Traumas et EMDR
Avant de commencer cette article sur mon expérience avec l’EMDR je pense qu’il n’est pas inutile d’expliquer ce que c’est.
Je vais plagier le site de référence sur le sujet (comme ça si certains souhaitent explorer plus cette technique ils auront un point de départ) pour te donner la définition:
« Les initiales EMDR signifient Eye Movement Desensitization and Reprocessing c’est-à-dire désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires.
L’EMDR est une psychothérapie qui permet de résoudre les conséquences psychologiques, physiques, relationnelles, d’expériences de vie traumatisantes, perturbantes. »
Bon la définition est ce qu’elle est mais, d’après ce que m’a expliqué la psychologue avec qui j’ai suivi le traitement, le but est de réussir à aider ton cerveau a traiter des souvenirs traumatiques qu’il n’avait pas réussi à traiter sur le coup. De réussir à intégrer un évènement qui jusque là allait avoir des manifestations violentes et imprévisibles face à (ou non) des stimuli divers (une odeur, un son, une image, une date…) pour que le cerveau arrive enfin à l’intégrer de façon factuelle et « apaisée ».

Alors attention cela ne va pas aider à rendre joyeux un événement triste ou à oublier. Juste à être capable de ne plus être envahi par l’émotion, la douleur, l’angoisse (ou toutes autres symptomatisations) quand ce souvenir se présentera à nous.
Et comme la définition le dit on va se reposer sur le mouvement des yeux pour faire tout ça.
Maintenant qu’on a à peu près établi les contours de la technique je vais te parler de mon expérience avec ce traitement.
Séance préparatoire
Ce type de thérapie est impossible sans réaliser de séance préparatoire (une ou plus) pour plusieurs raisons.
- Ce n’est pas magique. Pour digérer un traumatisme il faut être capable de l’identifier. Parfois plusieurs séances peuvent être nécessaires pour le trouver.
- C’est éprouvant. La technique consiste à se replonger dans des souvenirs qu’on tente d’oublier depuis des années. Il faut être prêt à ce que ça soit difficile et que la situation s’empire avant de s’apaiser.
- C’est imprévisible. Personne ne réagit de la même façon. Certains ne vont pas du tout adhérer à la technique, d’autres vont être ultra réceptifs.
- Il faut avoir confiance en notre thérapeute. C’est d’ailleurs la base de toute thérapie : ne reste pas avec un thérapeute qui ne te convient pas, qui va nier ce que tu ressens ou orienter sur un sujet en particulier qui ne te semble pas être un souci ou l’origine de tes soucis.
Lors de la séance préparatoire ma psychologue a bien vérifié avec moi ces différents points. Pour identifier les traumatismes pour moi c’était plutôt simple. Le fait d’avoir failli mourir en perdant un bébé a aidé à assez vite trouver une origine. Mais j’ai aussi une incapacité à gérer les deuils. Je ne sais pas passer à l’étape de l’acceptation. Et ça déjà c’est un peu plus complexe à traiter parce qu’il faut comprendre pourquoi mon cerveau fait un tel blocage.
Bon on a choisi la facilité pour commencer on a décidé de traiter le traumatisme lié à ma grossesse extra utérine. Au moins comme ça on pourra facilement voir si je suis réceptive ou pas à la technique.
Traitement et conséquences
Je ne vais pas te mentir je suis allée à ce premier rendez-vous en traînant des pieds. Devoir me replonger dans les souvenirs que j’avais pris des années à soigneusement cloisonner pour donner l’illusion d’arriver à en parler sans que ça me noie ne m’enchantait pas, vraiment pas.
Mais j’étais face à un mur, je ne pouvais plus vivre comme ça en espérant oublier, je ne pouvais plus persister à rajouter du scotch sur une boîte qui s’ouvrait de façon anarchique à des moments que je ne pouvais pas contrôler.
Ma thérapeute agit tout en douceur. En début de séance elle réalise un peu d’hypnose et de relaxation et te fait te projeter dans ton lieu refuge. C’est le lieu où elle me renvoie dès que je n’arrive plus à gérer les vagues qui m’engloutissent. Pour me sortir de là. Et elle en a eu besoin…
Lors de la première séance j’ai fait une crise de panique, je n’arrivais plus à respirer, j’étais au bord du malaise, l’heure qui a suivi j’étais vide d’énergie, j’avais froid, mes jambes flagellaient. Lors de la deuxième séance j’ai hurlé, de douleur, de tristesse, de colère mais la suite a été différente. J’ai traîné dans les jours qui suivaient une tristesse qui revenait par vague. J’ai eu des rêves étranges, j’ai ressenti très clairement des douleurs physiques, et des émotions diverses vis à vis de ce que j’avais vécu mais surtout du bébé que j’avais perdu. Car oui cette deuxième séance a remis au centre de ce traumatisme ce que je n’avais pas eu le droit d’exprimer (et donc que mon cerveau n’avait pas pu traiter). On avait nié ma perte en me disant que j’étais chanceuse d’être en vie et qu’au final je n’étais qu’à 7 semaines de grossesse donc que ce n’était rien. Et suite à la séance je me suis autorisée à pleurer ce bébé, il a existé et vouloir l’oublier n’était pas me faire du bien et ceux qui avaient nié cette perte étaient à blâmer, pas moi.

La troisième séance a eu lieu dix jours après, dix jours où je sentais que ça travaillait, où j’avais des flashs, des sensations qui me revenaient par vague et où les deuils non gérés me sont apparus plus fortement. J’ai eu un manque très important de mon grand-père, j’avais envie de l’appeler et je me retrouvais a regarder mon téléphone sachant que c’était impossible et à chercher la dernière bonne nouvelle que j’avais pu lui annoncer. Quantifier ce que je n’avais pas pu partager avec lui en somme. Mais à cette séance là, quand on m’a replongé dans mes souvenirs j’étais… apaisée. Aussi fou que cela puisse paraître j’avais même un léger sourire qui avait tendance à s’imposer.
Libération
Comme tu le lis, pendant que j’étais entrain de réaliser cette thérapie, il n’y avait pas que les séances en jeu. Parfois sur plusieurs jours après je ressentais que mon cerveau était en train de traiter des informations et je me retrouvais dans des montagnes russes. C’est pour ça qu’il faut être sur de soi quand on se lance là dedans, parce que ce n’est clairement pas un cheminement tranquille.
Alors on peut se demander si ça vaut le coup de s’infliger tout ça. Et clairement je peux le dire, pour moi oui ça a valu tout ce que ça m’a fait traverser.
J’ai eu pour ma part des résultats immédiatement. Dans ce que j’avais vécu il y avait plusieurs souvenirs traumatiques qui restaient. Le premier souvenir marquait celui ou j’avais compris que tout allait basculer et avait tendance à « cacher » les autres où je m’étais dissociée. Ce souvenir a été « réglé » des la première séance, j’ai pu l’évoquer sans plus avoir cette boule dans la gorge et une montée de larmes comme auparavant. Ça m’a permis de m’accrocher en me disant que ça fonctionnait et qu’il fallait que je tienne le coup. Mais pendant la thérapie on réalise les rouages étonnants de notre cerveau, et quand il avait géré un souvenir traumatique sans que j’arrive à le contrôler il le remplaçait par un autre. C’est comme ça que s’est effectuée la progression dans la gestion de ce traumatisme, un souvenir après l’autre.
Et à la troisième séance je me suis retrouvée libérée. Et je peux te l’affirmer parce que hasard du calendrier le week-end qui suivait cette consultation on a eu des amis à la maison qui n’étaient pas au courant de ce qu’on avait traversé car c’était avant de les rencontrer. Et j’ai pu en parler sereinement, sans être envahie et submergée, sans boule dans la gorge et poids sur la poitrine.
L’EMDR m’a aidée à intégrer ce traumatisme, à permettre à mon cerveau de traiter cette perte et ce deuil. A trouver et déterrer ce qui était vraiment en jeu pour moi dans l’assimilation de cet événement. Après la gestion de ce premier trauma j’étais encore loin d’avoir fini le travail a réaliser mais je me sentais mieux.
Si cela t’intéresse je pourrais revenir dans une deuxième partie pour parler de l’EMDR et de la gestion des deuils et de l’après thérapie.
Bonjour
J’ai suivi une thérapie EMDR suite à une chute dans les escaliers. Je n’allais pas bien, et c’est ma psychologue qui m’a conseillé d’essayer. J’ai fait 2 séances, j’ai beaucoup pleuré pendant les séances, mais je ne revis plus le traumatisme à chaque fois que j’emprunte mes escaliers.
Depuis, j’en parle autour de moi, si ça peut aider les autres…
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Oui les séances sont éprouvantes mais je trouve que ça vaut le coup. Effectivement ça peut être utilisé pour traiter des accidents aussi qui sont des traumatismes.
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Je suis contente de lire que cette thérapie t’as aidée et que tu te sens mieux avec cette partie de ton histoire. J’avais déjà entendu parler de cette méthode mais juste le nom. Je suis curieuse d’en savoir plus sur son fonctionnement du coup ! Bravo aussi d’avoir fait la démarche !
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Je connaissais aussi de nom avant que ma mère m’en parle et me pousse à en faire une mais pour moi c’était cantonné à des traumatismes d’un certains types. Et en fait en commençant cette thérapie j’ai appris que non c’était beaucoup plus large et comme toutes thérapies en fait quand c’est bien fait ça s’adapte à toi.
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Impressionnant, bravo pour la démarche et félicitations pour les résultats ! Une de mes connaissances a commencé ça pour un trauma lié à un viol, je ne suis pas sûre qu’elle soit allée au bout, les séances étaient une torture…
Faut être archi prêt, quoi… Je me demande si faire ça « plus tôt » ne rend pas la thérapie plus « facile »?
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Les séances sont des tortures oui… Ma psy décrit ça comme un long tunnel a traverser. Tu revis physiquement des douleurs. Ça me déclenchait des maux de tête intense, pulsatile à me donner envie de me frapper. Et puis ton cerveau traite l’information et la douleur disparait… C’est assez irréel quand tu es dedans. En revanche non je ne pense pas que plus tôt c’est, mieux c’est. En tout cas ma psy prône plutôt l’inverse : prendre le temps d’être prête. L’amie avec qui j’en ai beaucoup parlé reconnait qu’elle pourrait avoir besoin de gérer un de ses traumas avec cette méthode mais qu’elle en est juste incapable pour le moment. Il faut être prête a se replonger dans des moments douloureux que notre cerveau n’avait pas su gérer, et s’il n’a pas su c’est que malheureusement il y a une raison…
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