puériculture a insisté, mais rien n’y faisait : tu ne tétais pas et n’avalais pas le lait. On nous a alors séparés pour que tu sois revu par la pédiatre. Ton papa est venu avec toi, et moi je suis restée seule avec mes doutes, mes peurs, ma fatigue… Heureusement, c’est à ce moment là que Laurine et Nathalie sont arrivées. Mes rayons de soleil dans cette tempête d’émotions. Je leur ai donné quelques nouvelles, elles ont juste été là, par leur présence rassurante et chaleureuse. Et alors que Nathalie me montrait l’empreinte placentaire qu’elles avaient fait avec ton placenta, la pédiatre est revenue, et je me suis effondrée.

L’incertitude sur la gravité de ton état

Elle m’a parlé comme on parle à quelqu’un à qui on annonce quelque chose de grave, de triste, et qu’on ne veut pas brusquer, traumatiser. J’ai très vite compris quels étaient ses doutes. Elle m’a expliqué que tu n’avais aucun réflexe de succion, et que tu avais fait des mouvements « bizarres » que tu n’aurais pas dû faire – plus tard, des mots seront posés : doutes sur des convulsions. Elle m’a dit qu’à l’inverse, tu n’avais pas certains mouvements, certains réflexes, que tu devrais avoir. Alors, face à ces inquiétudes, tu allais être transféré en néonatalogie notamment pour effectuer le lendemain un EEG (électroencéphalogramme) pour examiner ton activité cérébrale. J’ai fondu en larmes, mais je lui ai aussi dit de me parler avec honnêteté, car je travaille dans un CAMSP (centre d’action médico-sociale précoce), avec ses collègues, et que donc je connais très bien le handicap des enfants. Je lui ai demandé si tu avais fait un AVC, entre autre. Elle n’avait aucune réponse à aucune de mes questions, de mes craintes. Elle ne savait pas, elle ne pouvait qu’émettre certaines hypothèses. C’était horrible pour moi, car j’avais besoin de savoir, de comprendre ce qu’il t’arrivait et vers quoi on allait. Elle m’a juste dit que le SAMU pédiatrique allait arriver pour le transfert vers une néonat lyonnaise, et qu’elle n’était pas certaine que je puisse être moi aussi transférée. Mon monde s’écroulait. Pourquoi tout cela nous arrivait-il ?

Ton réveil en mode jet lag

Alors que je séchais mes larmes, une sage-femme de la maternité est venue me chercher pour te voir, avant ton départ. J’étais anéantie, éteinte et totalement vide. Je suis dans un fauteuil roulant, et avant d’arriver dans la salle d’examen où tu te trouves, j’entends un bébé pleurer (très fort). Au fond de moi, je sais que c’est toi, et que tu pousses ton premier cri. Il est un peu plus de 19h. Tu es né à 15h59, et à 19h, trois heures plus tard, tu t’es réveillé. Je suis accueillie par le sourire et l’enthousiasme de la pédiatre qui me dit que tu vas beaucoup mieux, que tu n’es plus hypotonique, que tu sembles avoir juste eu besoin de temps pour émerger, te remettre de ta venue au monde. Je suis soulagée. J’en pleure de joie. Ton papa qui ne te quitte pas depuis ta naissance remarque que tu cherches à téter. On t’installe alors au sein, et c’est magique. Tu prends le sein comme un chef. De mes trois garçons, tu seras celui qui a su le mieux téter dès le départ. Je suis si fière de toi. Le SAMU arrive alors au même moment. Mon sourire s’efface. J’avais oublié que tu devais être transféré loin de moi. Tout se bouscule dans ma tête. Je pense à tout ce que cela va impacter. Je me fais mille scénario. L’équipe médicale est très professionnelle, ils sont avenants et bienveillants. Le médecin responsable t’examine en silence. J’observe chacune de ses réactions pour essayer de décrypter ce qu’il pense de ton état. Quand il prend la parole, j’ai envie de croire à un miracle. Il dit à sa consoeur que ce bébé semble aller très bien, et que ce serait dommage de prendre une place en néonatalogie pour ça. Ils conviennent de refaire la même prise de sang qu’à notre arrivée, et qu’en fonction du résultat, on restait ici tous les trois. Grâce à leur matériel, le résultat de la prise de sang est quasiment instantané. Il semble meilleur, car il convient avec la pédiatre de nous laisser en observation jusqu’à demain, pour que tu fasses ton EEG. Je respire à nouveau.

48 heures à la maternité

Une fois le SAMU repartit, une auxiliaire de puériculture a fini de te préparer pour que l’on nous installe dans une chambre. Cette fois, toi qui n’avais pas poussé de cri à la naissance, tu t’es fait entendre. Tu as été pesé, mesuré et nous avons pu constater que tu étais sur les mêmes normes que tes frères, à voir un beau gabarit (54cm pour 4,210kg). Ce qui est drôle, c’est que c’est cette même auxiliaire de puériculture qui s’était occupé de l’Élu à sa naissance, 3 ans et 5 mois pile auparavant. Avec tous tes capteurs nécessaires à ta surveillance, t’habiller était compliqué, et tu vas d’ailleurs être gêné un bon moment par le cathéter qui t’a été posé pour te donner du sucre, quand tu n’avais aucun réflexe de succion. Mais cette surveillance faisait partie du protocole. J’espérais d’ailleurs avoir enfin des réponses à mes questions. Nous nous sommes installés dans la chambre, chamboulés, fatigués, contrariés, mais tellement soulagés d’être ensemble et de te voir éveillé. Cela a d’ailleurs totalement rassuré ton papa, mais pour moi, ce fut plus dur.

Il me faut des réponses, comprendre ce qu’il s’est passé, ce qu’il t’est arrivé et pourquoi…

4 commentaires sur “Ton arrivée au monde

  1. Je suis tellement contente que ça finisse bien ! J’avoue que j’avais du mal à lire l’article tellement j’avais peur de la fin. J’espère que ton petit garçon se porte bien mieux désormais et que tu as pu te détendre par la suite.

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  2. Mais quelle violence de vouloir séparer un bébé qui vient de naître de sa mère ! Dans certains cas d’urgence vitale, ok, mais là ! Heureusement que bébé s’est réveillé. Grosse pensée à toutes celles qui doivent vivre une telle séparation 😢

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