L’arrivée de Numérobis : COVID et déceptions
La grossesse et la naissance de notre petit deuxième ont été fortement marquées par la période de crise sanitaire, et avec désormais plusieurs mois de recul, je constate que cela a beaucoup impacté l’arrivée de Numérobis dans nos vies, mais surtout dans la mienne. D’autres éléments – extérieurs – sont également venus me heurter dans ma vie de maman, et encore aujourd’hui, cela se répercute sur la relation que j’ai avec mon petit trésor.

COVID et confinement
J’ai repris mon travail d’assistante sociale à l’hôpital en septembre 2019, après un congé parental idyllique pour mon premier enfant. En novembre 2019, je tombe enceinte de Numérobis, et très rapidement, je me sens épuisée par cette grossesse, tant physiquement que psychiquement. Chaque mois, ma sage-femme me propose de m’arrêter, mais je me fixe comme objectif mes congés du 6 mars 2020. On commence alors à ressentir la pression à l’hôpital, même s’il n’y a pas encore de cas dans nos services, on ne parle que de ça. Je pars en vacances, les médias parlent alors de confinement dans certains pays, dont l’Italie. On se dit que ça n’arrivera jamais chez nous. Et puis, un soir, la sanction tombe. Le début du confinement et la fermeture des crèches correspondent pile poil au premier jour de mon arrêt de travail, pour me permettre de me reposer. Je suis dépitée. L’Elu a tout juste 14 mois, il déborde d’énergie et de bêtises à faire. Heureusement, Papa-Refait est resté à la maison durant toute la durée du confinement et nous avons pu nous relayer. Toutefois, je me suis sentie très isolée, de ma famille, de nos amis, mais aussi de tout ce qui touchait la préparation à la naissance.
L’impact sur ma maternité
J’ai eu la chance d’être suivie en maison de naissance, où finalement le protocole sanitaire était très peu contraignant : mon mari a continué à assister à mes consultations de grossesse, aux séances de préparation à l’accouchement. Nous avons même eu un accouchement sans masque et notre fils aîné a pu venir chercher son petit frère à la maison de naissance, 3 heures après sa venue au monde. Toutefois, j’ai du passer l’échographie du deuxième trimestre seule et cela m’avait à l’époque beaucoup angoissée : je craignais notamment l’annonce d’une mauvaise nouvelle lors de cet examen assez crucial dans la grossesse et de devoir le dire moi-même au futur papa. Mais ce qui m’a le plus manqué, c’est l’arrêt de tous les ateliers autour de la grossesse et de la parentalité auxquels j’assistais jusqu’au confinement : ne plus voir d’autres parents, futurs parents, professionnels de la petite enfance. Ce manque de lien et d’échanges a fini par beaucoup peser sur mon moral, aussi bien pendant ma grossesse qu’après la naissance de Numérobis. Ces ateliers rythmaient ma vie de jeune maman pour mon premier enfant, j’étais tout le temps en vadrouille… Le lundi en réunion allaitement, le mercredi en atelier massage bébé, le jeudi je découvrais un atelier couches lavables ou portage physiologique. Bref. Je suis passée de tout, à rien. Et même si certaines choses ont tenté de se maintenir en visio, je ressentais une grosse frustration de ne pas pouvoir sortir comme avant. De ce fait, mon bébé voyait aussi moins de monde, moins d’autres bébés et enfants. Je l’ai surtout constaté lors de son adaptation à la crèche. La séparation a été plus difficile pour lui comme pour moi.
« Déjà un deuxième ? », « Encore un garçon ! »
Ce sont des phrases qui ont accompagné toute ma grossesse et l’arrivée de Numerobis. Avant même d’avoir des enfants, nous avions toujours souhaité avec mon mari, avoir des enfants d’âges rapprochés. Après plus de 4 ans pour tomber enceinte de l’Elu, dont l’annonce de la grossesse et l’arrivée au monde ont provoqué des tsunamis d’amour et de réactions enthousiastes et positives, tomber enceinte du deuxième quand le premier n’a pas encore 10 mois n’a pas fait autant de vague, du moins, pas chez tout le monde. Si au départ, cela ne m’a pas trop affectée, au final, j’ai très mal vécu cette différence. Je pense que cela s’est accentué avec la naissance de Numerobis, quand nous avons découvert qu’il s’agissait d’un deuxième garçon. Un deuxième garçon, à peine 18 mois après l’arrivée du premier garçon… pas de quoi s’enthousiasmer. Les écarts ont donc commencé à se creuser… Si son grand frère doit avoir une bonne soixantaine de cartes de bienvenue dans sa boîte à souvenirs, Numerobis peut les compter sur les 5 doigts de la main. Il en est de même pour les cadeaux de naissance, ou pour les visites. J’ai d’ailleurs mal vécu aussi qu’au final, notre aîné reste l’attention première, centrale, de notre entourage. Petit à petit, je me suis donc renfermée sur moi-même et mon deuxième bébé.

« Mais il ne sourit jamais cet enfant ! »
« Son frère n’était pas comme ça, lui ! », « Il aime que sa mère ce petit »… Là aussi, ce sont des phrases que j’ai beaucoup entendu. Et qui m’ont fait beaucoup de mal. Mais ce qui m’a fait encore le plus de mal, c’est que lorsque j’ai essayé d’en parler, d’évoquer cela avec mon entourage, on m’a limite traitée de folle. Je me faisais des films. Sauf que moi, toutes ces différences, toutes ces remarques, je les ai bien vues et ressenties. Peut-être que je les ai exagérées, c’est possible après tout. Mais ma souffrance par rapport à tout cela était bien réelle et peu de monde l’acceptait. C’est finalement auprès de copines, déjà mamans de 2 ou 3 enfants, que j’ai trouvé le plus de réconfort, de compréhension et de soutien, et que je me suis sentie moins seule, car beaucoup avaient vécu et ressenti la même chose à l’arrivée de leur deuxième ou troisième enfant. De mon côté, le plus souvent de façon inconsciente, j’ai compensé. Mon cœur de maman était tellement mal, que j’ai voulu protéger mon tout petit. Alors j’ai tout fait pour le mettre en lumière, pour montrer au monde entier à quel point cet enfant était merveilleux, tout aussi merveilleux que son grand-frère. J’étais à l’affût du moindre sourire pour le photographier et l’envoyer à la terre entière. Je guettais le moindre de ses apprentissages, de ses progrès, pour les filmer, les graver quelque part dans la pierre.
Trouver sa place
Et finalement, la magie a opéré, mais principalement grâce à lui. Il est en effet tellement merveilleux, qu’il a su convaincre et montrer qu’il avait toute sa place et son importance au sein de notre famille, de la fratrie. Il a charmé les gens, développé un talent de clown et surtout commencé très tôt à faire tout comme son frère, pour être tout autant intéressant. Pour ma part, je ressens encore des différences et ça continue à m’impacter, à me blesser, mais dans une moindre mesure. J’en parle aussi plus ouvertement et j’essaye de mettre des mots sur ce que j’ai vécu et ressenti à son arrivée. C’est d’ailleurs là-dessus que travaille la kinésiologue que Numerobis voit, pour l’aider à remettre ses émotions très fortes dans le bon ordre et à composer avec. Elle a ressenti chez lui, dès le départ, un gros sentiment d’injustice. Cela a ouvert une porte. J’ai pu en parler avec elle, elle a pu travailler cela avec lui. Et moi aussi. J’ai pu formuler à mon bébé à quel point ma grossesse et son arrivée ont été si différentes de ce que j’imaginais. Petit à petit, j’apprends aussi à ne pas trop compenser ce que je perçois comme différence entre son frère et lui. Je ne lui dis plus d’ailleurs qu’il est « aimé-choyé-gâté-etc comme son frère ». Maintenant, je lui dis qu’il est aimé (etc) parce qu’il est lui, un petit être unique. Je sais aussi que tout cela est quand même encore marqué très profondément en moi, avec sûrement une grande part d’inconscient, car je continue à être en vigilance constante par rapport à notre entourage, prête à intervenir. Et surtout, j’essaye de comprendre pourquoi cela me touche tant, pourquoi j’en ai autant souffert et comment réussir à dépasser cela.
Et toi, as-tu vécu ta grossesse pendant la période COVID en mode confinements et restrictions ? Et comment as-tu vécu l’accueil réservé à ton deuxième (troisième ou plus) enfant ?
Quelle était ta place dans la fratrie? Cela explique peut être le ressenti que tu as avec ton second?
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Je suis l’aînée d’une fratrie de deux… C’est pour cela que je trouve bizarre que ces différences m’affectent tant… car je ne les ai pas vécu personnellement.
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C’est marrant nous avons un peu le même profil : deux petits garçons rapprochés dont le 2e né pendant le COVID ! De mon côté je n’ai pas eu ces mêmes sentiments : les deux ont été accueillis par nos familles respectives de la même manière (avec froideur par la belle famille « -un de plus », avec extrême enthousiasme par la mienne « -les premiers! »). Certes le deuxième a reçu moins de visites évidemment mais cela m’allait bien, car je dois dire que ces visites m’ont toujours beaucoup pesé (ranger la maison alors que tu es à bout, faire bonne figure alors que tu rêve de faire enfin une sieste, recevoir les 36 conseils-avis avec le sourire..). J’ai aussi eu moins d’activités comme toi mais ça m’allait car j’étais plus en confiance dans ma parentalité, je me sentais aussi bien moins seule à la maison avec mon mari en télétravail. Quant à la proximité du deuxième avec les autres enfants j’ai au contraire trouvé que l’intégration à la crèche était plus simple car s’il avait moins vu de bébés par ci par là il avait eu l’occasion d’observer son frère et d’interragir avec lui, ce qui faisait une bonne différence!
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Je suis en effet je pense un cas un peu à part, qui adore recevoir des visites et faire pleins de choses en plein post partum lol ! Je sais que j’ai beaucoup de copines qui ont énormément apprécié la naissance en mode confinement pour avoir une « excuse » pour limiter les visites ! Moi, c’était mon angoisse !
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J’ai également 2 garçons mais ils ont un peu moins de 3 ans d’écart donc pas rapprochés et mon 2e est né pendant le confinement au même moment où on a appris le cancer incurable et très avancé de mon papa. Vivant à l’étranger, frontières fermées je n’ai pas pu lui dire au revoir. Ce covid a bouleversé beaucoup de choses, j’avais la tête dans le guidon mais avec le recul, je constate la même chose que toi. Je pense que c’est multifactoriel pour moi: covid + 2e garçon + papa en fin de vie…
Mes 2 enfants sont différents et mon 2e est moins » solaire » que mon aîné. Je mettais ça sur des différences de caractère mais probablement que l’isolement et ma tristesse de l’époque ont également joué
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En effet tu as du vivre des émotions très fortes durant cette deuxième grossesse. Si cela peut te faire du bien, je trouve qu’un bon kinésiologue peut aider à réparer certaines blessures et faire un travail « maman-bébé » qui peut aider après des épreuves si difficiles.
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Personnellement, je suis tombée enceinte une semaine avant le confinement. J’ai donc vécu la quasi totalité de ma grossesse isolée, juste avec mon mari. Il a été d’un énorme soutien dans une grossesse marquée par 5 mois de vomissements mais malgré tout, j’explique mon gros baby blues par cette grossesse que j’ai vécue bien seule… et effectivement, j’aurais comme toi voulu voir plein de gens à la naissance de notre fille, et ça n’a pas été le cas à cause de la crise sanitaire.
Ce qui m’affecte le plus, c’est que ma fille qui a maintenant 18 mois ne connaît toujours pas ses grands parents paternels qui vivent en Amérique du Sud. Les frontières ont été fermées très longtemps puis le prix des billets était exorbitant… ils vont finalement se rencontrer dans un mois mais que de temps perdu !
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J’ai accouché de mon 2ème début mars 2020, ce qui fait que j’ai eu droit à deux semaines de visites et puis silence radio. Les deux premières semaines du confinement étaient royales ! J’ai profité pour enfin récupérer de l’accouchement, et puis la crèche de la grande a fermé et le marathon de ma vie a commencé…
Je n’ai pas l’impression d’avoir connu l’indifférence dont tu parles et je trouve ça super triste. C’était certainement un peu moins un gros événement mais je pense que c’est un peu normal (dans ma version avec modération).
Parcontre je te rejoins complètement sur le poids de l’isolement, c’était loooooong. J’avais en plus 2 copines en congé maternité en même temps, on comptait bien profiter des cafés poussettes et on a rien eu du tout 😢
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Ton article me parle pour mes 2 fils !
L’aîné est né juste à la sortie du 1er confinement, et s’il y avait des aspects positifs à être au calme chez soi, j’ai aussi vécu beaucoup de stress et de déceptions pour la fin de ma grossesse confinée. Quant à l’accouchement avec des protocoles durcis, des oignants stressés, puis l’été encore en crise sanitaire et angoissant qui a suivi, ce ne sont pas de bons souvenirs.
Et mon deuxième, tout juste 1 mois, un vécu de grossesse très différent (rencontres, ateliers, etc.), mais effectivement, pour lui aussi, un intérêt moins marqué par nos proches : des comparaisons, et des « oui, oui, on passera », mais on n’a encore vu que les grands-parents des petits, pas le reste de nos familles ni les amis. Heureusement, les bisous de son gand-frère lui apportent beaucoup d’amour !
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Votre ressenti me fait penser à un épisode de la série « Scrubs » qui se déroule dans un hôpital: un couple de soignants, Turk et Carla ( elle est infirmière, lui chirurgien) ont une petite fille après avoir eu un garçon. Ils se heurtent à l’indifférence générale de leurs collègues et proches. Turk va même jusqu’à prétendre qu’il s’agit du premier, histoire de susciter l’intérêt d’un personnage nouvellement arrivé à l’hôpital.
De mon côté, quand un proche a un second enfant, je m’y intéresse autant qu’au premier et prévois toujours une babiole à offrir au grand frère ou à la grande soeur.
Bon courage à vous pour le travail que vous faites sur vous-même, c’est énorme!!
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